Peu de gens prennent le temps de discuter avec nos chauffeurs de taxi. Ceux-ci sont pourtant des mines d’or de l’information sociale. J’ai récemment eu à prendre un taxi pour me rendre en Basse-Ville, là où Québec n’est pas toujours bien desservie par le système de transport en commun. En chemin, puisque le temps me le permettait, j’ai décidé d’interroger mon chauffeur sur l’arrivée controversée de l’entreprise Uber dans la capitale. Une expérience enrichissante.
C’est au fil de la discussion que j’ai réalisé une chose dans ce conflit. C’est dans la formule et non dans le principe qu’Uber met illégalement le pied dans l’univers du taxi. Le covoiturage n’est pas à proscrire, même qu’il est à conseiller, mais il doit être fait dans le respect et le partage égalitaire. Lorsque qu’un automobiliste d’Allô-Stop vous embarque, vous emmène et vous fait payer une fraction de l’essence, tout le monde y gagne, même l’environnement. Avec Uber, le prix change et n’a pas de frontière. Selon la circulation, la température ou même les journées fériées, les prix augmentent sans qu’aucun avertissement n’ait été émis. Ce point précis, pour mon chauffeur et pour moi, est inacceptable et donne mauvaise réputation à toute l’industrie du covoiturage et du taxi.
La sécurité, voilà un autre facteur que ne pourra jamais vous promettre l’entreprise américaine. Ici, les chauffeurs de taxi suivent des formations, des suivis et doivent se conformer à plusieurs critères stricts de sélection. C’est tout le contraire d’Uber qui embauche quelque peu à l’aveugle. C’est ce que tente d’exprimer le sketch de Claude Dubois qui, ivre, est au volant d’un véhicule Uber, lors du Bye-Bye 2015.
Et que dire de l’injustice financière entre les deux parties. Pour devenir propriétaire d’un taxi, à Québec, il faut débourser des sommes assez hallucinantes. On parle de près de 200 000$, que paient tantôt les entreprises comme Taxi-Coop ou les chauffeurs indépendants eux-mêmes. L’arrivée du géant de San Francisco illégitime tous les efforts et les sacrifices de ces individus en offrant un accès facile et peu cher à ses conducteurs. Tous les efforts pour vivre de son métier sont ainsi piétinés par un groupe entré ici de force.
À Couillard et son gouvernement, je pense qu’il n’est pas impossible de légiférer sur les entreprises technologiques, même si l’histoire peut paraître nous prouver le contraire. Protéger l’industrie locale devrait, à mon sens, faire partie des priorités de nos élus. À la communauté des taxis, continuez de vous faire entendre et de manifester pour faire respecter vos droits et votre dignité. Votre indignation est sociale et soutenue par plusieurs.