Critique cinéma: La vache

La vache : un pur bonheur

Certains films sont de véritables friandises, sucrées, colorées, savoureuses. La Vache, du cinéaste franco-algérien Mohamed Hamidi, fait partie de ces joyeux longs-métrages qui nous donnent le sourire et ravissent notre cœur d’enfant. Sans prendre la tête du spectateur et sans le ravaler au rang d’abruti consommateur de pop-corn. La chose est rare : il faut s’en réjouir.

489941La Vache parvient au Québec auréolé d’un très beau succès public et critique en France, après avoir remporté le Grand Prix et le Prix du public au Festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez. Succès mérité : ce road movie atypique, racontant la désopilante équipée d’un paysan algérien traversant la France en compagnie de sa vache, possède un charme fou. Les comédies tièdes qui peinent à nous arracher un sourire sont trop nombreuses : ici, on rit franchement et longtemps. De la première minute à la dernière. L’exploit est de taille.

L’histoire, abracadabrantesque, est d’un loufoque assumé. Fatah (Fatsah Bouyamed) mène une vie simple, mais heureuse, dans son petit village de l’arrière-pays algérien, entouré de sa femme, de ses deux filles et, surtout, de sa vache adorée, Jacqueline. Le sympathique cultivateur, un brin benêt, rêve depuis des années de participer à la foire agricole de Paris. Un jour, c’est le miracle : touchés par sa persévérance naïve, les organisateurs acceptent sa candidature. Au village, c’est la folie : tous se cotisent pour financer l’improbable périple de Fatah et de son âme sœur bovine.

L’étrange couple s’embarque alors pour la France, traverse la Méditerranée et débarque à Marseille, où Fatah retrouve son beau-frère mal embouché (Jamel Debouzze), qui l’envoie promptement balader. Commence alors une hilarante marche vers le nord, lors de laquelle notre humble paysan ira de joyeuses rencontres en joyeuses rencontres. Un peu trop joyeuses, même, parfois : que ne ferait-on pas, en effet, après avoir fait un sort à une bonne bouteille d’alcool de poire? Mais qu’importe : le voyage continue, et tous tombent sous le charme désarmant du sympathique Fatah. Même Philippe (Lambert Wilson), aristocrate fier, mais désargenté et dépressif, ne saura résister à l’enthousiasme contagieux de l’étrange voyageur.

L’ensemble est formidablement réjouissant. Plusieurs scènes sont tout simplement irrésistibles : ici, Fatah livre une performance endiablée au karaoké d’une fête foraine ; là, il dicte à un Philippe ahuri une lettre d’amour à sa femme (sans bien comprendre le concept) ; là encore, il est accueilli en héros par des agriculteurs français en grève. Dans le rôle principal, Fatsah Bouyamed est tout simplement irrésistible, alors que Lambert Wilson livre comme toujours une partition parfaite. Jusqu’au plus petit rôle, tous s’en donnent à cœur joie.

Certes, on trouvera aisément produit plus calorique que cette inoffensive sucrerie. Fatah et ses compagnons, pour l’essentiel, vivent dans un monde rose bonbon. Le ton est bon enfant, léger, onctueux. Nulle prétention sociale ou militante ici. Les oiseaux chantent et Jacqueline meugle. Et c’est très bien comme ça. La Vache est issue de ce que la comédie française a de meilleur, aux côtés d’Intouchables, Bienvenue chez les Ch’tis ou Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu. Bref, un film qui fait du bien à l’âme, et qui nous permet de rire un bon coup.

3,5/5

Auteur / autrice

  • Nathan Murray

    Journaliste culturel dans son Charlevoix natal pendant la saison estivale, Nathan retrouve avec plaisir, au début de chaque année universitaire, les salles sombres de la capitale. Cinéphile assidu, amateur de musique, de littérature et de théâtre, il vogue de concert en spectacle, entre deux livres d’histoire.

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