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Après le sauvetage de plusieurs institutions financières et la nationalisation d’AIG, l’une des plus grandes compagnies d’assurances, le gouvernement des États-Unis présente au Congrès un plan de redressement du secteur financier de l’ordre de 700 G$. Bien qu’il y ait des négociations sur les détails du plan entre démocrates et républicains, la nécessité d’intervenir de façon efficace fait consensus chez les congressistes. Le redressement fera mal aux finances américaines en faisant grimper la dette publique à 11 315 G$. Mais, selon le secrétaire américain au Trésor, Henry Paulson, cette intervention est nécessaire.
La pluie de milliards commence aussi à s’étendre sur les autres continents. La banque centrale européenne, la banque d’Angleterre, du Japon, de la Suisse et du Canada, ont déjà commencé à remettre les banques à flot en injectant des fonds publics pour une somme de 300 G$. Même si l’action des banques centrales est justifiée, les risques ne sont pas anodins dans une telle crise. Injecter de si grandes quantités d’argent sur les marchés pourrait affaiblir les monnaies et provoquer une hausse de l’inflation, ce qui ralentirait encore plus l’économie.
La crise actuelle est la plus grave crise depuis le krach boursier de 1929, qui avait fait sombrer le monde dans une décennie de marasme économique. Comme à cette époque, l’irresponsabilité des investisseurs et l’aveuglement des gouvernements ont précipité les choses. Ne voulant pas penser aux conséquences, mais uniquement aux profits à court terme, les acteurs du système ont abusé de leur liberté d’action. En 1929, les investisseurs pouvaient acheter des actions à crédit avec une couverture minimum de 10 %. La bourse, en perpétuelle croissance, permettait aux actionnaires de rembourser leurs emprunts à même les profits engendrés, et permettait aux industries d’acquérir une quantité importante de liquidités en émettant des actions. Quand l’économie a ralenti, le système s’est écroulé, car les investisseurs n’avaient plus les moyens de rembourser leurs emprunts.
La problématique actuelle est plus complexe mais similaire. Elle repose sur le fait que les banques ont consenti des prêts hypothécaires à des gens peu ou pas solvables. Pour minimiser les risques, les banques ont transformé les droits sur ces dettes immobilières en titres à haut risque vendus sur tous les marchés financiers. Comme en 1929, tout le monde en a profité. Les banques ont généré des profits en vendant les titres hypothécaires, pendant que les investisseurs faisaient de gros intérêts sur leurs titres à risque. Les citoyens pauvres ont eu droit à des maisons, alors que le gouvernement empochait les taxes et les impôts sur une industrie de la construction en pleine croissance. Quand l’économie a ralenti en même temps que l’inflation a augmenté, les gens peu solvables ne pouvaient plus payer leurs hypothèques et le marché s’est écroulé.
La grande crise avait fait des ravages sur le plan social, mais avait tout de même entraîné par la suite une meilleure régulation des marchés et avait influencé le désir des gouvernements à intervenir quand les choses commençaient à aller mal. Avec le temps, la constante croissance des marchés mondiaux a poussé la tendance vers la déréglementation, puisque les risques semblaient minimes.
Les interventions récentes des autorités semblent choquantes, car les citoyens doivent payer pour l’irresponsabilité d’investisseurs en quête de profits rapides. La non-intervention des gouvernements pourrait par contre s’avérer beaucoup plus désastreuse, car si les banques perdent leurs capacités d’accorder des prêts, ce sont tous les secteurs de l’économie qui vont plonger.
Réglementer efficacement le secteur financier pourrait s’avérer très difficile, car la complexité du système et les ramifications internationales des institutions financières rendent presque impossible la standardisation des règlements. Par contre, le constat est fait: le laisser-aller peut être catastrophique. Plusieurs analystes prévoient par contre un meilleur encadrement de la libre circulation des capitaux et la création de nouvelles agences de notations publiques.