Les élections générales arrivent à grands pas au Québec. Bien que le scrutin n’ait lieu que le 1er octobre prochain, les partis politiques commencent déjà à déployer tout leur arsenal dans le but de convaincre l’électorat québécois. Par contre, une chose est certaine rien n’est gagné pour aucun des quatre partis principaux, dont la lutte risque d’être serrée jusqu’en toute fin de course.
Le PLQ en perte de vitesse
Que l’on soit pour ou contre ce parti n’a pas d’importance, toutefois il faut l’avouer le Parti libéral était une machine électorale bien huilée. Peu importe les scandales qui ont terni son image, l’usure du pouvoir, le changement de chef, etc. Ce parti a maintenu une cote de popularité au sein de l’électorat relativement stable, et ce malgré presque 15 ans de règne sans interruption.
Par contre, les derniers sondages démontrent une certaine diminution de l’enthousiasme envers le PLQ. Certes, les sondages ne garantissent pas une victoire ou une défaite électorale. Toutefois, dans le cas présent, comme l’élection est à date fixe, il offre une belle fenêtre sur les tendances qui de dessinent. Pour la première fois de son histoire, le PLQ obtient moins de 30% des intentions de vote. Du jamais vu! Sans oublier, que grâce sa popularité au sein des anglophones et allophones, ainsi que dans certains comptés à travers la province, le parti de Philippe Couillard réussissait toujours à maintenir ce fameux 30%.
Le mécontentement populaire par rapport aux mesures de rigueur budgétaires du gouvernement en début de mandat a laissé des marques chez les électeurs. Une pilule bien difficile à digérer pour certains. Le gouvernement tente de sauver les ponts en offrant divers investissements dans des secteurs particulièrement touchés par les mesures budgétaires. Toutefois, cela ne semble pas être suffisant, sans oublier que la somme qui sera allouée aux médecins spécialistes en a énervé plus d’un. Le gouvernement donne l’image qu’il n’est pas prêt à être aussi intransigeant avec les médecins qu’il ne l’a été avec d’autres professionnels.
Pour ce qui est de l’équipe, certains ténors du parti ont déjà mentionné qu’ils ne solliciteront pas un nouveau mandat, le plus récent étant Jean-Marc Fournier. Le leader parlementaire du gouvernement quitte la vie politique, et son absence sera bien sentie parmi l’équipe libérale. Sans oublier que des noms comme ceux d’Hélène David et Lise Thériault circulent dans certaines rumeurs. Stéphanie Vallée a également décidé de ne pas se présenter à nouveau.
On observe un manque d’énergie au sein des troupes de Philippe Couillard. Le chef semble confiant, mais la cavalerie n’affiche pas le même dynamisme. Il se peut que certains parlementaires soient épuisés après un mandat de quatre ans, qui faut-il l’avouer a été pour le moins mouvementé.
Le PLQ ne pourra pas uniquement compter sur son bilan économique cette fois pour gagner le cœur des Québécois. Particulièrement à cause de la montée de la CAQ, qui vient brouiller les cartes comme l’ADQ l’a fait en 2007.
Le PQ a la recherche de solution
Même s’il a été dans l’opposition officielle, le PQ a vécu quatre ans très mouvementé. Ils ont perdu le pouvoir après seulement 18 mois de règne. Pierre-Karl Péladeau a fait son entrée en politique ce qui secoué non seulement les cordes de l’Assemblée nationale, mais aussi celle de son parti. Puis il y a eu la démission fracassante de ce dernier après un an en poste. Jean-François Lisée est arrivé au pouvoir devant le prétendant numéro un, Alexandre Cloutier. Le PQ a vu ses appuis dégringolés dans les sondages avant de retrouver un certain momentum dernièrement. Bref, quatre années éprouvantes pour un parti n’étant même pas au pouvoir.
Voyant la situation stagnée, le chef du parti a décidé de brasser la soupe. Lisée a cherché à offrir un nouvel élan. Il a notamment nommé sa collègue Véronique Hivon à titre de colistière, en plus de lui offrir le poste de vice première ministre dans un éventuel gouvernement du Parti québécois. Une stratégie originale, mais nécessaire. Jean-François Lisée est certes une tête en matière de politique, mais sa popularité au sein de l’électorat n’est pas extraordinaire. M. Lisée ne semble pas galvaniser les troupes en région. Son image d’intellectuel montréalais lui colle à la peau. Par contre, madame Hivon est une des politiciennes les plus appréciées des Québécois. Le chef du PQ pouvait maintenant se targuer d’avoir une excellente parlementaire à ses côtés, mais ce n’était pas suffisant pour constituer son équipe électorale. Il a par la suite recruté Jean-Martin Aussant, le visage économique d’un futur gouvernement du PQ. L’ancien député péquiste, qui avait claqué la porte du PQ en 2011, avant de fonder Option nationale, revient en politique active après trois ans d’absence. Si le retour de Aussant est vu par certains comme le retour de l’héritier de Jacques Parizeau, d’autres questionnent ses intentions politiques. En effet, son parcours est pour le moins atypique. Par contre, il offre une tête forte économique au PQ, qui en a grand besoin s’ils veulent attaquer les libéraux sur le bilan avantageux.
Le PQ n’a pas seulement gagné des appuis, il a perdu de fidèles soldats : Alexandre Cloutier, Agnès Maltais, François Gendron, pour ne nommer que ceux-là. Si certains ont vu cela comme la preuve de l’effondrement du parti, de jeunes militants voient cela comme la passation du flambeau vers de nouvelles têtes au sein du caucus.
La pente sera rude à remonter pour le PQ. Si la possibilité de former un gouvernement majoritaire semble illusoire, le parti devra maintenir ses gains importants en région, tout en essayant de faire une percée plus importante dans les régions de Québec et Montréal.
La CAQ : un mirage?
À moins d’un an des élections, il encore difficile de concevoir que le Québec pourrait bien être dirigé par la Coalition Avenir Québec. À la veille de leur troisième élection générale, la troupe de François Legault n’a jamais eu autant le vent dans les voiles. Bien entendu, il reste encore beaucoup de travail à faire pour ce parti. La CAQ peut malgré tout être optimiste, car les intentions de vote sont clairement à son avantage. Sondage après sondage, le CAQ rafle 38% des intentions de vote, soit assez pour croire à la possibilité de former un gouvernement majoritaire.
Cette position de la CAQ est certes avantageuse, mais elle peut aussi s’accompagner d’une nouvelle réalité à laquelle la jeune formation politique n’a jamais été confrontée : être la cible numéro un. Auparavant, la CAQ jouait son rôle d’opposition, elle se présentait aux élections en attaquant la manière de gérer le Québec par le PLQ et le PQ, sans pour autant démontrer qu’il pouvait être une alternative valable.
Pourtant, nous voilà en 2018, et il semble que les Québécois se sentent prêts à donner une chance à la CAQ. Évidemment pour ce faire, François Legault devra miser sur une équipe avec plusieurs têtes ministrables. Malgré tous ses efforts, François Legault demeure toujours le visage principal qu’on associe à la CAQ. Pour renverser cette tendance, Legault devra dénicher des candidatures importantes pour prendre des châteaux forts au PQ et au PLQ. C’est donc dire que les régions éloignées, ainsi que celle de Québec, seront plus que capitales pour la CAQ.
Si le dénouement de ce sprint électoral est déjà excitant, il le sera encore plus s’il se solde par la victoire de la CAQ. À chaque fois qu’un nouveau parti gouverne le Québec, cela s’associe à une nouvelle étape dans l’histoire politique de la province. On a qu’à penser aux impacts de l’arrivée au pouvoir de Duplessis, des libéraux de Jean Lesage, de René Lévesque en 1976. Justement depuis ce soir du 15 novembre 1976, plus aucune nouvelle formation politique n’a pris le pouvoir au Québec….Est-ce que le 1er octobre 2018 marquera une rupture avec cette tendance?
Il a plusieurs raisons qui expliquent cette montée apparente de la CAQ : la baisse de popularité du mouvement souverainiste, l’usure du pouvoir des Libéraux, une certaine tendance mondiale pour choisir des dirigeants s’éloignant des grands partis, par exemple Donald Trump et Emmanuel Macron.
Reste maintenant à voir si la CAQ poursuivra sur son élan, car en politique le moindre faux pas en campagne peut renverser une tendance populaire.
Québec Solidaire à la recherche de crédibilité
C’est une croyance populaire quand on parle d’une formation politique de gauche : ils ne sont pas assez terre-à-terre, ils ne conçoivent pas la réalité comme le reste de la population. Malgré ces croyances populaires, il faut admettre que Québec solidaire est un autre parti qui a vu ses appuis considérablement augmentés au courant des derniers mois. Même si le parti stagne dans les alentours de 10% dans les intentions de vote, ils sont toutefois plus présents que par le passé.
L’un ou plutôt le facteur qui changé la donne pour le parti est sans aucun doute l’arrivée en politique de Gabriel Nadeau-Dubois. Le charismatique ancien leader étudiant a amené avec lui des dizaines de militants prêts à le soutenir, lui et son parti. En quelques mois, GND est devenu député de Gouin, succédant à Françoise David, à co-porte-parole de QS avec Manon Massé. Même si cette dernière a été désignée pour représenter le parti lors des débats des chefs, GND aura un grand rôle à jouer sur le terrain.
En effet, à l’instar de la CAQ, si QS souhaite faire une plus grande percée dans l’électorat québécois, ils devront faire des gains en région. Celles-ci semblent être plus volatiles que jamais, à cause de l’insatisfaction populaire quant à la façon de les gérer. Les Solidaires devront donc les convaincre de deux choses : que leur plan économique est valable et apportera la prospérité aux régions et deuxièmement que les électeurs ne perdront pas leur vote en votant pour QS.
C’est une triste réalité du modèle électoral actuel, c’est la croyance que les citoyens perdent leur vote lorsqu’il supporte un parti qui n’a aucune chance de remporter un compté. Pour ce qui est des idées économiques, c’est une autre paire de manches. Cela a souvent été le talon d’Achille de QS, à savoir d’offrir un plan politique et économique réaliste, auquel les gens peuvent se rattacher. Malheureusement, les gens ont tendance à approuver les idées de ce parti, mais ne croient pas à la façon d’y parvenir.
La fusion avec Option nationale a permis au parti de gagner certains appuis, mais pas assez pour être une force politique comparable aux trois autres partis. Évidemment, si Jean-Martin Aussant avait rallié les troupes de QS, il aurait trouvé leur mandarin économique, ce qui aurait été très bénéfique pour eux.
Bref, si QS souhaite faire des gains en octobre prochain, ils devront rendre encore plus crédible leur offre politique pour que celle-ci se répande ailleurs que sur l’ile de Montréal.
Cette analyse prouve bien que le Québec se dirige vers une élection particulièrement importante, où plusieurs enjeux polarisants seront au menu et dont l’issu final reste encore très nébuleuse.