Je sais, je sais. Le projet de classer la filmographie d’Hayao Miyazaki implique une idée terrible : il y aura forcément un dernier, un « moins bon ». Même bon dernier, le film au bas de ma liste risque d’être au sommet de celle de l’un.e d’entre vous, tant la carrière filmique du réalisateur est prolifique et plurielle. Mon objectif n’est pas de classer pour classer, de pointer des défauts et des qualités ici et là. Non, mon objectif avec cette liste (non exhaustive) est de faire découvrir des films à celles et ceux qui peuvent, certes, connaître de loin le talent du réalisateur/dessinateur sans toutefois avoir visionné l’entièreté de sa filmographie. Je ne prétends à aucune objectivité, ce classement est personnel et sujet à changer au fil des années, mois, semaines, jours, heures, minutes et secondes.
Par William Pépin, journaliste web
11. Nausicaä de la Vallée du Vent – 1984
Nausicaä est, à bien des égards, un proto-Princesse Mononoké. Les thématiques sont identiques et on sort du visionnement avec la même impression que l’être humain, sans être complètement irrécupérable, doit sérieusement se remettre en question. Je crois tout de même que Mononoké est plus abouti et plus mature dans son traitement. Comme tous ses films, la patte artistique du réalisateur est l’une des forces du long métrage même si la trame sonore de Joe Hisaishi (compositeur de la majorité des films de Miyazaki) est selon moi l’une des moins marquantes.
10. Porco Rosso – 1992
Tout comme Nausicaä et Mononoké, Miyazaki explore avec Porco Rosso l’absurdité de la guerre, non sans s’inspirer de classiques comme Casablanca. Malgré son protagoniste transformé en cochon par une malédiction, le film demeure très terre à terre et jongle rarement avec le fantastique. Davantage destiné aux adultes qu’aux plus jeunes, Porco Rosso est toutefois accessible à toutes et tous.
9. Mon voisin Totoro – 1988
Cousin spirituel de Ponyo, Totoro cible lui aussi un public plus jeune. D’ailleurs, plusieurs d’entre vous l’ont sans doute découvert étant enfants. Pour ma part, je l’ai visionné pour la première fois il y a quelque temps et je me réjouis d’avoir été transporté aussi aisément dans son univers. Même si on peut regretter que le personnage éponyme ne soit pas assez présent, les deux jeunes protagonistes sont suffisamment attachantes pour lui voler la vedette.
8. Le Château ambulant – 2004
Pour certain.es, ce film devrait être bien plus haut dans le classement, voire tout en haut. En ce qui me concerne, Le château ambulant ne m’a pas charmé outre mesure. D’un côté, j’aime bien l’idée d’une jeune femme aux prises avec une malédiction qui la transforme en vieille dame de 90 ans. D’un autre côté, je trouve l’exécution maladroite et trop d’éléments interviennent pêle-mêle dans l’histoire. Il faut spécifier que le film est tiré du roman Le Château de Hurle de Diana Wynne Jones. Puisque je ne l’ai pas lu, je ne saurais dire quels défauts proviennent du roman. Cela dit, le film est une œuvre majeure dans le paysage du film d’animation et il serait désolant de le bouder pour ce que je juge être des défauts mineurs.
7. Ponyo sur la falaise – 2008
Certainement son plus enfantin avec Totoro, je ne fais pas du tout partie de son public cible. Pourtant, j’ai apprécié Ponyo pour son charme et sa douceur enjouée. Ce qui me reste en tête après le visionnement du film, ce sont des explosions de couleurs vives et une rafale de joie effrénée qui n’arrêtent qu’à la fin du générique.
6. Le Château dans le ciel – 1986
Si ma mémoire est bonne, c’est le deuxième Miyazaki que j’ai vu. C’est probablement le film sur lequel j’ai le moins de choses à dire, non pas parce qu’il est inintéressant, mais parce tout y est si bien exécuté que le long métrage se suffit en lui-même. Je crois même qu’au départ je voulais visionner Le Château ambulant et que pour une raison évidente, je me suis trompé de film. Je ne regrette pas du tout cette erreur.
5. Le Château de Cagliostro – 1979
Le Château de Cagliostro est le premier long métrage de Miyazaki. Moins transcendant que ses successeurs, le film est toutefois l’un des mieux rythmés. Même s’il s’agit ici d’une adaptation du manga Lupin III de Kazuhiko Katō, Miyazaki a su imposer sa patte artistique et s’approprier l’œuvre adaptée. En somme, c’est un film d’aventure classique et efficace à la Indiana Jones qui plaira au plus grand nombre.
4. Kiki la petite sorcière – 1989
Métaphore de l’entrée dans la vie adulte, Kiki est, à mon avis, son film le plus accessible. Si l’on peut reprocher un dénouement trop rapide (comme plusieurs des films de Miyazaki, d’ailleurs), l’histoire prend suffisamment son temps pour nous plonger dans l’état d’esprit d’une jeune femme qui doit faire preuve d’initiative pour survivre dans un monde d’adultes parfois impitoyable.
3. Princesse Mononoké – 1997
Véritable ode à la nature – et à sa préservation – Princesse Mononoké est sans doute son film le plus violent, mais aussi le plus concret sur le plan thématique. Si l’on peut soulever plusieurs similitudes avec Nausicaä de la Vallée du Vent, il n’en demeure pas moins que Mononoké constitue une version plus aboutie des thèmes proposés par Miyazaki. C’est également son long métrage que je considère le plus réussi sur le plan visuel, avec une imagerie marquante et un bestiaire unique.
2. Le Voyage de Chihiro – 2001
C’est peut-être parce que c’est le premier Miyazaki que j’ai vu qu’il garde une place particulière dans mon cœur. C’est également son film le plus coloré et le plus éclectique, avec des dizaines de personnages et divers lieux où l’histoire prend place. Chihiro est (à mon humble avis) un incontournable du cinéma d’animation, mais également du cinéma tout court. Gagnant de l’Oscar du meilleur film d’animation en 2003, on peut se demander pourquoi il fut cloisonné dans cette catégorie alors qu’il aurait certainement eu des chances de remporter la récompense pour la catégorie meilleure film. Ici, le travail du compositeur Joe Hisaishi est incomparable, sans doute sa meilleure bande originale en carrière.
1. Le vent se lève – 2013
Ici, Miyazaki laisse de côté la fantaisie de ses univers pour s’ancrer dans le réalisme. Le vent se lève est inspirée de l’histoire d’un ingénieur japonais en aéronautique, Jiro Horikoshi, dont la vie est dédiée à la conception d’un nouveau modèle d’avion révolutionnaire. Encore une fois, le réalisateur dénonce les absurdités de la guerre, tout en assumant davantage sa passion pour les avions. C’est sans doute son film le plus touchant, mais également le plus doux-amer dans son traitement. D’ailleurs, après ce film, Miyazaki prévoyait prendre sa retraite, mais est revenu sur sa décision en 2016. Le vent se lève est la preuve que la créativité chez l’humain ne possède pas de date de péremption, que le meilleur est toujours à venir.