C’est lundi que le chef du Parti Québécois, Paul St-Pierre Plamondon, présentait son budget de l’an 1. Le document de 82 pages cherche à faire valoir la capacité financière du Québec à devenir un pays. Depuis, nombreuses sont les réactions des partis politiques adverses.
Henri Paquette, journaliste collaborateur
Le chef de la formation indépendantiste semblait très ambitieux lorsqu’il présentait le rapport intitulé Un Québec libre de ses choix (2023). Il a soutenu qu’en devenant indépendant, le Québec aurait un déficit budgétaire moins pesant que celui qu’il gère actuellement en tant que province canadienne. Selon le rapport du Parti Québécois, le Québec économiserait 12 milliards de dollars durant les sept premières années de son indépendance.
Au sujet du trou financier que représenterait l’abolition de la péréquation, monsieur St-Pierre Plamondon n’était pas très inquiet. Dans un Québec-pays, les sommes d’argent autrefois vouées au financement des ministères et des programmes fédéraux seraient désormais utilisées pour compenser le manque issu de la fin du programme de péréquation. En rapatriant ces sommes d’argent, le Québec économiserait 8,8 milliards de dollars et rembourserait à un milliard de dollars près ce trou financier. Le Québec reçoit en effet 9,6 milliards net de dollars par année provenant d’autres provinces canadiennes plus riches.
Le chef du Parti québécois a aussi comparé la situation économique d’un Québec souverain avec celles d’autres pays dans le monde. En ce qui a trait au ratio dette/PIB, le Québec arriverait deuxième derrière l’Allemagne. Il serait en meilleure position que la majorité des pays de l’OCDE et de l’Union européenne.
La formation politique a toutefois laissé planer un grand doute quant aux impacts économiques qu’engendrerait la création d’une monnaie, d’une armée et de frontières québécoises si le Québec devenait souverain.
« Les bébelles de Patrimoine Canada et de Transport Canada »
C’est l’image qu’a utilisée Paul St-Pierre Plamondon pour faire valoir que le Québec devrait arrêter de dépenser pour des ministères fédéraux qu’il juge « inutiles ». Cette déclaration a toutefois fait l’objet de critiques assez corsées à son égard. Le premier ministre du Québec, François Legault, a répliqué en faisant valoir que le projet de souveraineté ferait perdre des emplois aux fonctionnaires fédéraux. À cet effet, le chef du PQ a dû assumer que l’indépendance du Québec provoquerait effectivement des pertes d’emploi chez les fonctionnaires fédéraux des ministères de la Santé, de l’Immigration, du Patrimoine, de l’Emploi et du Développement Social et du Revenu.
En réponse, le chef du PQ a comparé François Legault aux ex-premiers ministres Jean Charest et Jean Chrétien, deux importantes figures du camp fédéraliste au référendum de 1995. Monsieur St-Pierre Plamondon reprochait au chef de la CAQ d’utiliser les mêmes propos que ces deux hommes politiques fédéralistes qui faisaient souvent référence aux pertes d’emploi pour délégitimer le projet d’indépendance.
À l’émission Mordus de politique sur les ondes de Radio-Canada, l’expression « bébelles » a bien mal résonné aux oreilles de l’ex-ministre libérale québécoise, Michelle Courchesne. Elle la qualifie « d’insultante » pour le milieu culturel qui dépend en grande partie des subventions de Patrimoine Canada pour effectuer ses activités professionnelles. Selon elle, le Parti Québécois est en train de se mettre à dos les artistes qui, rappelons-le, sont historiquement plutôt favorables au projet d’indépendance.
Du côté du Parti libéral du Québec, le chef intérimaire, Marc Tanguay, a été très clair. Le Québec serait viable s’il était indépendant, mais il serait plus pauvre qu’il l’est actuellement. Pour Québec solidaire, la présentation du budget de l’an 1 a été appréciée et jugée nécessaire pour faire avancer la cause souverainiste.
Des répercussions jusqu’au parlement fédéral
Le Parti conservateur du Canada et son chef, Pierre Poilievre, ont réagi très rapidement au dépôt du budget de l’an 1. Selon l’opposition officielle, la personne à blâmer en ce qui concerne le ravivement de l’option souverainiste est Justin Trudeau. Monsieur Poilievre fait référence aux dépenses hors de contrôle du gouvernement Trudeau. Selon ses dires, les déficits des libéraux fédéraux auraient poussé les souverainistes québécois à jouer sur le terrain des avantages économiques pour faire valoir l’indépendance comme solution.
Au gouvernement fédéral, les réponses des ministres québécois sont unanimes : pas question de revenir sur un débat qui a tant divisé la société québécoise pendant des décennies. Finalement, le Bloc Québécois s’est réjoui du retour en force de ce débat qui représente sa raison d’être principale à la Chambre des communes.