Le météore, de François Delisle, est un long poème tranquille, l’air de rien, puissant comme les eaux d’une rivière.
Ariane Tapp
Collage parfois surprenant mais jamais aléatoire de monologues théâtraux et d’images montrant nature, ville et hommes, cette croisière lyrique nous raconte l’histoire de Pierre, qui purge une peine de prison de 14 ans, et de son entourage : sa mère, son ex-conjointe Suzanne, mais aussi un gardien de prison et un jeune dealer.
Mis à part la narration inusitée, ce qui dérange d’abord est le choix du réalisateur de donner à ses personnages une voix qui n’appartient pas aux acteurs qui apparaissent à l’écran. On ne s’en rendrait pas compte s’ils étaient tous inconnus; or, quand on entend François Papineau nous livrer les pensées du prisonnier, on s’attend à voir François Papineau, d’où un certain inconfort lorsque le visage du réalisateur s’impose comme étant celui de Pierre. En revanche, plus le récit avance, plus on se laisse entraîner par l’histoire qui nous est contée. Si bien qu’à la fin, on n’entend plus François Papineau comme on ne voit plus François Delisle. C’est Pierre qu’il y a dans nos yeux et nos oreilles.
Absence de dialogue, bruitage subtil, images qui s’enchaînent, esthétiques, allant des embruns d’une chute à des tours d’habitation, en passant par une suite d’iris et de ciels ennuagés, Le météore n’a rien à voir avec Armageddon et peut en rebuter plusieurs. Mais on se surprend à verser une larme ou deux devant un coucher de soleil sur lequel se superpose la voix d’une mère vieillissante qui fait son épicerie.
Tout en poésie et en symbolique, le film de François Delisle est unique et fait du bien à côté de tous les « blockbusters ». Il nous permet de prendre le temps de penser, de ressentir et d’admirer. Après, peut-être ne regarderez-vous plus l’écran de votre téléphone intelligent, mais les gens autour de vous et les branches des arbres qui dansent au vent.