Bélem, Brésil – Des centaines de défenseurs des droits des réfugiés palestiniens, des groupes de pression arabes, des réseaux d’aide et de soutien pour les réfugiés, des mouvements féministes ainsi que des organisations non gouvernementales ont exploité l’espace d’expression que représente le FSM. Parmi cette myriade de participants, certains réclament la paix au Moyen-Orient, d’autres encouragent le boycottage des produits américains et israéliens ou demandent le retour sécuritaire des réfugiés palestiniens en Palestine. Ils ont tous affiché leurs couleurs dans la programmation du FSM afin de contracter des alliances avec les différents organismes présents, pour faire circuler des pétitions pour le retrait de Tsahal (l’armée israélienne) des territoires palestiniens et particulièrement pour porter à la connaissance des participants les réalités quotidiennes des Palestiniens. Des femmes ont d’ailleurs dévoilé le récit de leur vie en tant que réfugiées palestiniennes.
L’histoire d’une réfugiée palestinienne
Après trois jours de vols et d’interminables escales au Proche-Orient et en Europe, Fatima Al-Khadir, une réfugiée palestinienne âgée de 79 ans, est enfin arrivée au Brésil. C’est par l’entremise du Réseau des femmes arabes qu’elle y a retrouvé son fils, Hassan, de qui elle était séparée depuis 15 ans.
Depuis 1949, un an après la création d’Israël, Fatima Al-Khadir a pour résidence le camp de réfugiés de Burj Al-Shamali au Liban. Relatant les premières années tranquilles de sa vie de paysanne, Mme Al-Khadir a soutenu qu’à cette époque personne de sa famille et du village n’aurait envisagé une telle guerre et toutes les déchirures qui l’accompagneraient. «Toute la tristesse du peuple palestinien a commencé par l’attaque de la troupe Haganah en 1948», raconte Fatima. Haganah était une force armée sioniste pour la défense des Juifs émigrés en Palestine. Selon les dires de la réfugiée, les avions sionistes laissaient tomber des lettres adressées aux populations palestiniennes. Le message : «On ne veut plus de votre peuple ici.» Toutefois, la majorité des paysans étaient analphabètes, alors ils demeuraient sur leurs terrains, ne comprenant pas la portée de ces avis. Pour Fatima Al-Khadir, la guerre de 1948 n’a été que massacres. Les paysans de son village ont été éliminés les uns après les autres et plusieurs membres de sa famille se sont éteints sous ses yeux de jeune femme atterrée. «Nous devions alors choisir entre mourir ou sortir du pays.» C’est ainsi que, depuis plus de soixante ans, elle vit dans le camp. Elle y a fondé sa famille et l’a aussi vue se dissoudre au Liban.
À ses yeux, le FSM est un bon endroit pour faire connaître la cause des réfugiés palestiniens. Son fils Hassan a confié que tout ce qu’il désirait, c’était de partager son histoire, qui reflète la réalité de millions de réfugiés palestiniens, en espérant toucher les participants du forum. «Tout ce que je demande, c’est notre sécurité et notre liberté [des Palestiniens].»
Les réfugiées palestiniennes ayant offert leur témoignage au FSM s’y étaient rendues grâce à un ensemble d’organisations indépendantes arabes féministes qui forme le Réseau des femmes arabes. Celui-ci a pour mission de «construire un discours arabe féministe démocratique basé sur les besoins des femmes arabes», selon ses propres termes. Il lutte pour la participation du mouvement arabe féministe dans la société civile du Moyen-Orient et travaille à la défense de cette participation dans le monde.
Appel à la solidarité propalestinienne
Les témoignages émouvants entendus lors de la rencontre ont suscité de nombreuses réactions auprès des participants. Parmi eux, Jawad, d’origine marocaine et membre du Secrétariat national du Comité d’annulation de la dette du Tiers-Monde (CADTM), s’est prononcé sur la nécessité du positionnement des altermondialistes en faveur de la Palestine. «Le mouvement altermondialiste doit être clair et direct sur le génocide qui est actuellement perpétré en Palestine. L’autre monde que nous voulons, c’est avec un peuple palestinien libre.» Jawad a d’ailleurs profité du moment pour féliciter la fraternité et la solidarité des Latino-américains pour la cause palestinienne. Le Brésil est un des nombreux pays latino-
américains qui accueillent chaque année des réfugiés palestiniens.
Une initiative qui en dit long
Yuri Haasz, Israélien d’origine, porte fièrement un chandail d’un rouge éclatant sur lequel est inscrit : «I am Palestinian». Quelque temps avant son entrée prévue dans le service militaire obligatoire de l’armée israélienne, sa famille a choisi de quitter la terre promise pour venir s’établir au Brésil. Ses parents n’adhéraient pas à l’idéologie de l’État exprimée dans l’armée et qui s’opérait selon eux par un «lavage de cerveau». En janvier dernier, ce jeune homme a mis sur pied une campagne de solidarité à l’endroit du peuple palestinien, qui sera véhiculée par le film I am Palestinian. L’idée de son projet est de rallier le plus grand nombre de citoyens, quel que soit leur pays d’origine, contre l’oppression des Palestiniens afin de souligner que la question palestinienne ne saurait se résumer au débat projuif ou proarabe, mais engage une vision du juste qui concerne chaque citoyen. Tout participant volontaire venant de différentes régions du monde est appelé à se présenter et à dire, dans sa langue usuelle, «Je suis Palestinien». Selon Yuri Haasz, le proactivisme palestinien est déjà fait par les organisations indépendantes; le FSM est un outil qui leur permet de dévoiler l’impact de leur accomplissement.