Bourse d’études masculine : Comprendre le dossier André Gélinas

Parce qu’elle a été jugée discriminatoire par l’Université Laval, la bourse d’études réservée aux étudiants masculins en sciences politiques d’André Gélinas a été refusée au début du mois d’août. N’ayant toujours pas décidé s’il poursuivra l’institution devant la justice, le donateur appelle maintenant les associations étudiantes et le campus à se mobiliser dans une bataille qu’il juge inégale, mais essentielle pour les générations à venir.

Consterné par l’interprétation «erronée» qu’a faite l’Université de sa demande, André Gélinas estime que l’institution démontre un double-standard clair quant au sexe de ses étudiants.

D’abord questionné sur les raisons de ce refus, Samuel Auger, des relations médias de l’UL, souligne qu’une «bourse dirigée exclusivement envers les hommes devient discriminatoire lorsque les programmes visés comportent déjà un pourcentage significatif et majoritaire d’étudiants masculins ».

Or, l’administration lavalloise ne réserverait pas le même traitement aux étudiantes dans des programmes déjà très féminins, selon l’ancien enseignant en administration. « Comment se fait-il que cette exigence n’est prononcée que pour les hommes, alors que les femmes peuvent avoir accès à des bourses, peu importe la discipline et la proportion y étant associées, demande-t-il. C’est une condition spéciale qui me semble totalement injuste».

Un combat qui ne peut se mener seul

Déterminé à clore ce dossier dans les règles, M. Gélinas rappelle qu’il n’a pas les ressources pour faire face aux grands moyens de l’Université Laval jusqu’en cour supérieure, en cour d’appel et en cour suprême. L’intérêt du débat est public selon lui et ne devrait pas se limiter qu’à sa personne. «Je ne peux pas mettre ma succession dans le rouge pour défendre un problème qui devrait intéresser tous les étudiants, leurs parents et même la commission des droits de la personne », poursuit-il.

L’homme de 81 ans invite donc les divers organismes concernés par le sujet de la ville de Québec à entreprendre des actions pour tenter de comprendre la position de l’Université, qu’il considère toujours floue. «Je n’ai jamais vu d’examen juridique en bonne et due forme pour défendre l’argument du rectorat, s’indigne André Gélinas. Qu’on interroge, qu’on enquête et qu’on aille demander aux personnes responsables d’où vient cette fermeture ».

En réponse à toutes ces questions, Samuel Auger précise que la nature de la bourse ne respectait simplement pas les valeurs de son employeur. « C’est en matière d’égalité des chances, et une disposition relative à la discrimination positive était non-conforme, injustifiée et incompatible avec la Charte », soutient-il.

Plus intrigant encore, les fonds de soutien associés avaient été approuvés en 2014 par les dirigeants de l’Université. Ces derniers seraient ensuite revenus sur leur décision, deux ans plus tard, alors que la bourse était sur le point d’être créée. « Tout était approuvé à la Faculté des sciences sociales, j’avais même pris une photo avec le recteur, s’amuse l’ancien directeur de l’ÉNAP. François Blais, ministre de l’éducation à l’époque, avait même secondé». Lorsque questionnée sur ce changement de position si soudain, l’Université n’a pas voulu répondre aux questions d’Impact Campus.

Initialement entériné par toutes les parties prenantes, le processus aurait donc été avorté à l’interne par un vice-recteur quelconque, selon M. Gélinas. Celui-ci considère d’ailleurs que la communauté étudiante aurait intérêt à interpeler le ministère de l’éducation sur le sujet.

Un débat répandu dans la province

Les questions d’inégalité en ce qui a trait aux bourses d’études selon le sexe ne concernent pas que le campus de l’Université Laval. C’est du moins ce qu’affirme haut et fort le donateur, rappelant que cette discrimination est généralisée au Québec. « On ne parle que d’ici, mais regardons l’UdeM, l’UQAM, McGill et Sherbrooke, explique-t-il. Partout, les bourses accessibles aux femmes sont plus nombreuses, regardez par vous-même ».

Récemment devenus minoritaires dans la fonction publique, les étudiants masculins sont de plus en plus nombreux à délaisser les bancs d’école avant l’université. André Gélinas l’assure : ce problème ne peut que s’aggraver dans un tel contexte en éducation supérieure. «Il y a un décrochage scolaire important chez les garçons et personne ne s’y intéresse, affirme-t-il. C’est un prolongement, car il n’y a aucun financement pour eux ».

D’ici quelques jours, M. Gélinas devrait statuer à savoir s’il entreprend des poursuites judiciaires contre l’Université Laval. « Pour l’instant, c’est en suspens, mais on m’a déjà assuré que l’interprétation du rectorat était erronée », conclut-il.

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