Une récente étude de l’équipe du Dr Rouabhia, du Groupe de recherche en écologie buccale de la Faculté de médecine dentaire de l’Université Laval, démontre que la cigarette électronique a des effets néfastes sur des cellules de la bouche.
Loin de donner une réponse claire et précise sur les réels effets du « vapotage » sur le corps humain, le rapport, publié dans la revue scientifique Journal of Cellular Physiology, s’attaque au mystère qu’entoure cette nouvelle tendance sur la santé. Une manière de remettre les pendules à l’heure et de donner l’heure juste vis-à-vis un phénomène encore très méconnu.
Depuis les innombrables recherches qui ont démontré les effets néfastes de la cigarette classique (à combustion) sur la santé, des chercheurs de tous genres ont continué de chercher des solutions de rechange à ce produit toxique pour la santé. Après de nombreuses tentatives, est alors apparue la cigarette électronique telle que nous la connaissons. Celle-ci peut sembler, aux yeux du consommateur, du moins, totalement inoffensive pour la santé.
Toutefois, selon le Dr Mahmoud Rouabhia, ce n’est pas le cas. Questionné au sujet de ses recherches sur les effets du vapotage, celui-ci s’est dit surpris du nombre élevé de personnes estimant que le liquide de la cigarette électronique n’est constitué que d’eau et de nicotine.
« Ce liquide ne contient que très peu d’eau », explique le Dr Rouabhia. Ce sont les deux ingrédients de base, le polyéthylène glycol et de la glycérine végétale – des corps gras -, qui créent l’épaisse fumée inhalée. À cela s’ajoutent évidemment la nicotine et des arômes alimentaires.
Le problème, affirme-t-il, c’est qu’il n’y a pas de réglementation concernant l’utilisation de ces arômes dans la fabrication du liquide. Il est donc impossible de connaître leurs effets sur le corps humain. D’ailleurs, très peu d’études ont été menées sur les conséquences de chauffer de tels ingrédients à de très hautes températures comme c’est le cas avec la cigarette électronique.
Sensibiliser à cette nouvelle dépendance
Voilà pourquoi selon lui, « il est de notre responsabilité d’informer les gens » sur les effets de la cigarette électronique. Malgré qu’elle soit fort probablement moins nocive pour la santé que l’est la cigarette à combustion, « on ne peut pas la considérer comme quelque chose de très sécuritaire qu’on peut utiliser comme on veut », prévient-il.
Le professeur s’inquiète d’ailleurs de l’impact que pourrait avoir la banalisation de la cigarette électronique chez les jeunes. Si celle-ci est considérée comme inoffensive, elle pourrait entraîner de nombreux jeunes vers cette nouvelle dépendance perçue à tort comme totalement sécuritaire.
On remarque d’ailleurs une forte augmentation de l’utilisation de la cigarette électronique chez les jeunes adolescents au Canada, une « raison de plus pour laquelle il faudrait faire réellement attention », mentionne-t-il.
Des cellules affaiblies
L’expérience menée par l’équipe du Dr Rouabhia avait pour intention de vérifier les effets de la fumée de la cigarette électronique sur les cellules buccales en culture (in vitro). Les résultats de la recherche ont clairement démontré que les cellules exposées à la fumée de la cigarette électronique montrent des signes de faiblesses importants, en comparaison aux cellules non exposées.
Le nombre de cellules en apoptose (difficulté de vivre) est nettement plus élevé que la moyenne, mentionne -t-il. Donc impossible de dire que la cigarette électronique est totalement sécuritaire.
Néanmoins, le professeur titulaire rappelle qu’une expérience in vitro ne peut être à 100 % représentative de la réalité. Voilà pourquoi il est nécessaire, selon lui, de poursuivre les recherches, puisque de nombreuses questions restent sans réponse. Il ne s’agirait que « du début de l’iceberg, car le projet de recherche continue ». L’étude se penchera d’ailleurs prochainement sur un modèle plus complexe qui intègre les tissus buccaux à la recherche.
Des pistes de solutions
Ne s’arrêtant pas à la simple recherche scientifique, le Dr Rouabhia propose quelques solutions au problème qui permettraient de faciliter les recherches sur la cigarette électronique, tout en réduisant les effets nocifs pour le consommateur.
Le fait de réglementer les arômes alimentaires du liquide serait une façon simple et efficace d’enrayer des produits de mauvaise qualité et de comprendre leurs constitutions. Avertir les utilisateurs sur les réels effets de la cigarette électronique et les sensibiliser à chauffer le liquide à faible température serait un bon départ.
Malgré tout, « la modération a bon goût », et rien n’est totalement sécuritaire à 100 % si ce n’est que d’arrêter complètement, conclut le docteur.