Depuis quelques mois, le débat sur la hausse du salaire minimum s’intensifie au Québec. C’est dans ce contexte que la manifestation 15$/h, Une question d’équité a fait pression devant l’Assemblée nationale le 15 novembre dernier. L’évènement a rassemblé de nombreux étudiants et groupes militants.
Cette indignation s’inscrit dans la campagne 15plus, menée par plusieurs groupes syndicaux, politiques et communautaires à l’échelle de la province. Exigeant une augmentation immédiate du salaire étudiant, le mouvement ne prend pas de détour. « C’est pour l’indexation du salaire au coût de la vie et une hausse à 15$/h, dès maintenant », revendique un membre d’Alternative Socialiste, l’une des organisations derrière la campagne, André-Philippe Doré.
Historiquement, le mouvement est né aux États-Unis. C’est au nord-ouest, dans la ville de Seattle, que les premiers travailleurs ont obtenu gain de cause. La ville a récemment adopté un salaire minimum à 15$/h et l’économie a très bien réagi, affirme le comité-organisateur.
La coalition soutient que les individus moins bien nantis ne sont pas traités de manière équitable en recevant un salaire de misère. « L’institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) a calculé, en 2016, ce qu’était le salaire nécessaire afin de contribuer à la société au niveau culturel, social et politique, d’où le 15$/h », poursuit André-Philippe Doré.
De son côté, l’étudiante en sociologie et militante pour le mouvement 15plus, Roxanne Lachance, déclare que l’impact d’une telle réforme serait très mince sur les grosses entreprises. « Pour faire vivre ce projet-là, elles ne devraient qu’augmenter de quelques sous certains produits », explique-t-elle.
Un débat qui touche les étudiants
À travers des actions de mobilisation et de solidarité, des pétitions, du matériel d’information, des conférences et des ateliers d’information, la campagne va poursuivre son objectif jusqu’à ce qu’il soit atteint. Les deux étudiants relèvent qu’une pétition de 22 000 signatures a récemment été déposée à l’Assemblée nationale.
Roxanne Lachance remarque que plusieurs étudiants doivent travailler pour payer leurs études et qu’un salaire de 10,75$/h ne suffit pas toujours. À l’Université Laval, les auxiliaires de premier cycle ne font même pas 15$/h, relate l’étudiante. « Tu travailles dans un domaine de recherche scientifique et tu gagnes environ 13$ », s’indigne-t-elle.
Se basant sur les études de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), les deux étudiants démontrent qu’un salaire à 15$/h stimulerait le raccrochage scolaire. « Ça toucherait les jeunes sans diplôme d’études secondaires pour une simple raison : quand les emplois sont mieux payés, les gens demandent plus de qualification », affirme le militant. Il avance que l’impact serait donc considérable sur le taux d’inscription pour les études supérieures, ce qui, à long terme, augmenterait selon lui le financement et la qualité des services sur le campus.
Une question d’équité
L’équité des sexes est un aspect important de la campagne 15plus. Roxanne Lachance, qui est également membre du comité Femmes ULaval, dénonce l’offre en matière d’emplois bien rémunérés pour les femmes. « Deux tiers des gens au salaire minimum sont des femmes », indique-t-elle, soulignant qu’il est plus difficile pour une femme, avec la même formation, de trouver un emploi bien payé.
Le salaire à 15$/h pourrait donc améliorer les conditions de vie de nombreuses Québécoises. Lors de la manifestation du 15 novembre, quatre des cinq interventions ont été faites par des femmes. « C’est notre manière de les mettre de l’avant », explique André-Philippe Doré.
Une population mal informée
Selon les militants rencontrés, il existe différents types d’individus qui s’opposent à la hausse du salaire minimum. Les plus nombreux sont ceux qui ne comprennent pas réellement l’économie. « C’est compréhensible, c’est la société qui encourage ça, en fait. Le conditionnisme économique, c’est dire que c’est bien compliqué… », estime André-Philippe Doré. Selon lui, c’est ce même groupe qui établirait une corrélation entre une hausse des prix et une augmentation des salaires.
Tous ensemble, ils critiquent d’ailleurs l’approche médiatique des économistes québécois. « Ils n’ont pas les meilleurs arguments. C’est de la propagande molle», poursuit l’étudiant en philosophie. Ces experts fonderaient une incertitude dans la population, ralentissant le débat. À l’inverse toutefois, beaucoup d’économistes se sont déjà positionnés favorables à la cause.