Revue de la 8ème édition du festival Plein(s) Écran(s) (2/4)

Encore une fois cette année, les journalistes d’Impact Campus sont de retour pour vous donner leurs impressions de la quarantaine de courts-métrages sélectionnés dans le cadre de cette édition 2024 du Festival Plein(s) Écran(s). Pour les nouveaux.elles, le principe est le suivant (rien de compliqué et juste du plaisir, promis!) : à chaque jour du 16 au 28 janvier et pendant 24 heures, vous aurez la chance de pouvoir visionner une variété de courts-métrages, passant de la réalité à la fiction, des animations aux documentaires, du rire aux larmes. Vraiment, tout y est ! Et quitte à nous répéter : nous vous encourageons fortement à y jeter un coup d’œil, à partagez, vous aussi, vos coups de cœur et vos réflexions, puisque ce festival est, après tout, l’occasion idéale de se rassembler, de contribuer à la démocratisation de l’art cinématographique et à son rayonnement.

Par Antoine Morin-Racine, chef de pupitre aux actualités, et Mathilde Chetaille, journaliste collaboratrice

Pour profiter du Festival Plein(s) Écran(s), rien de plus simple : l’événement est gratuit et disponible à toustes. Vous n’avez qu’à vous rendre sur leur page Facebook (ici) ou Instagram (ici). Vous pouvez également avoir accès à toutes les informations concernant le festival et aux courts-métrages directement sur leur site web (ici). Bon visionnement !

Mood  (tels qu’établis par le festival)

Punk, Doux, Méditatif, Weird, Intense, Surprenant, Angoissant

20 janvier – Antoine

3 Teaspoons of sugar (12 minutes)

Réalisation : Kabelo Maaka et Tshepo Maaka | Mood : Weird

Synopsis : Dans une maison où les repas sont un merveilleux festin permettant de se réunir et d’échanger, trois membres de cette famille unie deviennent diabétiques.

Avis : 3 teaspoons of sugar est un portrait émouvant et éducatif de la réalité du diabète vue à travers l’expérience de plusieurs membres d’une même famille. Avec une narration particulièrement intime, Kabelo et Tshepo Maaka illustrent bien comment une famille se mobilise pour mieux vivre avec la maladie. Même si la captation sonore n’est pas des meilleures et qu’on a encore droit à un film qui n’est pas sous-titré en français, on n’en sort plus compréhensif.ve et empathique de ce qui s’avère être une excellente communication pour la santé publique.

Chasse Galeriste (6 minutes)

Réalisation : Brian Hawkins | Mood : Doux

Synopsis : Chasse Galerite est un chasseur passionné avec un désir farouche qui le mène à de sérieux ennuis.

Avis : Malgré le peuplement épars de l’immense territoire de la Nouvelle-France, on sous-estime souvent l’étendue de la présence francophone en Amérique. C’est avec cette réalisation que l’on commence « Chasse Galerite », un conte aux airs fantastiques impliquant des chasseurs de cerfs aux bois qui font pousser des pêches et un arbre à barbe, le tout raconté monotonement par un vieux francophone du Missouri. On en apprend avec fantaisie sur la présence de Métis et de coureurs des bois dans ce que l’on appelait le « pays des Illinois ». Il est à déplorer qu’ici encore, seul le français est traduit et la fin très subite du conte laisse les spectateur.rices un peu pantois.es, mais la beauté de l’animation tend à y remédier.  Le lien avec le conte québécois d’un nom similaire reste encore à préciser, mais cela ne l’empêche pas pour autant d’être un film passionnant.

Son of the sea (11 minutes) – Coup de coeur

Réalisation : Abbas Jalali Yekta | Mood : Doux

Synopsis : Un homme et sa femme vivent dans une maison avec l’illusion de leur fils sur le mur, qui amène progressivement des complications dans leur vie.

Avis : Bien qu’il serait conseillé aux cœurs sensibles de s’abstenir, le visionnement de ce short percutant semble obligatoire à chaque âme du Nord global. Dans Son of the Sea, Abbas Jalali Yekta imagine le deuil déchirant des parents d’un enfant que l’on vient à supposer être le petit Alan Kurdi, le bambin réfugié qu’on avait retrouvé mort sur une plage turque en 2015. Abordant le difficile thème du deuil infantile avec une insistance rafraîchissante sur la souffrance masculine, l’on termine ce film dans un état de choc nécessaire à propos des drames innombrables qui alimentent la crise migratoire.

Y’a bon? (4 minutes) 

Réalisation : Marc Faye 

Synopsis : L’annonce d’un projet de loi sur les bienfaits de la colonisation française vient troubler le quotidien de Louise et de sa famille.

Avis :  On a ici droit à une métaphore subtile, mais éventuellement percutante à propos du débat sur la « bienfaisance » de la colonisation française à travers la lettre d’une petite-fille à son grand-père sénégalais. L’excellent bruitage et l’usage très efficace de ces apparitions fantomatiques du passé colonial compensent pour le style d’animation un peu plus simpliste. Même si le propos peut être dur à saisir quand on n’est pas au fait des références ou du propos très franco-français du film, on finit par bien saisir ce qui est exprimé. Ces « bienfaits » que l’Élysée déclare devoir faire partie du curriculum français en 2005 sont une image aussi fictive et dégradante que ces caricatures racistes sur les marques coloniales

21 janvier – Mathilde Chetaille

Annah la Javanaise (6 minutes)

Réalisation : Fatimah Tobing Rony | Mood : Méditatif

Synopsis : En 1893, une jeune fille de 13 ans surnommée Annah devient la domestique et le modèle du peintre Paul Gauguin.

Avis : Déstabilisant, ce court-métrage riche en émotions nous transperce et nous fait virevolter dans la profondeur des pensées d’Annah. Le récit très lent image à merveille une réalité crue et sombre. Les illustrations traversent l’imaginaire en mélangeant rêves et réalité dans un style illustratif incorporant des transitions très cohérentes. Le récit nous permet de comprendre de façon ludique une histoire peu connue et d’une grande tristesse.

Divare Chaharom (10 minutes)

Réalisation : Mahbooeh Kalaee | Mood : Punk

Synopsis : Foyer, famille, relations, désirs, souhaits, tout se joue dans une cuisine. Le garçon hésitant y est seul, livré à son imagination.

Avis : Ce court-métrage est très singulier, mettant en scène une vision de l’imaginatif enfantin. Pas à pas, nous entrons dans la tête d’un petit garçon qui comprend son environnement avec un brin de folie. Le visionnement est assez chaotique et donne le tournis par moment, mais, plus l’histoire avance, plus nous pouvons comprendre le choix éditorial de la réalisatrice. Chacun des éléments a été décidé avec précision et illustre de façon innocente une réalité qui peut sembler choquante. Le choix graphique est très évocateur également, mélangeant des objets réels avec des dessins enfantins qui nous aident à entrer dans l’imaginaire du petit garçon. 

Island (7 minutes) – Coup de coeur

Réalisation : Michael Faust | Mood : Punk, Surprenant

Synopsis : Prix de la Ville d’Annecy 2023. Sur la durée de plusieurs millénaires, l’histoire d’une petite île isolée portant une leçon révélatrice sur la nature humaine.

Avis : Ce court-métrage a été un énorme coup de cœur graphique pour moi. Les illustrations remarquables, mélangeant une allure d’aquarelle et de pastelle, ne peuvent laisser les spectateur.rices indifférent.es. Elles arrivent à nous transpercer en entremêlant des moments de sobriété et d’extrême grandiloquence pour nous faire vivre chacune des émotions. Cela nous permet de nous projeter dans l’histoire sans n’avoir recours à aucune parole.

Trasiego (shifting) (7 minutes)

Réalisation : Amanda Woolrich | Mood : Méditatif

Synopsis : À travers leurs carnets et leurs croquis, une grand-mère et sa petite-fille échangent sur la mort, la migration, la mémoire et l’expression.

Avis : Par ces dessins sépulcraux en noir et blanc, ce court-métrage nous fait parvenir une vision relativement pessimiste de la vie en abordant des thèmes tels que le racisme, la mort et la perte de mémoire. Bien qu’il soit accompagné de deux voix méditatives et apaisantes, le discours et les images sont angoissants par moment. Très lent et psychologique, ce récit s’adresse à un public calme et qui aime les ambiances paisibles. Mélangeant le français et l’espagnol dans la narration et l’anglais dans le sous-titrage, il faut être bien concentré.e afin de parvenir à s’immerger dans l’atmosphère singulière de cette vidéo.

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