C’est en sourcillant que je constate que Noovo diffuse la série Aller simple. Après Occupation double, À table avec mon ex et Injections et bistouris, la plateforme sort de sa zone de confort pour offrir aux amateurs de suspense une intrigue haletante, portée par une brochette d’acteur.trice.s tout à fait à point.
Par Steve Carignan, journaliste collaborateur
Grand amateur de la mythique Agatha Christie, je suis aussitôt projeté dans son univers : une grappe de moutons naïfs, en huis clos, et parmi eux, un loup psychopathe. En parallèle, une brigade policière dépassée par la complexité de la situation.
C’est bien ce qui fait la force d’Aller simple : une panoplie d’intrigues dans un tout cohérent. Le trio d’auteurs, par ailleurs issus de la même famille (Épidémie, Annie et ses hommes), excelle à jongler avec différents univers et livrer une finale fracassante, en harmonie avec toutes les pistes confuses auxquelles l’auditoire est confronté.
Visuellement, la série est bien réussie. Les gros plans sur les personnages au visage anxieux, accompagné d’une musique lugubre, sont savoureux. Les acteur.trice.s jouissent d’ailleurs d’un lieu de tournage à couper le souffle ! L’excellent réalisateur Yan Lanouette Turgeon (Le revenant, Pedigree) a même simulé l’écrasement de l’hélicoptère lors du premier épisode, offrant une mise en scène impeccable.
À ma grande surprise, plusieurs thèmes délicats sont abordés : la cancel culture, le marketing douteux, la mondialisation immorale…tous des sujets autant intéressants que perturbants. L’éthique devient ainsi le fil conducteur de la série, soulevant des doutes et des réflexions sur la condition humaine. Le tout est enveloppé par la tristement vraie et stupide nature des réseaux sociaux.
Une distribution éclatante
Le rapatriement de Caroline Dhavernas de chez nos voisins du sud survient au bon moment. Après sa performance remarquée dans la série américaine Hannibal, l’actrice revient en force en interprétant à merveille le personnage de Julie Sicotte.
Si ma mémoire ne me fait pas défaut, je ne me souviens pas d’un personnage aussi captivant que Denis Théberge dans le paysage télévisuel québécois. Luc Picard interprète ce rôle de manière si convaincante, l’auditoire ne peut que rester bouche bée devant une telle performance.
Fidèle à lui-même, Marc Beaupré est un aimant à personnages tordus. Le rôle du fourbe pilote d’hélicoptère lui va à ravir. Éric Bruneau émerge lui aussi comme un acteur qui joue bien les vilaines personnes. Avec Blue moon et Faits divers à son palmarès, on se plaît une fois de plus à détester son personnage du véreux avocat.
Le choix d’Annick Lemay pour jouer l’enquêteuse Juliette Michaud est judicieux. Son rôle, loin d’être flamboyant, assure à l’intrigue une progression bien ficelée et intrigante, sans qu’il prenne inutilement trop de place. Les apparitions de son mari (Jean-Nicolas Verreault) détonnent toutefois de l’intrigue principale.
Cette série va sans doute s’ancrer dans notre imaginaire télévisuel. Une deuxième saison semble être sur les rails. J’accueille cette nouvelle avec scepticisme. Il ne faut surtout pas reproduire la même erreur qu’avec L’imposteur ou Blue moon, deux séries de haut calibre à leurs débuts, pour après devenir souillées par la volonté d’étirer inutilement l’élastique.
Je termine ici par une réflexion : quelle joie ce fut d’attendre une semaine avant de visionner un épisode ! Avec les plateformes de visionnement en continu, on oublie trop souvent de savourer l’œuvre, de faire durer le plaisir. Pressés autant que nous sommes, l’attente s’avère idéale dans cet excellent thriller.
© Crédits photo : Noovo