Après la tourmente de Borderline et ses années de journaliste dans la presse féminine, Marie-Sissi Labrèche nous revient avec La vie sur Mars. L’auteure, qui verse une fois de plus dans l’autofiction, se livre à propos de son dernier roman où elle s’est timidement aventurée dans la science-fiction.
En 2035, une écrivaine québécoise – Fédora – décède d’une rupture d’anévrisme à Raon-l’Étape, en Lorraine. Autant dire sur Mars. Le corps git sur le sol des semaines durant jusqu’à ce qu’on la retrouve, tenant un manuscrit contre elle. À l’annonce de la nouvelle, Neil quitte le Québec pour la France afin d’organiser les funérailles de sa mère. Étrangement, ce dernier ne semble pas affecté outre-mesure. « Il est gelé comme une balle quand il l’apprend. Il prend des pilules non-stop. Il se concentre sur d’autres détails. Un peu comme Eisenberg dans Breaking Bad. Quand il apprend qu’il a le cancer, il fixe une tache de moutarde », confie Marie-Sissi Labrèche.
Houston, nous avons un problème
Ce qui trouble le plus l’ancien étudiant en médecine, c’est la lecture des pages inédites que lui a laissé sa mère : « Il s’aperçoit que ça parle de son enfance. Il apprend là-dedans que son père n’est pas nécessairement parti en mission sur Mars ». C’est ainsi qu’elle lui avait expliqué l’absence de son père, plus jeune. Aussi rapidement qu’avec les anxiolytiques qu’il gobe comme des bonbons, il devient accro à ce « monde parallèle où il a l’impression d’être scotché sur sa mère, de vivre en intimité avec elle, plus même que de son vivant » (p. 59). Ce monde, il s’y plonge tête première, non sans être profondément touché par ce qu’il y découvre.
Et il est comment Neil ? « C’est un garçon de 25 ans qui a été élevé par sa mère seule », affirme l’auteure. Qui plus est, il « a une blonde très fatigante, Rita-Adèle, qui est tout le temps fâchée, qui veut des bébés, qui est beaucoup plus vieille que lui. Il est un garçon qui a été habitué à se faire diriger par des femmes. D’ailleurs, ce n’est peut-être pas un hasard s’il prend des pilules aussi ! »
Autofiction quand tu nous tiens
Depuis Borderline, Marie-Sissi Labrèche est abonnée à l’autofiction. L’écrivaine est passée maître dans l’art de mettre sa vie en scène de façon romancée. Après avoir tentée de se distancier de ce genre littéraire, elle y revient avec La vie sur Mars. Pas si surprenant quand on sait que le livre était au départ un projet personnel. « J’ai commencé à écrire ce livre-là quand j’étais enceinte. Le début des lettres, c’est moi qui racontais ce qui se passe de l’autre bord du placenta à la crevette que j’attendais. »
L’adaptation des lettres en roman se fit tout naturellement. « Je me demandais comment ça serait dans le futur. Je n’ai jamais lu de science-fiction ! Je trouvais que c’était bien original mon affaire [rires] ! » Si la jeune maman ne reviendra pas à la science-fiction – elle est catégorique à ce sujet – elle s’est amusée à pousser son personnage de mère au maximum. « C’était surtout d’évaluer ce qui se passerait si j’étais hyper protectrice, mère poule au max, si je n’avais pas de remparts ! Je ne veux pas faire ça ! », précise-t-elle.
Il y a tout de même beaucoup de Marie-Sissi Labrèche dans La vie sur Mars. « J’ai joué avec moi comme personnage. J’ai joué avec mon mari, mon bébé, mais je les pousse au maximum. […] Je joue toujours avec ce qui m’entoure et je grossis tout. » Mariées à un ingénieur français, mères de bouts de choux et écrivaine à leurs heures : elles se ressemblent, Fédora et elle ? Du tout, du tout…