Entrevue avec Émilie Rioux
La pièce L’Imposture (Évelyne de la Chenelière, 2009) sera mise en scène par Émilie Rioux et présentée par Les Treize du 12 au 16 mars au Théâtre de Poche.
C’est sur le ton de l’ironie et sous les couleurs vibrantes de la critique sociale dont regorge l’univers d’Évelyne de la Chenelière qu’Émilie Rioux a décidé de créer sa première mise en scène. « Pour une première fois, il faut choisir un show qui te représente, que tu veux défendre. C’est important d’être capable d’en parler et d’en être fière », explique Émilie Rioux, qui, ayant lu presque toute l’œuvre de la dramaturge, s’est sentie interpellée par les thèmes qui traversent L’Imposture. Se déroulant de manière fragmentaire entre une entrevue télévisée réalisée en 2009 et un souper entre amis ayant eu lieu vingt ans auparavant, l’histoire questionne des opinions endossées par des personnes bien réelles et soulève des problématiques actuelles. « C’est un véritable brassage d’idées », souligne la metteure en scène.
Cette pièce coup de gueule placée sous le signe de la moquerie est aussi l’un de ces « casse-tête » contemporains qui demande la participation du spectateur, son écoute, car la trame narrative n’y est pas livrée chronologiquement. Grâce à quelques libertés didascaliques, notamment en ce qui concerne le retrait des séquences vidéo, ainsi qu’à un décor suggéré plutôt que préconçu, Émilie Rioux compte rythmer les transitions de ce récit éclaté afin de faciliter la compréhension de l’intrigue et de laisser toute la place aux enjeux humains. Pour elle, c’est la réalité de l’individu qui prime : « Je n’ai pas le goût de faire de la projection, j’ai envie de voir les personnages vivre. »
Et parmi les rôles, celui d’Ève s’affirme tout en force, en nuances et en complexité, nous livrant ses revendications de femme, ses doutes de mère, ses angoisses d’artiste, en plus de toutes les contradictions que font naître ces postures dont elle a la responsabilité. Ève est aussi le porte-voix qui permet à l’auteure de décrier de manière cinglante la vacuité de la culture médiatique, l’élitisme d’une bourgeoisie faussement intellectuelle ainsi que le modèle patriarcal dont elle est issue. « Je ne me considère pas comme étant particulièrement féministe, continue la metteure en scène, mais la pièce véhicule un discours féministe », admet celle qui espère surtout que les représentations sauront « grafigner » le public, c’est-à-dire déranger suffisamment ses préjugés pour susciter réflexions, discussions et débats.
« Ça finit en point d’exclamation », lance enfin Émilie Rioux. Surprise, blague, montée de lait, cri du cœur, appel à l’aide? Tout ce qu’on sait, c’est que la jeune femme n’aurait pas choisi de monter L’Imposture si cette pièce n’avait été que chialage et tournage en rond…!