Alexandre Fecteau, Catherine Dorion, et Vincent Massé-Gagné, Crédit photo : Camirand Sciences po 101, thérapie contre l’impuissance?Marie Tremblay·21 février 2025Agenda culturelArts & cultureCritiquesEn vedetteSortiesThéâtre Soir de première médiatique, mercredi dernier, au Grand Théâtre de Québec pour la pièce de théâtre documentaire Sciences po 101 – Traité d’insoumission à l’usage du vrai monde, écrite par Catherine Dorion et Vincent Massé-Gagné et mis en scène par Alexandre Fecteau. Il s’agit d’un retour aux sources artistiques pour l’ancienne députée de Taschereau, diplômée du Conservatoire d’art dramatique de Québec. Par Marie Tremblay, journaliste multiplateforme Le spectacle commence sur une drôle de note alors que l’intercom incite les gens à éteindre leur téléphone. Quelques minutes plus tard, le public est invité à le ressortir pour voter pour les menaces (guerre mondiale, écroulement du système de santé, etc.) qui les inquiètent le plus en scannant un code QR. Malheureusement de nombreux spectateur.rices dans la salle, moi comprise, n’ont pas été en mesure de le faire: le réseau cellulaire passe très mal à travers les murs de béton du Grand Théâtre. Dans mon cas, cette déception a rapidement été oubliée avec la suite du spectacle. Cependant, les amateur.rices de théâtre ont probablement été déçu.es, car bien qu’immersive, la pièce s’apparentait davantage à un Ted Talk ou une conférence de motivation qu’à une prestation théâtrale. Par ailleurs, l’impression d’un public soigneusement filtré était difficile à ignorer. D’une part, la salle de spectacle Octave-Crémazie se trouve dans la circonscription qui avait élu Catherine Dorion en 2018, créant ainsi un ancrage naturel avec une partie de l’auditoire. D’autre part, l’accès au théâtre demeure restreint par des considérations financières et d’intérêt : tout le monde n’a pas les moyens, ni l’envie, d’acheter un billet, et parmi celleux qui le pourraient, toustes ne choisiraient pas nécessairement d’assister à une pièce de Catherine Dorion. Il est difficile d’oublier l’animosité qu’avaient suscitée ses tenues à l’Assemblée nationale. En somme, le spectacle se déroulait devant un public attentif et réceptif, voire déjà conquis. En soi, la pièce nous fait entrer dans le processus créatif derrière cette production, où Catherine se questionne sur sa capacité à jouer la comédie, elle qui n’est « pu capable » des mises en scène, mais également sa volonté de partager la réalité politique qu’elle a vécue. Dans une ligne du temps alternant entre le présent et une salle de classe universitaire en 2041 dans un Québec dystopique, Catherine Dorion et son ancien attaché de presse, Vincent Massé-Gagné, passent en revue différents concepts clefs du monde politique à l’aide d’exemples et d’idées de penseur.euses comme Anna Arendt, Michel Chartrand et Noam Chomsky. Au menu, répression, liberté d’expression, individualisme, argent, totalitarisme, impuissance, des thèmes qui tombent à brûle-pourpoint avec le climat politique actuel. Chaque sujet était supporté par des illustrations projetées sur un écran à l’aide d’un rétroprojecteur. Des témoignages étaient également intégrés pour donner du poids aux propos. Pour aborder la question de la liberté d’expression, Catherine Dorion a mené des entretiens avec des personnes de divers milieux professionnels pour démontrer que l’opinion politique en milieu de travail n’est pas la bienvenue. Le public est aussi « sondé » pendant la représentation. Il est invité à voter, s’exprimer, parler. Par applaudissement, on comprend – malheureusement – que l’espoir politique est quasi inexistant dans l’auditoire. La pièce met également en lumière l’influence des récits sur le public et leur rôle dans la construction des mythes collectifs. Dans la salle de classe en 2041, les élèves (les spectateur.rices) ont été invité.es à dire à l’unisson le nom des marques de logos affichés sur l’écran. Non seulement la foule a obtenu une note parfaite, mais elle a même chanté en cœur le jingle de la pub de St-Hubert. En revanche, elle a été incapable d’identifier une feuille d’orme. La pièce naviguait entre l’absurdité et l’incohérence de notre monde avec un humour qui a fait éclater la salle de rire à plusieurs reprises. C’est une représentation qui invite le.a spectateur.rice à une profonde réflexion sur les valeurs fondamentales qui guident ses actions et sur la vision qu’iel se fait de l’avenir. La pièce parvient à insuffler un sentiment de solidarité et d’espoir, en mettant en lumière les éléments communs qui unissent le public et l’importance du collectif. C’est le type de spectacle qui suscite des échanges riches et stimulants bien après le baisser de rideau. Si cette production vous intéresse, des supplémentaires ont été ajoutées le 21 et 22 octobre 2025. Auteur / autrice Marie Tremblay Voir toutes les publications