Campement pro-Palestine à l’Université Laval : démantèlement, amendes et arrestations

Ce samedi 1 juin, en après-midi, un groupe d’étudiant.es de l’Université Laval s’est installé sur les terrains de l’Université, coin avenue du Séminaire et chemin Ste-Foy, afin d’ériger un campement en solidarité avec la Palestine. Tout comme les précédentes mobilisations à l’Université McGill et à l’UQAM, notamment, cette action pacifique avait pour but de faire entendre la colère et l’exaspération d’une partie de la communauté étudiante face au manque de transparence de l’Université, à ses liens avec l’État d’Israël ainsi qu’à son inaction quant au génocide actuel du peuple palestinien. Une occupation qui est rapidement devenue la cible des corps policiers et dont les tentatives d’intimidation des étudiant.e sur place ne se sont d’ailleurs pas avérées des plus discrètes (!) …Surprenant ? Non. Dégoûtant et démoralisant ? Assurément. 

Par Frédérik Dompierre-Beaulieu (elle), journaliste multiplateforme et Emmy Lapointe, rédactrice en chef

NDLR : Nous avons contacté les associations étudiantes et posé des questions supplémentaires à l’Université Laval. L’article sera donc mis à jour à mesure que nous recevrons des réponses.

 

Les revendications

Les revendications des étudiant.es de l’Université Laval pour la Palestine sont au nombre de six. Iels exigent une transparence financière totale concernant ses investissements et ses partenariats avec les entités liées à l’État sioniste ainsi que la promesse d’un désengagment complet des placements au sein d’entreprises complices du génocide. De plus, le groupe d’étudiant.es revendique un arrêt immédiat des programmes d’échanges avec l’Université de Tel-Aviv, l’École d’été de Tel Azekah et le programme conjoint de recherche en santé canado-israélien. 

Iels appellent également l’Université à promouvoir et à se positionner fermement en faveur d’un cessez-le-feu, à condamner sans équivoque le génocide perpétré par l’État sioniste envers le peuple palestinien et à protéger toustes les étudiant.es impliqué.es dans la défense des droits humains. Finalement, les étudiant.es demandent le retrait du poste de Jean-Yves Duclos en raison de la violation de la convention collective des professeur.es de l’Université Laval ainsi qu’une désaffiliation claire avec le gouvernement libéral qui se montre ouvertement complice du génocide.

Un premier démantèlement

Deux heures seulement après leur installation sur le campus, les participant.es de cette mobilisation pro-Palestine ont été forcé.es de défaire leur campement, qui comptait six tentes et quelques bannières et drapeaux, après que le SPVQ ait été mis au courant de la situation par une source externe à l’Université. C’est près de quarante policiers qui s’y sont déplacés. Bien qu’il s’agit d’un terrain municipal, les lieux occupés par les manifestant.es et leur campement appartiennent en fait à l’Université Laval, qui aurait pu, si elle l’avait voulu, autoriser leur présence sur le campus, leur évitant ainsi la répression policière dont iels ont été victimes, ce qu’elle n’a pas fait.

« Nous dénonçons fermement le fait que l’Université Laval appelle la police sur ses propres étudiant·e·s alors que celleux-ci manifestaient pacifiquement. Nous dénonçons le fait que notre établissement d’enseignement criminalise aussi rapidement notre mouvement de solidarité avec la situation palestinienne, qui est catastrophique. Le mouvement contre le génocide du peuple palestinien restera toujours vivant, même face à cette répression policière et universitaire.», peut-on lire sur le compte Instagram occupation.ulaval

S’il n’était plus possible de garder les tentes montées, l’arrogance des policiers n’a pas pour autant découragé le groupe d’occuper les lieux, et encore moins d’exprimer les raisons qui les motivaient à ne pas baisser les bras, invitant d’autres étudiant.es sur les réseaux sociaux à se joindre à eux en solidarité avec la Palestine puisqu’iels comptaient bien y rester jusqu’à 23h.

Un deuxième démantèlement 

À notre arrivée sur les lieux vers 22h15, plusieurs étudiant.es s’entretenaient avec les forces policières, dont le nombre avait diminué depuis les confrontations plus tôt, en après-midi. L’état des choses était cependant le même que quelques heures auparavant : ériger les tentes demeurait interdit et le groupe devait quitter pour 23h sinon quoi il s’exposait à des arrestations. 

Après avoir discuté des différents scénarios entre elleux, vers 22h30, les étudiant.es ont décidé de monter une première tente. Les policiers (tous hommes, tous blancs) se sont rapidement approchés du groupe pour, selon leurs termes, « faire arrêter l’infraction ». Les étudiant.es sont demeuré.es calmes et ont continué la tâche entreprise quelques instants plus tôt. Les policiers ont alors sélectionné deux étudiants racisés et silencieux dans le lot, et ce, même si des étudiants blancs se sont interposés et se sont montrés particulièrement vocaux, voire arrogants. 

Les deux étudiants ont été amenés dans les voitures. Le motif : désobéissance. Quelques minutes plus tard, l’un d’entre-eux a été relâché, repartant avec une amende de 260$, alors que le second a été amené au poste. Des ami.es inquiet.es ont demandé à quel endroit il avait été amené, mais on leur a refusé une réponse. 

La quinzaine d’étudiant.es restant.es a plié calmement bagage, et certain.es d’entre elleux sont resté.es pour marcher pacifiquement sur le trottoir près de ce qui aura été un campement éphémère. Iels ont été rejoint.es par des membres de syndicalistes4Palestineqc qui étaient aussi présents en après-midi. Deux autres voitures de police sont venues en « renfort » pour contenir ce qui n’était plus qu’une marche d’à peine dix personnes. Un des membres qui filmait un live pour la page Instagram et qui répétait aux forces de l’ordre qui marchaient de plus en plus près de lui qu’elles ne pouvaient pas le toucher, parce qu’il ne faisait que filmer, a été très brusquement arrêté par 4 policiers. Le jeune homme (racisé une fois de plus), qui avait été embarqué, a été relâché quelques minutes plus tard, lui aussi avec un amende. 

Pour la suite des choses

Comme nous l’avons précédemment expliqué, l’Université Laval aurait pu permettre la tenue de la mobilisation en ses lieux. Cela dit, selon des informations obtenues de la part de l’Université, si les étudiant.es souhaitent tenir un campement, iels doivent en faire la demande officielle, au même titre que tous les autres types d’activités. L’Université mentionne que « Toutes les demandes effectuées par nos étudiants ont été autorisées jusqu’à maintenant. » et que ces « ces activités se sont toutes bien déroulées ». L’administration souhaite « continuer à dialoguer et à collaborer avec [les] étudiants pour permettre la tenue d’activités dans [le] cadre universitaire ».

L’un des leaders du groupe nous a confié qu’il fallait plus de mobilisation, que pour résister, il fallait la force du nombre, mais qu’on pouvait s’attendre à d’autres actions dans les prochains jours. De fait, une manifestation pro-Palestine est organisée à Québec aujourd’hui, dès 14h devant l’Assemblée nationale : 

« À l’heure où l’armée d’occupation israélienne est scrutée par la cour internationale de justice pour ses multiples crimes contre l’humanité à Gaza, l’occupation sionniste commet un massacre d’une cruauté sans nom à Rafah. Le bilan du bombardement intense des tentes de déplacés s’annonce extrêmement sévère. Joignez-vous à nous ce dimanche 2 JUIN, alors que nous descendons dans la rue pour montrer au gouvernement provincial et canadien que nous ne nous arrêterons pas tant que nos demandes n’auront pas été entendues ! Mobilisons nous, dans la rue, dans nos universités, dans les entreprises, manifs, blockages, multiplions les actions pour clairement signifier à nos gouvernements que leurs complicité avec ce projet colonial génocidaire est inacceptable. LONGUE VIE GAZA, LONGUE VIE PALESTINE » (palestinequebec)

Consulter le magazine