Hommage lavallois aux 43 disparus d’Ayotzinapa

Un reportage de Vice News a été projeté vendredi soir dernier au Fou Aeliés afin de souligner le premier anniversaire de la disparition de 43 étudiants à Ayotzinapa, le 26 septembre 2014.

Aux alentours de 20 h, Joé Habel, l’un des principaux organisateurs de l’événement, s’affaire à préparer le local du Fou Aéliés pour la projection du documentaire. Des bannières, un projecteur et des photos sont peu à peu mis en évidence. Un décor sobre qui cadre bien avec le double objectif de sensibilisation et de commémoration des événements tragiques qui se sont déroulés il y a maintenant un an, à Ayotzinapa, une municipalité de l’État du Guerrero dans le nord du Mexique. Une vingtaine de personnes s’est déplacée pour l’occasion.

Pour Joé, l’organisation de cette soirée revêt le caractère d’un engagement personnel. C’est qu’il revient d’un voyage de deux mois au Mexique durant lequel il a pu constater le caractère grandissant de l’enjeu. En effet, 11 mois de manifestation se sont tenus jusqu’aujourd’hui afin d’entretenir le souvenir des disparus et de soutenir les familles dans le combat pour lever le voile sur la disparition de leurs proches.

De retour au Québec, cette initiative est pour lui l’occasion de rejoindre une frange de la communauté étudiante peu ou mal informée sur les circonstances réelles qui sont à l’origine de ces disparitions. « Le massacre de Tlatelolco, les cartels de drogues ou encore le traité de libre-échange avec le Mexique sont autant de facteurs qui endiguent les espoirs de stabilité au niveau politique et social », raconte-t-il.

Bévues gouvernementales

À ses côtés se tient Nicólas Villamarín. Ce dernier représente le Comité de solidarité québécoise avec Ayotzinapa et promeut l’événement. Comme Joé, Nicólas est lui aussi touché par les événements du 26 septembre 2014.

Selon lui, l’enquête entamée par le gouvernement mexicain sur la disparition des 43 étudiants demeure « boiteuse » et « partielle ». Il mentionne quelques-unes des causes derrière le manque de confiance de la société civile mexicaine envers les institutions étatiques : infiltration des narcotrafiquants dans la sphère politique, financement des campagnes électorales de certains politiciens par des dirigeants de cartels, souvenirs douloureux du massacre de Tlatelolco…

Nicólas souligne au passage que les modifications à l’aide internationale canadienne dans les dernières années ont modifié les rapports entre les deux pays. Désormais, les liens unissant le Canada et le Mexique sont essentiellement économiques. Ces transformations, soutient-il, contribuent à renforcer la transgression des droits de la personne et l’impunité qui en découle au Mexique.

De l’importance de sensibiliser

Comment renverser cette tendance ? En mettant de la pression sur le gouvernement mexicain afin que ce dernier mène une enquête juste et transparente sur les événements d’Ayotzinapa, pense Nicólas. Pour ce faire, le gouvernement canadien, entre autres, devra adopter une position ferme sur la question. Et le public devra être davantage sensibilisé aux enjeux sous-jacents.

La projection de vendredi soir s’inscrit dans une lignée d’initiatives, telle la caravane d’Ayotzinapa et les comités de solidarité au travers du Canada, allant en ce sens.


Chronologie des événements

26 septembre 2014 – 43 étudiants de l’école normale rurale Raúl Isidro Burgos d’Ayotzinapa disparaissent à Iguala, dans l’État de Guerrero.

27 septembre 2014 – Les étudiants, tous des hommes, sont déclarés disparus par leurs camarades de classe et leurs parents.

4 octobre 2014 – Un charnier de 28 corps est découvert.

8 octobre 2014 – Des milliers de personnes défilent à Mexico pour que les étudiants soient retrouvés.

14 octobre 2014 – Le gouvernement fédéral annonce que les 28 corps découverts plus tôt ne sont pas ceux des étudiants. Dans les semaines à venir, de nombreux autres charniers seront découverts.

17 octobre 2014 – Arrestation du chef présumé du gang de narco-trafiquants des Guerreros Unidos, en relation avec la disparition des étudiants.

23 octobre 2014 – Le gouverneur de l’État de Guerrero démissionne.

4 novembre 2014 – Le maire d’Iguala est arrêté.

6 décembre 2014 – C’est confirmé : un fragment osseux trouvé dans un charnier appartient à un des étudiants disparus.

Janvier à septembre 2014 – Malgré les rebondissements, l’enquête suit son cours.


 

Photo : Archives Impact Campus - Alice Chiche
Photo : Archives Impact Campus – Alice Chiche

La caravane d’Ayotzinapa, composée de Hilda Legideño Vargas, mère des étudiants Jorge Antonio Tizapa Legideño et Jorge Luis Clemente Balbuena, ont sillonné le Canada afin de demander au gouvernement de reconnaître la situation mexicaine actuelle et de témoigner de l’entrave aux droits humains dans leur pays. À Québec, le député de Québec Solidaire, Amir Khadir, a reçu la caravane à l’Assemblée Nationale.

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