Paris – En Europe, 375 millions d’électeurs seront appelés aux urnes entre le 4 et le 7 juin prochain. Ils éliront les 736 députés qui composeront le Parlement européen. En l’absence de procédure électorale officielle uniforme, chacun des 27 États membres décidera lui-même du déroulement du vote à l’intérieur de ses frontières.
Le Parlement se compose actuellement de sept différents partis politiques, tous minoritaires; il doit donc composer avec de larges coalitions pour mener à bien les activités parlementaires. Aux dernières élections, en 2004, le Parti populaire européen a décroché 268 sièges et le Parti socialiste européen, 200, suivi des autres formations. Le taux de participation était de 45,5 % au niveau global et de 42 % en France. Ces chiffres ne font que dégonfler depuis les premières élections en 1979.
L’opinion publique française a atteint un pic de mécontentement de 50 % envers l’Union européenne (UE), qui s’est matérialisé par l’échec des idées pro-européennes lors du référendum de 2005 sur la constitution. Surfant sur la vague d’insatisfaction, des groupes politiques très divers accusent le «monstre institutionnel» qu’est l’UE d’un manque de transparence et d’un déficit démocratique, tout en portant le message d’une «autre Europe». Pierre Moscovici, député européen d’allégeance socialiste, estime qu’«au sein du triangle institutionnel communautaire [Commission européenne, Conseil de l’UE et Parlement], seuls les parlementaires sont élus populairement, ce qui a pour effet de rendre quelque peu ésotérique le fonctionnement de l’UE aux yeux de la population et encourage un populisme anti-UE qui mise sur le manque de compréhension et l’éloignement entre la classe politique et les citoyens».
Ce phénomène est amplifié par le fait que la presse européenne ne relaie que très rarement les questions qui s’y rapportent, ramenant souvent les problématiques sur le plan national.
Une instance décisive
Pourtant, les enjeux sont grands et le mandat de l’Union européenne est aujourd’hui beaucoup plus que d’assurer la paix entre les pays. L’institution doit élaborer de nombreuses politiques transnationales et élaborer impérativement un plan de relance face à la crise financière.
Privée d’un leadership fort, elle envoie aujourd’hui l’image d’être incapable de s’accorder sur un moyen de relever les défis du difficile contexte actuel. Sylvain Kahn, auteur d’ouvrages sur l’UE et professeur universitaire, explique que «la relation du couple franco-allemand, traditionnel moteur de l’Union, est actuellement difficile. La France, ayant longtemps assuré un certain monopole de la légitimité du poids diplomatique de l’UE, accepte mal sa baisse d’influence au sein de l’Union au profit de l’Allemagne et des nouveaux pays membres».
L’hétérogénéité donne du fil à retordre
Avec l’arrivée massive de nouveaux États membres au sein de l’UE, il n’est plus possible de diriger par la voie collégiale et par celle du consensus, désormais pratiquement impossible à atteindre. Une ligne de fracture apparaît nettement parmi les pays entre deux visions contradictoires de l’Europe. Alors que certains souhaitent voir émerger une Europe puissante et fédéraliste, d’autres tiennent d’abord et avant tout à leur souveraineté politique. Bref, difficile de s’entendre dans cette «nouvelle» Europe très hétérogène… aux 375 millions d’électeurs.