C’est dans une atmosphère « en effervescence » que le référendum soudanais a mobilisé l’attention des médias internationaux. La situation politique et économique du plus grand pays d’Afrique et sixième plus important exportateur de pétrole du continent a été critiquée depuis longtemps par toutes les organisations non gouvernementales. Par contre, ces informations n’ont atteint le grand public que récemment grâce, entre autres, à la tournée médiatique de l’acteur américain George Clooney.
Bien que les résultats ne soient attendus qu’au courant de la semaine, les pronostics des analystes et des médias vont tous dans le même sens : le Sud-Soudan devrait devenir indépendant. Ce qui apparaît comme l’occasion d’un nouveau départ pour les habitants du sud est pour le moment bien accueilli de la part du gouvernement de Karthoum, au nord. Il reste, en effet, la crainte d’un retour au conflit armé après le référendum. Cette sécession pourrait priver le nord des principaux revenus pétroliers, qui représentent présentement plus de 50% des revenus du pays. Alors que le CPA de 2005 redistribuait ces richesses, le référendum imposerait une séparation et retirerait l’accès de ces revenus à Karthoum.
Le vote s’est déroulé sous haute surveillance, tant par la présence de l’armée dans les principales agglomérations urbaines que celle d’importantes personnalités politiques. C’est aussi le jeu politique qui est mis de l’avant alors que l’ancien président américain Jimmy Carter et l’ancien Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan font partie des observateurs internationaux invités dans le pays. Leur présence lors de ce scrutin détonne en effet de l’expulsion des organismes d’aide humanitaire par Karthoum en 2005. Ce changement de ton du régime pourrait être symptomatique de son isolement prochain alors que l’argument économique lui échappera en cas de séparation des provinces du sud. La question surgit donc : Omar el-Béchir, président en fonction du Soudan sous mandat d’arrêt international par la Cour pénale internationale pour crime de guerre et crime contre l’humanité, essaierait-il d’amadouer la communauté internationale alors que la situation économique et humanitaire de son pays risque fort de se détériorer?
La situation deviendra donc précaire durant la période post-référendaire: possibilité de contestation des résultats dans les trois jours suivant leur annonce, flots massifs de réfugiés du nord au sud et réciproquement ainsi que présence de groupes rebelles pouvant être instrumentalisés tant au nord qu’au Sud-Soudan. En d’autres mots, bien que cette étape soit primordiale pour guérir les plaies, la situation est en voie de devenir de plus en plus complexe dans deux États fragilisés par leur nouvelle identité.