Photo: Alice Beaubien

Les renégociations de l’ALENA se poursuivent toujours

Depuis l’entrée en poste du président américain Donald Trump, ce dernier ne se gêne pas critiquer plusieurs accords de libre-échange et traités internationaux desquels les États-Unis sont membres. Le Canada, les États-Unis et le Mexique ont été entrainés par le président américain dans des négociations qui s’étirent depuis plusieurs mois afin d’en arriver à un nouvel Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).  

Pour Donald Trump, il est clair que les États-Unis sont perdants dans tous les accords desquels ils font partie depuis de nombreuses années. Et malheureusement pour le Canada, nous nous retrouvons au cœur d’un accord tripartite depuis 1994, ce qui nous oblige à renégocier l’ALENA.

Cela place-t-il le Canada dans une position vulnérable? « Ce serait une position fâcheuse si on croyait que le Mexique et les États-Unis étaient capables de conclure leurs négociations à eux seuls, ce qui donnerait une victoire à Trump », analyse Louis Bélanger, professeur titulaire au département de science politique à l’Université Laval et directeur de l’Institut québécois des hautes études internationales (HEI).

L’homme d’affaires devenu président de nos voisins du Sud affirme qu’il est possible qu’un accord bilatéral soit signé, mais M. Bélanger n’est pas du tout convaincu : « Il y a énormément de résistance aux É-U et au Congrès si on devait avoir un accord bilatéral donc cela nous donne encore du pouvoir de négociation », explique-t-il.

De plus, comme les élections de mi-mandat auront lieu en novembre prochain, l’administration américaine a réellement besoin d’une victoire dans le cadre des renégociations de l’ALENA si elle souhaite conserver la majorité républicaine à la chambre des représentants. « L’administration actuelle est plutôt pressée d’en arriver à un accord pour profiter de la majorité », illustre le professeur titulaire de science politique.

Deux aspects à régler

Pour qu’un accord final soit signé entre les trois pays membres de l’Accord de libre-échange nord-américain, il faudra tout d’abord que la question du chapitre 19 soit réglée. Ce chapitre prévoit un mécanisme externe de règlement des différends sur une question bien précise à l’égard de l’utilisation des droits compensateurs. « Le chapitre 19 a toujours été majeur pour le Canada. C’était le gros morceau de la toute première négociation […] en 1987. Ça a été un point rediscuté lors de l’intégration du Mexique dans l’accord en 1994 et c’est encore un point d’achoppement cette fois-ci », explique Louis Bélanger, directeur de l’Institut québécois des hautes études internationales. Il ajoute également qu’il faudra voir dans quelle mesure les Américains sont « sérieux et intransigeants à cet égard ».

Un second point qui reste à régler est celui de la gestion de l’offre. Le président Trump veut absolument une ouverture des parts du marché canadien en ce qui concerne le lait et le fromage. « On l’a fait dans l’accord avec les Européens et l’accord de partenariat transpacifique. On peut s’attendre à une concession du Canada qui prendra la même forme, soit ouvrir les quotas », illustre Louis Bélanger.

Les négociations laisseront-elles des traces?

Depuis le début des négociations, M. Trump y va d’insultes virulentes à l’endroit du Canada au moyen de sa plateforme favorite, Twitter. Il est donc possible que cet épisode laisse des traces, et ce, peu importe l’issue, de ce conflit. « L’expérience actuelle comme Canadien, de voir l’administration américaine, dans le cadre d’une zone de libre-échange, qui n’hésite pas à utiliser des mécanismes de représailles et de chantage en levant des tarifs inexplicables simplement pour créer un pouvoir de négociations favorable, ça fait réaliser la fragilité de nos engagements envers les Américains », conclut Louis Bélanger.

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