La propriété intellectuelle se fait allègrement léser et la recherche universitaire se prend pour la péripatéticienne du secteur privé. Les stagiaires postdoctoraux se font vider les poches par le gouvernement en même temps que le premier ministre canadien adapte la mission du CRSH à sa courte vue. Pendant ce temps, que fait l’association qui représente plus de 9000 étudiants de 2e et 3e cycles de l’Université Laval? L’AELIES fait de la gestion quotidienne.
Depuis septembre dernier, elle a gratifié ses membres d’un nouveau site Internet, d’un jardin de repos près de la maison Marie-Sirois et d’une croisière de réseautage sur le St-Laurent. Outre assurer le fonctionnement de la Chaire et du Lab-oratoire publics et participer aux instances de rubber stamping universitaires, qu’a fait l’AELIES cette année? Quelle vision l’a guidée? Quelles ont été ses priorités?
Le premier axe de son plan d’action 2008-2009 affichait la gargantuesque volonté de «mettre en place les assises d’un nouveau mode de financement du système d’éducation public québécois». Rien de moins. Peut-on être mis au parfum de cette idée géniale? Les médias ne l’ont pas recensée, l’AELIES ayant été citée, cette année, seulement sept fois dans les médias québécois, selon les chiffres fournis par la base de données Eurêka.
«En ce moment, il n’y a pas de mouvement étudiant au Québec; il s’est assis et fait de la photocopie. Depuis le début de la société post-industrielle, on est orienté vers la production du savoir. Les universités sont de plus en plus des gérants. Ils ont intégré le système, les associations étudiantes aussi», a déclaré le professeur de sociologie André C. Drainville dans les pages d’Impact Campus, il y a quelques mois. L’AELIES n’a-t-elle donc pas envie de lui donner tort?
L’exécutif aura beau arguer qu’il travaille «de l’intérieur», auprès de l’administration lavalloise, personne ne sera convaincu de son efficacité si les succès (supposant qu’il y en ait) restent secrets et les défaites, incontestées. Est-ce normal qu’au moment où les conservateurs injectent des fonds dans des bourses exclusivement liées au domaine des affaires, l’AELIES se contente de mettre un lien, sur son site Internet, vers une pétition initiée par le parti néo-démocrate? Quand les politiciens s’inquiètent plus du sort des étudiants qu’eux-mêmes ne le font, quelque chose cloche au royaume du Danemark.
Les étudiants aux cycles supérieurs sont généralement moins impliqués que les plus jeunes dans la défense de leurs droits. Ils étudient moins sur le campus, sont plus près des milieux professionnels et 25% ont une famille dont ils doivent s’occuper. Il est désolant que leurs représentants, au lieu de jouer le rôle de leader entraînant, n’en soient que le triste reflet. Il est possible de lancer des projets d’envergure tout en étudiant aux cycles supérieurs, comme le montre l’homologue de l’AELIES à l’Université de Sherbrooke, le REMDUS, qui s’affaire à élaborer une Table de concertation des associations étudiantes indépendantes.
Après une hausse des frais institutionnels obligatoires (FIO) de 50$ en mai 2008, de 10% des frais de scolarité des étudiants étrangers en décembre, voilà que l’Université souhaite encore augmenter les FIO de 25$. La position de l’AELIES? «Nous savons que la hausse est inévitable. Mais nous considérons que 25$, c’est beaucoup trop élevé», a confié son président au quotidien Le Soleil la semaine dernière.
Laissons-lui d’ailleurs les derniers mots, des propos qu’il a tenus dans nos pages au mois de décembre : «Si chaque année, il y a des augmentations et nous ne faisons rien, je ne vois plus notre utilité.»