Une course à la chefferie pour les gens qui aiment la science politique, c’est comme les séries pour les fans de hockey. Même quand ce n’est pas ton équipe joue, il reste une certaine excitation.
Dans le cas du Parti libéral du Québec (PLQ), cela est d’autant plus vrai. La dernière course à la chefferie du PLQ date de 1983, l’équivalent d’une génération. Le lock-out de la Ligue nationale peut aller se rhabiller!
L’un des principaux thèmes du débat de dimanche organisé entre les candidats était le fédéralisme canadien.
Politique 101 pour les non-initiés, être fédéraliste ne se limite pas à aimer le Canada. La définition à laquelle se lie historiquement le Parti libéral fait certes mention d’un attachement au Canada. Mais elle réfère aussi au développement d’une autonomie plus grande pour le Québec dans la Fédération et à une reconnaissance dans la constitution du pays du caractère distinct de notre province.
Malheureusement, lors du débat, au moins deux des trois candidats semblaient avoir oublié ce que représentait ce concept.
La tactique Bachand
Il y a d’abord eu la tactique de champion de Raymond Bachand: répéter sans cesse sa fierté d’être dans le «seul parti fédéraliste du Québec», mais essayer de ne pas parler de fédéralisme aux questions qui en traitait. Il a plutôt dévié sur l’économie, la création d’emplois (ça devient maladif), la rénovation du port de Québec et a fini par dire qu’il n’avait pas « d’énergie » à mettre pour le sujet initial de la question.
L’incohérence Moreau
Vient ensuite Pierre Moreau. Je dois dire que j’avais un préjugé défavorable à son endroit. Celui-ci m’avait vraiment laissé l’impression qu’il ne comprenait pas du tout ce qu’était le fédéralisme lorsque sa fonction de ministre l’amenait il y a quelques années à être responsable des relations entre le fédéral et le Québec.
Il était incapable de répondre à Bernard Drainville lorsqu’il le traitait de fédéraliste radical. Il aurait dû lui expliquer que, théoriquement, plus un fédéraliste est radical, plus il devrait revendiquer l’aspect distinct du Québec et son autonomie (donc le contraire de ce que Bernard Drainville essayait de lui reprocher).
Deux ans plus tard, je ne suis toujours pas certaine qu’il ait réellement compris le concept d’être un fédéraliste québécois. Parfois, M. Moreau avait un certain début de réponse acceptable où il parlait de garder un horizon dans l’avenir pour faire reconnaître la différence québécoise par le Canada mais celui-ci venait ensuite tout gâcher en disant qu’après tout, «il n’y a aucune conséquence» à ce que le Québec ne soit pas officiellement reconnu dans la Constitution canadienne.
Couillard plus solide
Il ne restait donc qu’un espoir en la personne de Philippe Couillard. Lors de ce débat, il y avait certainement une volonté pour lui d’en faire enjeu, ce qui est en soit beaucoup mieux que ses adversaires.
Seul bémol, son discours sonnait parfois faux quand il accusait le PQ de vouloir créer de la chicane à Ottawa. Après tout, soyons réalistes, il y a plus de chances que le reste du Canada accepte les demandes du PQ sur la culture ou l’assurance-emploi qu’un éventuel projet du Parti libéral visant à faire reconnaitre la différence québécoise.
Enfin, quelque part entre 2003 et 2013, les ténors du PLQ se sont éloignés de certains sujets qui leur tenaient à cœur, dont celui du fédéralisme canadien. Au débat, on donnait l’occasion aux candidats à la chefferie de faire un effort pour tenter de revenir à cette racine. Si ce devait être un véritable test, deux des trois candidats auraient obtenu de très mauvaises notes.
Rosalie Readman