Il y a quelques jours, j’avais une conversation avec un ami sur le timing. En fait, cet ami avait décidé de m’entretenir sur un sujet qui, en temps normal, aurait donné lieu à un simple échange. Or les temps n’étaient pas normaux, et ses propos, qui à d’autres moments me seraient parus anodins, m’ont semblé obscènes.
Il s’agissait bien sûr d’une erreur commise par inadvertance ; les montres de nos sensibilités respectives n’affichaient pas la même heure. Heureusement, les gens qui gagnent leur vie en ménageant les humeurs publiques ne commettent pas de telles bévues. Lorsqu’on dépend du suffrage pour vivre, alors on sait le ménager et si on ne peut lui éviter quelques désagréments alors on choisit bien son moment pour ce faire.
Ainsi un gouvernement, même majoritaire, ne votera pas de loi spéciale qui risque de lui aliéner une grande partie de la population un 2 décembre. Comme les votes des assemblées générales le montrent, il est bien aisé de trouver des épris de justice sociale à pareille date. C’est une tout autre paire de manches que de mobiliser ces mêmes personnes un 24 décembre, et ça, le gouvernement le sait. Si loi spéciale il faut, alors elle sera votée en session spéciale juste avant une période bien spéciale : le congé des Fêtes. Personne n’aurait l’idée de manifester à Noël ou au Jour de l’An, c’est vraiment ce qu’on appelle choisir le bon moment.
Le timing n’est pas qu’une question de cynisme ou de stratégie. Il peut parfois s’agir aussi de concilier le travail et la famille ou tout simplement l’utile et l’agréable. Pensons à la COP 21 qui se tient à Paris, c’est un peu tout cela. Certes, on s’y réunit pour discuter d’une question primordiale et écouter de longues conférences sur le climat et l’écologie alors que la plupart des dirigeants présents n’ont que de vagues connaissances en ce domaine. On peut imaginer l’ennui auquel ils seront confrontés pendant ces moments.
Heureusement, ils pourront se réjouir en passant la première moitié de décembre dans une des plus grandes capitales de la mode universellement reconnues. Ils auront donc le loisir de faire leurs emplettes de Noël pour gâter leurs proches à leur retour. De plus, en tant que membres de délégations diplomatiques, ils n’auront même pas à payer les taxes sur leurs achats.
On comprend que Philippe Couillard ne voulait pour rien au monde manquer cela.