Un texte de Viktoria Miojevic
Nous voilà rassurés, le FMI a trouvé le 16 septembre dernier la solution aux changements climatiques : sauver les baleines. C’est donc une semaine avant Sommet Action Climat, débuté le 23 septembre à New York, que le FMI
publie cet article son magazine web Finance and Development. Néanmoins une question persiste, le FMI ne devrait-il pas se préoccuper d’avantage des 5300 milliards de ‘subventions’ par an attribués à l’industrie pétrolière; au lieu de reverdir son image médiatique en plein agenda politique sur le climat.
Que valent les baleines pour le FMI ?
La stratégie d’argumentation est simple, les baleines emprisonnent plus de Co2 que des milliers d’arbres tout au long de leur vie. Elles ont donc une action « earth-tech » contre les changements climatiques. Afin de protéger les
baleines, que celles-ci reviennent à leur nombre initial de 4 à 5 millions (contre 1.3 millions aujourd’hui) ; il faut estimer leur valeur monétaire.
Les baleines vaudraient 1000 milliards de dollars. Ce chiffre prend en compte les variables suivantes : la valeur de la quantité moyenne séquestrée de Co2 par les baleines durant leur vie, le prix du marché du dioxyde de carbone, la technique financière de l’actualisation. A ces variables ils faut ajouter d’autres contributions économiques des baleines tout au long de leur vie à savoir le développement de la pêche et l’écotourisme. On arrive donc au chiffre de 2 millions de dollars par baleine et donc selon le FMI : 1000 milliards de dollars pour le stock actuel.
Les baleines seraient un bien public international
Si ce chiffre est important c’est qu’il devrait inciter, par des subventions du FMI, l’ONU et la Banque Mondiale, les entreprises et pays à réduire leur impact sur le monde marin au vu de la valeur actuelle et potentielle des baleines. Les protéger serait plus bénéfique économiquement que de voir la population décroître. En effet, sa population est en chute libre selon le FMI à cause de « la pêche à la baleine, les collisions avec les navires, l’enchevêtrement dans les filets de pêche, les déchets de plastique en suspension dans l’eau et la pollution sonore».
La stratégie est donc pour le FMI « d’aider les gouvernements à intégrer les avantages macroéconomiques car les baleines contribuent à atténuer les effets du changement climatique, ainsi que le coût des mesures de protection des baleines, dans leurs cadres macro- budgétaire ». La Banque Mondiale devrait donc utiliser son expertise pour créer une compensation pour le secteur privé et ainsi faire appliquer le programme, là où l’ONU et d’autres organisations actualiserait les données. En leur valeur de bien public international qui bénéficie à tous en traversent les eaux internationales mais dont personne ne veut s’occuper pour la même raison, il serait du rôle
du FMI de coordonner les actions.
Une alternative « earth-tech » à la géo- ingénierie : un bon coup de communication
Dans cet article, on nous fait comprendre qu’il faudrait trente ans pour restituer le stock de baleine à sa quantité initiale. Trente ans c’est aussi le chiffre qui nous fait arriver en 2050, soit la date limite pour atteindre les objectifs dessinés par l’Accord de Paris. Sachant que la baleine est la patate chaude des environnementalistes depuis les années 1970 et donc un outil de communication qui touche le grand public ; on peut légitimement
s’interroger sur l’intérêt du FMI à publier cet article une semaine avant le Sommet Action Climat. Par la suite une ribambelle d’articles a ainsi été publiée dans GEO, Science Post, National Geographic, Oceanographic Magazine,
EuroNews mais rien ou presque dans les médias comme le Financial Times, les Echos ou The Economist.
Les baleines peuvent ainsi être vues comme une belle occasion de faire du pied à l’ONU et la Banque Mondiale pour redorer l’image en vert de ces organisations internationales. Aucune stratégie n’est clairement avancée pour
contrer à leur source les facteurs à l’origine du déclin des baleines que sont les plastiques en mer, la pollution sonore ou la présence des filets de pêche par exemple. Ces éléments dont les causes sont multifactorielles, avec à la source le commerce international et l’industrie pétrolière, ne sont en aucun cas remis en question et de nouvelles subventions pourrait leur être attribués.
Avec l’exemple de la construction du nouveau pipeline en Colombie Britannique et ses dangers sur l’écosystème marin, ainsi que son impact sur le bilan carbone mondial ; on peut se demander si les baleines déjà en danger
pourront à elles seules contrebalancer l’augmentation des émissions carbones. La solution n’est donc pas dans la nature si le problème découle des activités économiques humaines. On peut finalement ironiquement se demander si le FMI avait annoncé cette solution plus tôt si Greta Thunberg n’aurait pas eu à traverser
l’Atlantique en monocoque pour fustiger Donald Trump à coup de « how dare you » au Sommet Action Climat de New York…