Question pour un pharmacien : un remède à la désinformation

De plus en plus de Québécois utilisent Internet pour comprendre leurs ennuis de santé. Afin de les aider et d’éviter un mauvais diagnostic, qui pourrait entraîner des conséquences fâcheuses, un diplômé de la Faculté de pharmacie en 2013, Alexandre Chagnon, a mis sur pied un site Web, où près de 125 pharmaciens répondent gratuitement aux questions des patients.

C’est une triste histoire qui est à l’origine de la création du site Web Question pour un pharmacien. Lors du stage d’Alexandre en pharmacie, une jeune dame s’est présentée en pharmacie, puisqu’elle n’était plus capable d’allaiter. Cette dernière avait consulté de fausses informations sur un forum de discussion, à savoir qu’il pouvait être dangereux de faire boire son bébé dans les trois jours qui suivent la consommation d’alcool. Une information complètement erronée, qui a poussé la jeune femme à arrêter d’allaiter, malgré son désir profond de continuer.

« J’ai trouvé cela très triste, mais surtout très frustrant, parce que ça faisait déjà quatre ans que j’étais assis sur les bancs d’école nuit, jour, soir et fin de semaine, et je sentais que j’avais beau être le meilleur pharmacien possible, faire de la formation continue, être disponible de 8 h le matin à 10h le soir, mais les patients vont quand même aller voir sur Internet », soutient-il.

Devant cette situation, Alexandre Chagnon a senti le besoin de mettre à la disposition des patients une nouvelle ressource. De là est né Question pour un pharmacien.

Au départ, il était seul à répondre aux questions du public, qui lui transmettait ses questions via une page Facebook. Très vite, victime de son succès, le pharmacien de Granby a fait appel à des développeurs afin de mettre sur pied un site Web, qui assurerait la confidentialité des patients.

Cela fait maintenant près d’un an et demi que le site est en marche et voilà qu’il peut compter sur une équipe de près de 125 pharmaciens bénévoles. Le succès, il était loin de s’en douter. « Quand j’étais seul, chez moi, à répondre aux questions au petit matin ou le weekend, je le faisais vraiment parce que j’y croyais. On ne pense jamais que ça devient rapidement si populaire. »

Combattre la désinformation

La montée du numérique a un impact notable sur les habitudes de consommation de l’information du public. En effet, un sondage du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) révélait en mars 2016 que neuf Canadiens sur 10 consultent Internet pour se renseigner sur leur santé. Un bond considérable par rapport à 2010, où la proportion n’était que de 64 %.

« Le mobile a pris une ampleur considérable. L’information est littéralement à porter de mains », note Alexandre Chagnon.

Le problème, selon lui, c’est que, sur Internet, on retrouve de bonnes et de moins bonnes informations et que la différence peut être difficile à faire pour un patient. Et lorsque l’information est bonne et à jour, c’est l’applicabilité du conseil au patient qui est remis en cause.

« Ce n’est pas une information qui est personnalisée pour cette personne-là. Ça ne veut pas dire que parce que c’est bon, ça s’applique à son cas », explique-t-il.

Partager son savoir

La deuxième visée du site Web créé par le diplômé de l’Université Laval, c’est tout simplement de valoriser le métier de pharmacien et de mettre de l’avant leurs connaissances.

« On ne sait pas trop ce que ça fait un pharmacien. On pense que ça compte des pilules, mais en fait c’est une encyclopédie sur deux pattes », lance Alexandre.

Et ce savoir, il veut profiter de l’accessibilité d’Internet pour le partager. Les questions sont donc publiées sur le site Web, accompagnées de la réponse d’un pharmacien, sauf si elles sont trop spécifiques ou que des éléments permettent d’identifier le patient. À ce jour, près de 275 questions ont été rendues publiques.

« Dans 80 à 85 % des cas, la question est donc publiée. Le conseil, qui est normalement donné à une seule personne, devient bénéfique pour un très très grand nombre de patients », explique-t-il. En moyenne, chaque réponse est consultée 1000 fois.

Internet : l’avenir du métier?

Pour Alexandre Chagnon, il est clair que les professionnels de la santé doivent s’adapter au patient d’aujourd’hui, c’est-à-dire à celui qui se tourne vers Internet pour s’informer sur leur santé. « En tant que professionnels, nous devons laisser tomber le discours paternaliste et devenir plutôt un conseiller pour les patients. Il nous faut également devenir à l’aise avec les outils dont se servent nos patients. Il en va de leur santé », témoigne-t-il.

Son souhait pour l’année à venir? « Qu’on soit bilingue, qu’on offre le service à toute la population québécoise et qu’on aille commencer à offrir le service aux pharmaciens et aux patients ailleurs au Canada », conclut-il.

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