Le Clap a créé un pont entre la France et le Québec ce vendredi 2 février en diffusant le documentaire Ouvrir La Voix réalisé par Amandine Gay auquel de nombreux étudiants de l’Université Laval ont assisté sous l’invitation des Féministes en mouvement de l’Université Laval (FEMUL).
Projeté dans le cadre du Mois de l’histoire des Noir(e)s, le documentaire Ouvrir La Voix recueille une vaste palette de témoignages de femmes afro-descendantes françaises et belges. Ces 25 femmes ont été sélectionnées par la réalisatrice, à la fois dans son cercle de connaissances et à la suite de sollicitations sur les réseaux sociaux.
Ce sont des femmes de tout âge, certaines immigrées, d’autres nées dans différents quartiers parisiens ou belges. Elles exercent toutes des carrières différentes et militent à leur façon en manifestant et en s’impliquant au sein de diverses associations ou encore en tant qu’artistes. Ces femmes sont d’origine africaine ou antillaise, mais elles font toutes face aux mêmes discriminations.
Avec Ouvrir la Voix, Amandine Gay prend la responsabilité de montrer la réalité brute à laquelle font face les Afro-descendantes au quotidien en abordant les facteurs qui construisent l’identité d’un être humain : l’enfance, l’école, l’adolescence, la vie amoureuse, les rapport sociaux, le travail, la religion, la spiritualité, l’orientation sexuelle… Pas un seul thème n’a pas son anecdote raciste, dégradante et déshumanisante.
Voir la réalité en face
C’est un beau défi que se lance Amandine Gay en important son documentaire au Québec où, malgré une langue commune, les mœurs ne sont pas les mêmes. D’abord défini comme « film de niche » lorsque la réalisatrice a entamé sa recherche de financement, le film a été un véritable succès auprès des spectateurs du Clap, hommes ou femmes, noirs ou blancs.
Diversifiés et sans filtre, les témoignages sont entrecoupés par des performances artistiques : danse, théâtre, poésie, à chacune des femmes sa façon d’exprimer sa révolte, mais aussi sa fierté et son amour.
Amandine Gay bannit la violence et la colère de son documentaire. Elle oriente son objectif vers la beauté de ces femmes noires à travers des plans qui capturent leur franchise en toute simplicité. L’artisanat de la dramatisation se fait sans musique et sans montage subliminal ; tout est dans les mots. Avec une petite touche d’humour doux-amer, nous sommes confrontés à la réalité que vivent ces femmes.
Nous ne sommes toutefois pas laissés sans espoir. Gay évoque le futur pour clore l’ouverture. Faut-il partir ? Faut-il avoir des enfants au risque de les confronter inéluctablement à la même situation ? À qui la relève ?
Finalement, Ouvrir la Voix donne envie de lutter.
Un débat pour ouvrir les voix
C’est avec émotion que les spectateurs ont applaudi Amandine Gay à la fin du documentaire. La réalisatrice, curieuse de connaître les impressions générées par son travail, s’est présentée au Clap pour ouvrir le débat après la séance.
Au cours du débat, Gay souligne que le terme « race », banni de la législation française en 2013, mérite d’être déconstruit. En effet, ce terme est réel dans la société du XXIe siècle. Il serait temps de l’assumer pour « passer de la théorie à la pratique », a-t-elle déclaré.
L’ampleur du débat généré signifie que l’objectif de la réalisatrice a largement été atteint. Les voix ont porté, elles ont inspiré et ce n’est que le premier pas cinématographique vers une mise en lumière de la réalité dans laquelle vivent les Afro-descendant(e)s. Aujourd’hui, la balle est dans le camp des spectateurs.