Redéfinir la francophonie

Plusieurs problèmes ont atteint l’institution francophone dans les dernières années. Tout d’abord, il est important de noter les changements globaux. Depuis la fin de la guerre froide, un seul modèle de société prime, le modèle libéral anglo-saxon. Tout ceci s’accompagne d’une primauté de plus en plus grande de l’anglais partout sur la planète.

De plus, selon Michel Guillou, professeur et directeur de l’institut pour l’étude de la Francophonie et de la mondialisation à l’Université Jean-Moulin Lyon III , «il y a une ignorance du fait francophone». Devant le peu de succès sur le plan économique et sur le plan des droits de l’homme, il se serait développé une francophobie selon lui. «Dans les pays du Nord, nous ignorons la Francophonie et bien pire encore, dans les pays du Sud, ils ignorent la Francophonie, mais rêvent du modèle de société américain et anglais», poursuit-il.

Mais il faut rester optimiste, puisque M. Guillou fait remarquer  «qu’on peut penser que la Francophonie est en panne mais qu’elle demeure un espoir». Pourquoi en est-il ainsi? La raison principale est son pouvoir d’attraction. Plusieurs pays rejoignent encore ses rangs. De plus, dans certains dossiers, la Francophonie commence à faire preuve d’une réelle influence. Le cas de l’adoption par l’UNESCO de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles en 2005 en est l’exemple le plus concret.

De surcroît, il faut noter que la crise financière actuelle pourrait freiner la prolifération du modèle anglo-saxon. De plus en plus, on se rend compte des effets pervers de ce modèle. Ceci, accompagné d’une plus grande place accordée à la mondialisation culturelle, laisse entendre que la Francophonie pourrait redevenir un pôle, s’organisant autour de la langue française dans les relations internationales de demain. Mais pour cela, la Francophonie devra faire plusieurs efforts.

Trois défis à relever
Premièrement, elle devra accroître sa visibilité, selon
M. Guillou: «Les peuples ne peuvent pas apporter à la Francophonie s’ils ne la connaissent pas». Il ne faut donc pas avoir peur des symboles et augmenter la mobilité des gens à l’intérieur de la Francophonie pour créer un sentiment d’appartenance autour de la langue française.

Deuxièmement, il faut établir un rôle précis pour l’institution francophone. Théodore Holo, juriste, homme politique béninois et professeur à l’Université nationale du Bénin, a identifié deux secteurs d’importance capitale: la consolidation de la démocratie et l’harmonisation de la mondialisation.

Toujours selon monsieur Holo, «la solidarité doit avoir un sens au sein de la Francophonie, donc il faut aider les pays du Sud, pas avec des allégements du fardeau de la dette, mais en formant des hommes publics». Il doit y avoir des dialogues entre les nations pour humaniser la mondialisation, et cela passe par l’éducation. Ces missions permettraient de réduire la fracture au sein de l’institution et de donner plus de poids à la Francophonie.

Troisièmement, il faut s’attaquer au problème du français. Selon Monsieur Guillou, «il faut des objectifs quantitatifs, donc il faut doubler le nombre de personnes qui parlent français». Un autre point important est la formation des professeurs de français. Il faut s’assurer de la compétence de ces derniers.

Somme toute, la Francophonie fera face à plusieurs défis dans les prochaines années et devra savoir les surmonter. Pour cela, il faudra qu’il y ait une grande volonté des États membres et une structure de développement bien définie.

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