Printemps érable : Sans appel

André Bérubé, manifestant pendant la crise étudiante, a obtenu gain de cause à la Cour des petites créances à la suite de son arrestation lors d’une manifestation en mai 2012, à Québec. C’est le juge Daniel Lavoie qui a rendu ce jugement, proposant du même souffle aux policiers de réviser leurs méthodes. La Ville doit lui verser la somme de 4000 $ en dommages pour avoir bafoué ses droits fondamentaux.

C’était le 28 mai 2012, lors de la 30e manifestation à Québec pour contester la hausse des frais de scolarité annoncée par le Parti libéral de Jean Charest. Comme bon nombre d’entre elles, cette manifestation s’annonçait paisible, familiale même, se souvient André Bérubé, contacté par Impact Campus à la suite de sa victoire en Cour. Rien à voir avec les grandes manifestations bruyantes de Montréal.

Les policiers ont rapidement déclaré la manifestation illégale, sous prétexte que les militants présents refusaient de leur donner leur itinéraire. « Ils le connaissaient, notre itinéraire, parce qu’ils nous attendaient à notre point d’arrivée », soutient M. Bérubé. Les manifestants se trouvaient devant l’endroit exact où Mme Michelle Courchesne, ancienne ministre de l’Éducation, s’entretenait avec les leaders étudiants. Ceux-ci ont alors parlé aux policiers qui ont annoncé aux gens présents qu’ils pourraient rentrer chez eux, rapporte M. Bérubé.

Malgré tout, peu après, la police anti-émeute a arrêté pas moins de 84 personnes, dont André Bérubé. Ils ont été menottés dans le dos avec des attaches à tête d’équerre, filmés et entassés dans des autobus du RTC envoyés à cet effet. Leur détention a duré trois heures ; le tout sans eau, nourriture ou même salle de bain. L’article invoqué pour leur arrestation était le 500.1 : « action destinée à entraver la chaussée ».

Concernant cet article précisément, M. Bérubé n’a jamais admis y contrevenir. « Les méthodes employées par les policiers ont été disproportionnées », déclare-t-il. C’est d’ailleurs ce qu’a estimé le juge Lavoie. « C’est comme si tu ne fais pas un stop, et là les policiers débarquent, te menottent, te font attendre quelques heures, et que, pour finir, t’envoient par autobus à l’autre bout de la ville, en plus d’une amende de 500 $ », s’indigne André Bérubé. C’est dans ces termes qu’il s’est défendu devant la Cour des petites créances.

Malgré ce jugement, le chef de police de Québec, Michel Desgagné, a déclaré que si c’était à refaire, à savoir le travail général des policiers en 2012, rien ne serait changé. À noter qu’il s’oppose à la décision du juge, même si celle-ci est sans appel. De son côté, le maire Régis Labeaume a également fait une sortie la semaine passée, donnant son appui au corps policier de Québec. Il estime que ceux-ci ont bien fait leur travail durant le Printemps érable.

Le rapport Ménard, publié en mai 2014, tend à faire comprendre l’inverse. Parmi les 28 recommandations faites pour éviter une nouvelle crise du genre, 21 d’entre elles concernent directement le corps policier.

André Bérubé est bien sûr satisfait d’avoir eu gain de cause, bien que ses amis étaient pour le moins sceptiques quant à ses chances de réussite. Il espère que d’autres manifestants présents lors de l’arrestation du 28 mai 2012 feront la même chose que lui, puisqu’ils ont tous été identifiés et filmés en entrant dans l’autobus.

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