La culture : un enjeu électoral?

Ce printemps, les pancartes électorales sont les seuls bourgeons auxquels nous semblons avoir droit. Les différents chefs commencent alors leur parade nuptiale respective, non pas pour titiller une femelle à la libido saisonnière, mais bien pour tenter d’éveiller la marmotte électorale que nous sommes. Les artistes de la région, ayant déjà vu neiger, savent très bien que la culture fait rarement partie des méthodes de séduction préconisées par nos politiciens alpha. Le Conseil de la Culture a donc organisé un débat sur le sujet, qui s’est tenu mardi passé au Palais Montcalm.

Entièrement composé de femmes, le débat s’est tenu entre Christine St-Pierre pour le Parti libéral, Agnès Maltais pour le Parti québécois et enfin Marie-Ève Duchesne, candidate pour Québec Solidaire. La Coalition Avenir Québec, bien qu’elle soit invitée, a choisi de prolonger son hibernation.

Le débat fut animé avec bonne humeur et une sincère dose de patience par madame Françoise Guénette. Avant d’entrer dans le débat comme tel, le président du Conseil de la Culture, Monsieur Marc Gourdeau y est allé d’un discours franc sur l’importance de la culture pour une société. Il souligna que les gouvernements, quels qu’ils soient, ont l’habitude d’affirmer que la culture est un des fondements de l’État québécois, mais qu’au final, il n’investit qu’un maigre 0,7% de son budget. Aussi, il faut savoir que, sur le total des demandes de bourses faites par les artistes, moins de 15% reçoivent une réponse positive. Un grand nombre d’entre eux vivent à peine au seuil de la pauvreté, véritable prix de leur choix de carrière. Monsieur Gourdeau a aussi partagé sa grande fatigue de devoir toujours convaincre tout un chacun de l’importance de la culture. On imagine mal un médecin devoir faire la même chose.

Par la suite, les trois intervenantes ont croisé le fer sur trois thèmes : les jeunes et la culture, l’accroissement du financement de base des activités artistiques et culturelles et, enfin, la valorisation des arts et de la culture. À l’image des débats auxquels nous sommes habitués, le Parti québécois et le Parti libéral ont débuté leur argumentaire par des pointes visant les autres partis, et Québec Solidaire s’est encore valu le rôle de la Suisse. Christine St-Pierre tenu à mentionner que la culture était l’article premier du programme électoral de Jean Lesage. Rappelons aux étourdis que cela fait maintenant 54 ans…

Agnès Maltais a continué de promouvoir le projet Diamant de Robert Lepage, en spécifiant qu’une fois libre, La Caserne pourrait servir au théâtre pour enfants Les Gros-Becs. Géographiquement parlant, à la sortie du théâtre, les jeunes seraient alors littéralement à deux pas du Musée de la civilisation, créant ainsi une proximité intéressante de différentes formes d’art.

De son côté, la candidate de Québec Solidaire a proposé la mise en place d’un salaire plancher de 12 600$ par an, aidant ainsi les artistes à s’élever un peu au-dessus du seuil de la pauvreté. Son parti propose d’aider financièrement les arts émergents et d’aider de façon équitable les régions, trop souvent oubliées dans ce domaine. Enfin, ils proposent de baliser plus efficacement les radios poubelle de la ville qui dénigrent continuellement les artistes, entre autres.

La députée libérale s’est manifestée contre l’idée de censurer les radios, précisant qu’il fallait faire confiance à l’intelligence des gens, à leur jugement. Elle a aussi nié les difficultés de communications entre le ministère de la Culture et celui de l’Éducation, relevées par les autres partis. Elle admet toutefois qu’il est important de briser l’impression d’élitisme qui entoure l’art de façon générale. Questionnée par l’animatrice Françoise Guénette sur les projets culturels futurs du Parti libéral, Madame St-Pierre a répondu : «  On va avoir une journée culture. »

Bien qu’étant en désaccord par principe, les trois femmes étaient toutes d’avis que la culture était primordiale pour notre société et que son financement était problématique. Ce fut une soirée fort intéressante, mais il faut se poser la question : pourquoi organiser un débat sur la culture, avant le vrai débat des chefs? La réponse est simple, mis à part une intervention de Françoise David, personne n’en a parlé. Au Québec, on sait que la culture, c’est important, il s’agit maintenant d’élire un parti qui le pense aussi. Sortir pelleter en juin, c’est aussi absurde que de s’informer la veille d’une élection. Informez-vous, bon printemps.

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