Détruire et remplacer le pont de Québec, selon Michel A. Duguay

Le professeur de génie électronique et physicien à l’Université Laval, Michel A. Duguay, propose de démolir l’actuel pont de Québec et d’en construire un neuf. Alors que le débat sur le troisième lien entre Québec et la Rive-Sud a toujours sa place dans l’espace public, cette idée a suscité de vives réactions.

C’est en réponse à un article du journal Le Soleil sur les travaux du pont de l’ile d’Orléans que le professeur de l’Université Laval a transmis une lettre à différents politiciens et médias de la Vieille Capitale. Ledit texte énonce les raisons qui le poussent à croire qu’un nouveau pont devrait remplacer l’actuel pont de Québec.

Favorable à l’idée d’un troisième lien, l’enseignant a dernièrement changé son fusil d’épaule. Comme il le mentionne en entrevue, « le troisième lien deviendrait un nouveau deuxième lien». Connu pour avoir milité pour la fermeture de la centrale nucléaire Gentilly, M. Duguay désire maintenant se battre pour faire valoir son projet.

L’emplacement actuel du pont de Québec est l’un des principaux arguments évoqués par le physicien. « Je voulais trouver quel serait le meilleur endroit pour un troisième lien. À force de regarder ça et à la suite de plusieurs conversations, je crois que l’endroit idéal serait en aval du pont actuel », explique-t-il.

Avec les autoroutes et le chemin de fer à proximité, une construction dans ce secteur réduirait la facture. Toutefois, le professeur croit qu’un tel projet ne règlerait en rien le risque d’écroulement du pont de Québec. « Imagine que le vieux pont de Québec tombe, et s’il y a des gens dessus, il va avoir des pertes de vie. J’ai conclu qu’il fallait le démolir », soutient-il.

Rouille, fatigue du métal et corrosion

Maintenant âgé d’une centaine d’années, le pont est actuellement dans un état qui ne rassure en rien le professeur de génie électronique. « J’ai commencé à penser qu’il était peut-être trop vieux », estime-t-il.

Dans sa lettre, le professeur de l’Université Laval relève plusieurs arguments pour justifier le remplacement. Inauguré en 1917, le pont centenaire a été construit à une époque où la fatigue du métal n’était pas encore connue.

« Depuis la Deuxième Guerre mondiale, il est bien connu que des pièces métalliques soumises à des contraintes cycliques peuvent subir une rupture soudaine après la propagation graduelle de microfissures », précise M.Duguay. Il ajoute que le fait d’appliquer de la peinture, au coût de plusieurs centaines de M$, ne sauvera pas le pont.

En se basant sur le rapport Delcan, publié en janvier 2009, le physicien souligne l’importante quantité de rouille sur l’infrastructure. Il y a, selon le document, des centaines de photos qui montrent « plusieurs formes de rouilles sur les surfaces d’acier ». Il souligne que la rouille réduit le support et la sécurité du pont.

Un pont haubané

Pour la construction d’une nouvelle infrastructure entre la Rive-Sud et Québec, M. Duguay estime que le meilleur choix serait un pont haubané. Plus sécuritaire en cas de bris. Ce type de pont est aussi beaucoup plus résistant aux vents de travers, un phénomène fort sur le fleuve, explique-t-il.

Sa vision inclut un pont de six voies routières, deux voies ferroviaires et une place importante pour le transport en commun. « Il faut mettre le paquet! Tant qu’à en construire un nouveau, aussi bien le faire comme il faut », lance-t-il. Situé près de l’actuel pont de Québec, il serait facile, selon lui, de rejoindre les infrastructures déjà existantes.

Il ne partage toutefois pas l’avis de certains membres de la chambre des commerces de Québec, qui désiraient voir des activités comme de l’escalade ou du bungee sur le pont.

Niveau financier

Évalué à 1,1 milliard, le remplacement du pont de Québec a attiré plusieurs critiques qui avouent trouver le coût très élevé. Toutefois, le professeur estime qu’il est plus logique d’investir ce montant pour construire un pont avec une durée de vie d’environ 120 ans que d’octroyer 550 millions pour des réparations qui devraient augmenter la durée de vie d’environ 20 ans.

De plus, il soutient que le pont est en si mauvais état que même d’importants travaux ne pourront le sauver à très long terme.

M. Duguay compare le projet du nouveau pont Champlain à Montréal, évalué à environ quatre milliards de dollars. Il conclut en se questionnant à savoir pourquoi la Capitale-Nationale ne pourrait pas prétendre à de nouvelles infrastructures qui seraient mieux construites.

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