Que faire après la philo ?

Autant pour le public que pour les étudiants directement impliqués, les débouchés directs peuvent ne pas sembler nombreux en philosophie. Le 24 mars dernier, l’étudiante en première année au baccalauréat, Romane Turcotte, a organisé la conférence La philo. Et après ? au pavillon Gene-H.Kruger, afin de déconstruire ces mentalités.

Cheminement scolaire, expériences vécues, habiletés développées durant la formation en philosophie et emploi actuel ont été les thèmes abordés.

En collaboration avec le doyen de la Faculté de philosophie, Vincent Thibaudeau, l’étudiante a invité sept personnes à venir expliquer les avantages d’une formation en philosophie.

Comme l’événement avait été apprécié lors des éditions précédentes, il était important pour elle de répéter l’expérience, puisque plusieurs personnes au sein du baccalauréat et même à l’extérieur de celui-ci se posent des questions sur leur avenir.

Figure de tremplin

Notons qu’aucun conférencier présent vendredi dernier n’œuvre présentement dans un milieu directement lié aux études en philosophie. Sauf que l’unanimité s’est concentrée sur les compétences acquises lors du baccalauréat, de la maîtrise ou du doctorat.

Le but des intervenants était notamment de motiver les étudiants des bienfaits d’un parcours en philosophie, car plusieurs fausses croyances règnent chez le public envers ce programme. « On travaille pour changer les préjugés sur cette formation. Par contre, on ne va pas faire croire qu’on prépare pour le marché du travail. On veut vendre le bac en philo pour ce qu’il est réellement », a nuancé le doyen de la faculté.

Les conférenciers ont donc énormément insisté sur les capacités d’interpréter, de traduire, d’argumenter et de réfléchir s’étant accrues pendant leurs études universitaires en philosophie.

Empathie et lecture de la réalité

Comme le contenu de la formation est axé sur le côté humain, les conférenciers ont insisté sur l’empathie qu’ils ont développée tout au long de leur parcours. « La philo m’influence au quotidien. J’insiste sur la perspective humaniste, la défense des intérêts de chacun et sur l’égalité des chances », a raconté Marie-Pier Caron, devenue infirmière après ses études en philosophie.

Une autre compétence mentionnée par plusieurs intervenants : la lecture, puisqu’une multitude de philosophes ont marqué l’histoire de par leurs travaux, qui sont régulièrement présentés aux étudiants.

Pour les intervenants, cette compétence ne se résume pas à lire un document, mais aussi les autres ou encore une situation particulière. « La philo m’a enseigné à prendre le recul nécessaire pour appréhender une situation ou un domaine précis », a expliqué Frédéric Desrosiers, dorénavant conseiller en affaires autochtones au gouvernement du Québec.

Une réputation à changer

À l’issue de leur formation en philosophie, tous les intervenants présents à la conférence ont suivi au minimum un certificat dans un autre programme. Que ce soit en administration, en droit ou même en médecine, chacun a ajouté une corde à son arc en acquérant des compétences dans un autre domaine.

Par contre, il a été difficile pour certains d’être admis dans un autre programme suite à leur formation en philosophie. Cela est dû au fait qu’après la troisième année d’études supérieures, le dossier scolaire du cégep s’efface complètement pour être remplacé par le dossier universitaire.

C’est notamment le cas de Marie-Pier Caron, qui a fait des pieds et des mains avec la direction pour obtenir son admission en sciences infirmières. Même si elle avait maintenu une excellente cote R au cégep, celle-ci n’existait plus aux yeux de la direction, puisqu’elle avait terminé son baccalauréat en philosophie, un programme non contingenté. Elle a discuté avec sept personnes avant de faire son entrée dans son nouveau programme.

« À mes yeux, mes études en philo avaient été un atout. Toutefois, comme l’indice de force en philo est faible, c’était la seule chose qui comptait pour eux », a décrit Mme Caron.

Le doyen surpris

De son côté, le doyen de la Faculté de philosophie, M. Thibaudeau, s’est dit très étonné que la formation ait pu bloquer des portes.

« Je pensais que c’était le contraire, a-t-il lancé. J’en connais plusieurs ayant fait la formation en philo qui ont été très bien accueillis dans un autre programme. »

En fin d’entretien, il a promis de creuser le dossier et d’intervenir si la formation empêchait effectivement d’entrer dans un autre programme.

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