Ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur : Confusion au sommet

Un ministre, deux ministères. Yves Bolduc à leur tête. Le député de Jean Talon se trouve désormais en charge du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, de même que du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science. Le rapprochement de ces deux instances ministérielles entraîne de sérieuses inquiétudes autant dans le milieu universitaire que dans celui de la recherche.

À chaque changement de gouvernement son changement de Conseil des ministres. Les récents bouleversements impulsés par les libéraux ont notamment semé la confusion dans les milieux de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur sont, depuis le 23 avril, tous deux sous la houlette du ministre Yves Bolduc. Comment va-t-il les prendre en charge ? Quelles sont leurs missions spécifiques ? Autant de questions qui attisent les craintes des acteurs du milieu.

L’enseignement supérieur

Pour Stéphane Lebrun, vice-président aux affaires externes de l’Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures (ÆLIÉS), l’incertitude règne encore quant aux orientations que va prendre le ministre vis-à-vis de l’enseignement supérieur. « Notre plus grande inquiétude est le fait qu’il y ait un des deux ministères qui soit perdant vis-à-vis de l’autre. On craint que le ministre s’occupe moins de l’enseignement supérieur », expose M. Lebrun.

Sur ce point, Yasmine Abdelfadel, attachée de presse au cabinet du ministre, se veut rassurante. « Le ministre va déployer autant d’énergie et de temps pour l’un que pour l’autre », affirme-t-elle. Face à la question de la diversité des tâches et des missions, Mme Abdelfadel se range : « M. Bolduc va prendre le temps nécessaire pour préparer et gérer les dossiers. Il va déployer tous les efforts possibles », esquive-t-elle.

Le vice-président aux affaires externes de l’ÆLIÉS nous indique que certaines de leurs craintes ont toutefois été rassurées. « Nous ne savions pas si les chantiers mis en place après le Sommet sur l’enseignement supérieur allaient continuer. Mais nous avons eu la confirmation que le travail de l’ancien ministre Pierre Duchesne ne sera pas annulé », indique-t-il.

Un des points qui restent à surveiller, selon Stéphane Lebrun, est le montant de 1,7 milliard destiné au développement et à l’avenir des universités. « C’était une somme que le Parti québécois avait promis de réinvestir dans le financement des universités. Et maintenant, le ministre veut réévaluer ce montant potentiellement à la baisse », explique-t-il.

La recherche

Dans le milieu de la recherche, la principale déception est de voir le domaine de la technologie intégré au ministère de l’Économie, des Exportations et de l’Innovation, dirigé par Jacques Daoust. C’est ce qu’exprime Louise Dandurand, présidente de l’Association francophone pour le savoir (ACFAS) : « La responsabilité de l’État envers l’innovation est maintenant scindée en deux. C’est problématique et inquiétant », confie-t-elle. Les questions de l’innovation se trouvent donc à présent sous l’égide des ministères de l’Enseignement supérieur et de l’Économie.

La présidente de l’ACFAS révèle une vive inquiétude par rapport au maintien de la Politique nationale de la recherche et de l’innovation (PNRI), lancée en octobre 2013. « La PNRI balise le développement de la recherche et de l’innovation pour les cinq prochaines années. C’est une politique très cohérente », explique-t-elle.

Mais la scission administrative complique les chances de bon déroulement de cette politique : « Comment pourra-t-on assurer le maintien et le déploiement de cette politique alors que ses champs d’application se trouvent sous la charge de deux ministères ? », s’inquiète Mme Dandurand.

Elle poursuit en invoquant « des possibilités de manque de cohérence dans les interventions gouvernementales ». La présidente de l’ACFAS ne se veut toutefois pas alarmiste : « C’est possible qu’il y ait une bonne collaboration entre les deux ministres », nuance-t-elle.

À ces préoccupations, l’attachée de presse au cabinet du ministre répond que « M. Bolduc va travailler très conjointement avec Jacques Daoust ». « Ils ont deux ministres, ils ne peuvent pas être mieux servis », tranche-t-elle.

Pour la présidente de l’ACFAS, il va falloir « transcender cette division administrative » pour éviter la confusion qui règne présentement.

Consulter le magazine