Nettoyage humain dans Saint-Roch

C’est ce qu’ont déclaré les responsables du RAIIQ, au cours de leur action « Droit de cité », qui a rassemblé près d’une centaine de citoyens devant le parvis de l’Église St-Roch, le 4 octobre dernier.

Le coordonnateur de l’organisme, Frédéric Keck, estime que les personnes itinérantes reçoivent des contraventions pour des infractions mineures, qui sont rarement sanctionnées par les policiers lorsqu’elles sont commises par d’autres citoyens, comme flâner, cracher ou jeter des mégots.

«Une personne itinérante risque d’avoir une contravention pour flânage ou mauvaise utilisation d’un lieu public juste parce qu’elle est sur un banc de parc pendant quelques heures. Et pourtant, ce ne sera pas le cas pour un citoyen dit normal», a-t-il illustré.

Selon lui, cette répression est de plus en plus fréquente et structurée dans les rues de Québec. Il qualifie même le phénomène de «nettoyage» visant à rendre les rues «plus attrayantes» pour les résidants et les touristes.

 «Avec la revitalisation des quartiers centraux, on tente d’exclure les personnes itinérantes des lieux publics, a-t-il mentionné.  Au nom du développement et du sentiment de sécurité, des citoyens voient leur droit d’occuper un espace public bafoué. C’est inacceptable», s’est-il insurgé.  

Invité à réagir aux propos des responsables du RAIIQ, François Bouchard, du service des communications de la police de Québec, a mentionné que les interventions policières sont toujours faites en fonction des comportements des citoyens et non en fonction de leur situation sociale. «La réglementation est la même pour tout le monde», a-t-il déclaré.

Problème de judiciarisation

Qu’elles soient méritées ou non, il n’en demeure pas moins que les contraventions remises aux personnes itinérantes restent généralement impayées. La conséquence de ces non-paiements est la judiciarisation, dont l’issue est souvent l’incarcération. Pour payer leur dette, les personnes itinérantes doivent donc passer du temps derrière les barreaux.

Philippe Patenaude, un jeune homme de 19 ans, qui a longtemps vécu dans les rues de Québec, connaît très bien cette situation. «Je n’ai pas assez de doigts pour compter les  personnes que je connais qui sont allées en prison parce qu’elles ne pouvaient pas payer leur contravention», a-t-il souligné.

Steve Lalonde, organisateur communautaire au RAIIQ, considère que ce phénomène est complètement improductif. «En agissant de la sorte, on marginalise davantage les itinérants, tout en augmentant les coûts du système carcéral», a-t-il mentionné. «L’approche répressive de l’État pour gérer l’itinérance a donc des coûts sociaux et économiques énormes», a-t-il poursuivi.  

Selon lui, il faudrait plutôt «renoncer» à certains règlements municipaux relatifs aux espaces publics pour s’attaquer au problème de la judiciarisation des personnes itinérantes.

Rappelons que, dans son rapport déposé en novembre 2009, la Commission parlementaire de la santé et des services sociaux sur l’itinérance au Québec avait reconnu l’improductivité de la judiciarisation dans la lutte contre l’itinérance. Elle s’était cependant opposée à l’idée de mettre fin à la délivrance de contraventions aux personnes itinérantes pour les atteintes aux règlements municipaux.

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