Enthéos ou la quête du bonheur

Thomas a 24 ans. Il est étudiant au doctorat et traverse une crise existentielle qui l’empêche de dormir, voire de respirer. Il avait la foi, mais ne l’a plus. Parce qu’il ne croit plus, il a laissé tomber la théologie pour étudier l’histoire grecque. Pourtant, quelque chose en lui ne veut pas s’éteindre. Il amorce une quête qui le mènera là où il ne pensait plus retourner: vers lui.

Enthéos, le premier roman de Julie Gravel-Richard, est fort en symboliques de toutes sortes. Religion, mythologie et philosophie se côtoient pour guider la recherche intérieure du personnage principal, qui a fui son passé en espérant pouvoir rebâtir son avenir. Un déni de soi qui entraîne souvent sur une fausse route. «Est-ce qu’on peut se mettre de côté et faire autre chose?, se demande l’écrivaine. Non, je crois que l’on doit rebâtir à partir de ce qu’on est». Il s’agit d’un cheminement que Thomas effectuera tout au long de l’histoire. Il passera lentement de l’ombre à la lumière.

Ce livre, senti, créé en un peu plus d’un mois, révèle une écriture intuitive et saccadée traduisant le mal-être qui habite le protagoniste. «J’avais la volonté qu’on se sente à l’intérieur de la tête de quelqu’un. Qu’on sente que le personnage saute du coq à l’âne», affirme Julie Gravel-Richard. Cet essoufflement omniprésent lève le voile sur l’apprentissage que doit faire le personnage : celui d’apprivoiser la mort. Selon la romancière, cette prise de conscience, propre aux êtres humains, traverse les époques. «Toutes les questions religieuses et philosophiques tournent autour de la mort. Les grands questionnements d’aujourd’hui sont les mêmes que ceux des civilisations anciennes. On meurt encore en 2008…», relate-t-elle.

La fatalité de notre existence est, en quelque sorte, la trame de fond du roman. Une fatalité que la jeune femme accepte, sereine, étant elle-même aux prises avec une maladie. Julie Gravel-Richard penche toutefois davantage du côté de la lumière. «C’est important de ne pas culpabiliser. Il n’y a rien qui explique ça. Si on se demande sans cesse “Pourquoi moi?”, ça ne donne rien», maintient-elle avec conviction.

Thomas doit faire face aux injustices de la vie et trouver une façon d’être heureux quand même. Il doit devenir Enthéos, «enthousiaste» en grec, pour survivre. Sa quête du divin ne l’a pas satisfait, il tente donc de défricher une autre voie. «Les gens qui perdent leurs repères les trouvent souvent ailleurs. Ils se raccrochent à quelque chose, souvent à la religion. Avoir une philosophie de vie est plus difficile à développer», soutient la spécialiste de l’histoire grecque qui, malgré sa passion pour la mythologie et le divin, croit profondément en l’humanisme. «On est humains. On vit une réalité humaine. Il y a beaucoup de beauté dans tout ça. C’est intéressant d’être humain!», lance-t-elle, lumineuse. Pas de doute, Julie Gravel-Richard l’est, elle, Enthéos.

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