Crédits photo: Daniel Tremblay

À L’affiche : en faire un peu trop

À l’affiche. Un cinéma décrépi qui est l’un des seuls de sa région à encore posséder un projecteur 35 mm et ses trois employés : Rose (Catherine Côté), l’exubérante projectionniste, Avery (Patrick Emmanuel Abellard), le fan de cinéma mal dans sa peau et Sam (Charles Fournier), celui qui travaille là depuis des lunes et qui a l’intelligence sociale d’un abat-jour. Leur quotidien au cinéma, le popcorn à ramasser sur le sol encore et encore, leurs confidences.

Théâtre Le Premier acte – 25 février au 14 mars 2020
Texte : Annie Baker (traduit par Annie Baker – Mise en scène : Annie Baker

Par Emmy Lapointe, Cheffe de pupitre aux arts

Écrémer
Il y a cette citation de Saint-Exupéry qui figure sur la moitié des plans de cours en création littéraire « la perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer ». C’est un peu quétaine ou cliché comme phrase, mais qu’importe puisqu’elle recèle l’essentiel de ce qui devrait composer une œuvre : beaucoup à propos de peu, plutôt que peu à propos de beaucoup. Et à ce niveau-là, le texte d’À l’affiche a échoué. Comment, en un peu de moins de trois heures, peut-on prétendre approfondir autant de « problématiques » ? On n’y arrive pas, tout simplement. Trop de portes ouvertes, aucune refermée.

En fait, je crois que le texte, même s’il ne date que de 2012, est un peu dépassé. Il aborde de manière maladroite le suicide, les troubles alimentaires, et j’en passe. Même l’humour a vieilli. Ses trois protagonistes sont des archétypes typiques qui se nuancent trop peu, trop tard.

Pour les nostalgiques
Au départ, les comédiens semblent aussi être dans le mode « un peu trop », mais ça se replace assez vite. On a rapidement envie de prendre un verre avec Rose, de flatter le dos d’Avery en lui disant que tout va bien aller et de niaiser un peu Sam. Et même si ça aussi c’est cliché comme formule, les silences parlent beaucoup; à vrai dire, souvent bien plus que les dialogues. Parce que les non-dits et les gestes répétitifs portent en eux-mêmes le poids de leurs mille angoisses tues.

La vieille salle de projection et les références cinématographiques pré-2000 feront plaisir aux nostalgiques.

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