Les caveaux: une performance évoluée

L’imaginaire ravageant du chorégraphe Alan Lake se manifeste dans Les Caveaux, spectacle pluridisciplinaire in-situ explorant les possibilités d’interaction entre les corps, l’espace et la matière, enterrant le spectateur dans un intermède délavé et troublant.

En ce début de saison présentée par La Rotonde, la compagnie de danse contemporaine Alan Lake Factori(e) a su profiter d’une carte blanche pour emmener les spectateurs en bus scolaire vers un entrepôt éthéré rudement emménagé pour le spectacle. Première secousse à l’arrivée, l’entrain des spectateurs descendus des bus scolaires est rapidement heurté à la gravité de l’ambiance sonore, brillamment composée par Antoine Berthiaume.

L’humidité de cet espace, bâti avec la contribution de la scénographe Julie Levesque, accueillant une structure en bois, un monticule de terre et des poutres métalliques, accentue le morcellement. Les caveaux sont là: on voit devant nous un sous-sol, une cave, un renfoncement.

C’est de la motte de terre fraîche que surgît David Rancourt pour amorcer le mouvement des trois autres interprètes confondus en début de spectacle dans l’obscurité de cet espace désaffecté. Poussivement, il rampe dans la motte pour se convertir en sculpture brillant sous l’éclairage, son corps ayant été recouvert de peinture dans le processus. Des coups vont suivre, disloquant cette image onirique. Le martèlement des murs jusqu’à leur destruction rappellera à certains l’effondrement des colonnes dans Ravages, spectacle précédent du chorégraphe.

Alan Lake dégage de cette carte blanche les recours qui lui sont propres, arrosant ses interprètes d’eau et de peinture, et transgressant la matière avec une force animale. Il ramène la nature à l’intérieure de cet espace pour nous immerger dans un univers aux sentiers sinueux, cabossés par la crudité de l’existence. En finalisant le spectacle, certains qualifieront l’expérience d’hormonale, de néolithique et de fragmentée.

Une expérience cinématographique

Certains spectateurs sortent de la salle avec le sentiment d’avoir vécu une expérience cinématographique. Rien d’étonnant pour une œuvre qui est fondée sur l’exploration d’images et de mouvements façonnés pour des enregistrements vidéo. On témoigne de cette approche tout au long du spectacle par le défilement d’enregistrements conçus au début du processus de création de six semaines. La dynamique est similaire à celle exploitée pour Ravages en 2015, donnant lieu à un court métrage présenté pendant le spectacle.

Les airs musicaux ont aussi grandement contribué à cette impression en atteignant des profondeurs analogues à celles abouties dans certains films de David Lynch.

Saison entraînante pour La Rotonde

Fêtant son vingtième anniversaire, et en prémisse de l’ouverture prochaine de La Maison pour la danse, La Rotonde présente une saison animée par des nouveautés et autres extravagances. À retenir, pour cette saison, des spectacles tels que Glory de Shay Kuebler, Radical System Art et (Very) Gently Crumbling de Grand Poney, tous deux présentés au pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec.

Consulter le magazine