Crédits photo: Patrice Sirois

Critique – La femme de Valence

La femme de Valence est un roman écrit par Annie Perreault qui raconte l’histoire de Claire Halde, une montréalaise qui, lorsqu’elle voyage à Valence en Espagne durant un été, se retrouve prise au dépourvue par une femme qui lui remet son sac à main quelques minutes avant de se suicider en se jetant du toit-terrasse de l’hôtel où Claire séjournait.

Cet événement se produit dans les moments où son mariage avec Jean commence à battre de l’aile. Il aura également un effet catalyseur dans sa découverte de la course à pied ; dès ce moment-là, la course à pied occupera une grande place dans le roman.

Dès le début du livre, on est complètement happé par l’histoire, c’est très bien écrit, c’est mystérieux, le lecteur est fébrile, on a l’impression d’assister à un film de Hitchcock. C’est très descriptif, on a le sentiment d’être sur la terrasse avec Claire. Cet incident amènera également le personnage principal à se poser toutes sortes de questions; par exemple, pourquoi la femme m’a-t-elle donné son sac? pourquoi n’ai-je rien fait pour l’aider dans sa détresse? une autre personne aurait-elle pu la garder en vie? la femme a-t-elle donné son sac pour avoir une mort anonyme? et bien d’autres questions. C’est une belle plongée dans la psychologie de quelqu’un qui vit une situation très particulière.

Des références multiples et un souci de la forme

Ce livre est très intéressant pour quelconque possède une bonne culture générale. L’auteure est une femme qui a obtenu un diplôme universitaire en études russes et littérature française, et ça paraît à certains moments de son roman. On peut trouver dans le roman nombre de références, notamment, à Hitchcock, à Anna Karénine, grand roman de la littérature russe écrit par Tolstoï, à L’étranger d’Albert Camus, des références à plusieurs chansons, mais notamment à Running Up That Hill de Kate Bush.

Un élément particulièrement frappant de ce deuxième roman d’Annie Perreault, c’est la forme : elle rend de grands services au fond du roman. Par moment, c’est écrit comme si c’était un journal, avec des « changements de chapitre » presque à chaque page, produisant un effet d’empressement chez le lecteur. On en lit un, puis on a envie d’en lire un autre, et ainsi de suite… c’est un roman assez court, un peu plus de 200 pages, qui peut se lire en environ 3-4 heures. Quiconque en fin de session pourrait se justifier de décrocher pendant un après-midi en lisant ce roman!

Cavaler au fil des chapitres

La deuxième partie de La femme de Valence est séparée en deux segments. D’un côté on suit un nouveau personnage, la fille de Claire qui, devenue grande, se prépare pour le marathon de Valence. Elle nous fait comprendre rapidement que sa mère est disparue et que ce marathon a une saveur de pèlerinage pour elle. De l’autre côté, on suit Claire après qu’elle ait quitté sa famille et ses enfants, que l’on retrouve également à Valence, mais à des époques différentes on le comprend pareillement très vite. Le rythme rapide de cette deuxième partie nous donne encore l’impression fascinante, cette fois, de courir au côté de la fille de Claire.

Dans cette deuxième partie, nous assistons à 42 petits chapitres où l’on suit chaque kilomètre couru par la fille de Claire au marathon de Valence, à travers lesquels nous suivons de plus le périple de Claire à Valence. Tout au long de sa course, la fille interpelle sa mère en lui adressant la parole comme si elle était à ses côtés, en écoutant sa musique dans son iPod, ce qui produit chez le lecteur la sensation de les voir courir l’une à côté de l’autre.

En somme, c’est un très beau roman sur la relation mère-fille, le mariage, l’empathie et le dépassement de soi, sur fond de mystère « hitchcockien ».

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