Critique littéraire : Sainte-Souleur : Récits du presque pays

François Racine, professeur de littérature au Cégep André-Laurendeau, nous offre dans son plus récent roman intitulé Sainte-Souleur : Récits du presque pays, publié aux Éditions Québec Amérique, sept récits distincts. Ces derniers sont toutefois pourvus d’un lien fort : ils se déroulent tous au Québec, à travers le temps, fusionnant faits réels et fiction. Véritable hommage à la langue française et aux combats menés par différents acteurs afin de préserver celle-ci au fil du temps, l’œuvre vise à réaffirmer l’identité québécoise grâce à son histoire et à ses légendes. 

Hymne au presque pays 

Comme son nom l’indique, le roman de François Racine est une déclaration d’amour envers notre province, celle-ci qualifiée de presque pays par l’auteur. En effet, à travers les récits, des événements ayant forgé l’identité québécoise sont évoqués. Qu’il s’agisse de la Conquête, de la Rébellion des Patriotes, ou encore du tragique glissement de terrain de Saint-Jean-Vianney au Saguenay, le lecteur est amené à revisiter l’histoire de la province québécoise. Cependant, il n’est pas nécessaire d’avoir une connaissance approfondie de tous ces événements marquants puisque l’auteur réussi à bien les vulgariser et à les inclure de manière modeste au travers des sept récits.

En plus d’incorporer des faits historiques, certaines légendes québécoises sont aussi intégrées aux différents récits. On peut y retrouver entre autres la légende de la Corriveau et ses sept maris. Enfin, de réels personnages ayant marqué les esprits québécois ont aussi inspiré l’auteur dans ses récits, tels qu’Hubert Aquin et Louis Cyr. Il serait aisé de croire qu’une telle combinaison d’éléments aussi différents les uns des autres puissent mener à une certaine confusion chez le lecteur. C’est toutefois tout le contraire qui se produit. Les diverses sources externes ayant inspiré François Racine sont si bien intégrées aux récits de Sainte-Souleur, en plus d’être incorporées avec habileté dans un contexte contemporain que le lecteur n’a d’autre choix que de se sentir captivé par la suite des événements et leur finalité surprenante, ainsi que la manière dont tous ces éléments réussissent ultimement à se rejoindre.  

Un amalgame intéressant  

Les sept récits présentés dans Sainte-Souleur ne sont en aucun cas reliés entre eux et la variété des narrateurs ainsi que de la forme du texte en témoignent. Tantôt sous forme de prose, tantôt sous forme de conversation Facebook, l’originalité de chaque récit favorise une lecture envoûtante. De plus, l’auteur incorpore parfois un langage familier ainsi qu’un ancien français parlé par les habitants de l’époque, ce qui résulte en un certain réalisme tiré de ces récits de fiction. Vu la mention de lieux ayant réellement existé ainsi que l’utilisation de dates précises par François Racine, il n’est pas rare de se demander si ces récits de notre presque pays sont véridiques. Des éléments contemporains sont aussi ajoutés au roman, tels que Tinder et Fifty Shades of Grey. Cette intégration d’éléments actuels dans ces récits inspirés du folklore québécois témoigne de la grande originalité de l’œuvre. 

La structure du roman encourage une lecture agréable, étant donné la forme variée des récits et la diversité des personnages. En outre, comme chaque histoire ne dispose que d’une ou deux lignes comme résumé, le lecteur n’a d’autre choix que de se laisser bercer par les aventures de chaque narrateur sans se douter de leur direction. Comme c’est le cas pour la plupart des légendes folkloriques, l’aboutissement des récits n’est pas toujours des plus joyeux. Toutefois, vu l’imprévisibilité de chaque histoire et le suspense qui y est rattaché, on pardonne aisément à l’auteur leur finalité parfois macabre.  

En somme, Sainte-Souleur : Récits du presque pays est une œuvre qui vaut certainement le détour pour quiconque serait le moindrement intéressé par les légendes et les événements ayant façonné l’identité québécoise. Tel que mentionné précédemment, il n’est toutefois pas requis d’avoir une grande érudition concernant l’histoire de notre province avant d’en entreprendre la lecture étant donné la marginalité des récits tirés en grande partie de l’imaginaire de l’auteur. 

 

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