Photo : Courtoisie, Les Films Séville

De mère au foyer à légende

Vendredi prochain, Debbie Lynch-White fera oublier son personnage de la méchante IPL Nancy Prévost d’Unité 9. Elle sera désormais connue comme étant la courageuse Mary Travers, devenue célèbre sous le patronyme de La Bolduc.

On découvre d’abord Mary Travers près de la vingtaine qui trouve l’amour auprès d’Édouard Bolduc (Émile Proulx-Cloutier) grâce à la musique. Les jeunes mariés commencent à fonder une famille comme toutes bonnes familles catholiques de l’époque. Madame Édouard Bolduc devient, après quelques fausses couches, une mère et femme au foyer sans réelle ambition, jusqu’au jour où son mari tombe malade. Pour nourrir ses enfants, elle va pousser la chansonnette et devient presque aussitôt une vedette. Le reste est l’ascension de la légende.

Un récit simple

Au point de vue du récit, le film est très linéaire et conventionnel, les événements se succèdent sans grand éclat. Ce qui nous captive malgré tout, c’est la vie bouleversante et exceptionnelle de la famille Bolduc. Une vie méconnue, au-delà des reels et des turlutes de Mary, nous est présentée à travers le regard de Denise, sa fille aînée. La relation tumultueuse entre les deux femmes est l’élément clé du film.

En arrière-plan, nous suivons le combat de Thérèse Casgrain (Mylène Mckay) pour le droit de vote des femmes. Un combat que Madame Bolduc n’a pas mené de front, pourtant son succès et sa voix ont donné le courage à plusieurs femmes de se battre pour la cause. Que ce soit par modestie ou par insouciance, cette grande dame n’a jamais mesuré l’impact que ses chansons pouvaient avoir sur ses concitoyennes.

François Bouvier, qui nous a offert Paul à Québec en 2015, nous fait aujourd’hui voyager dans le temps en nous ramenant à Montréal durant la première moitié du 20e siècle. Il met en image le scénario de Frédéric Ouellet de manière sobre et classique. Cette sobriété permet de valoriser le travail qui a été fait au niveau de la reconstitution historique. Les décors et les costumes sont très réussis.

Denise Bolduc (Rose-Marie Perreault) Photo – Courtoisie, Les Films Séville
De grandes interprétations

Le réalisateur dirige une distribution remarquable, en plus de Debbie Lynch-White, Émile Proulx-Cloutier, Bianca Gervais, Mylène Mckay, Richard Fréchette et Serge Postigo pour ne nommer que ceux-là. Tous excellents à nous transporter à l’époque de la grande noirceur, mais la véritable révélation est celle de Rose-Marie Perreault, découverte récemment dans Les faux tatouages de Pascal Plante. C’est elle qui incarne Denise Bolduc, une jeune femme tiraillée par l’abandon de sa mère et son admiration pour cette dernière.

Les chansons entièrement revisitées par la comédienne Debbie Lynch-White sont très bien interprétées, nous entendons bien plus que les trois chansons incontournables: La bastringue, J’ai un bouton sur la langue et Ça va venir découragez-vous pas. La voix de Debbie Lynch-White est loin de celle de la véritable voix de La Bolduc, mais au-delà de la qualité des enregistrements originaux, le choix de faire chanter la comédienne rajoute à sa performance et nous dévoile toute l’étendue de son talent.

Si les acteurs et la technique sont au rendez-vous, ce biopic n’innove pas, il se contente de relater des événements qui ont mené La Bolduc à devenir un emblème national fort pour les femmes de son époque et des générations futures. Un livre biographique sur Mary Travers pourrait faire le même travail de façon plus exhaustive. Plusieurs scènes ne sont que factuelles sans nous donner de l’émotion et nous revoyons à quelques reprises le même type de montage accéléré pour nous montrer le temps qui passe. Malgré ses quelques défauts, le film de François Bouvier est une oeuvre à voir si on veut connaître un autre aspect du Québec et de cette pionnière de la chanson qu’est Madame Édouard Bolduc.

 

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