Faire peau neuve

Après avoir publié deux recueils au Noroît, c’est cette fois-ci chez La Peuplade
qu’Isabelle Gaudet-Labine nous présente son troisième recueil, intitulé Mue. Elle y
aborde, à travers le thème de la rupture amoureuse et du deuil qui l’accompagne, les
transformations intérieures successives qui sont parfois nécessaires pour survivre à ces
épreuves. Au-delà de l’aspect anecdotique que pourrait présenter cette thématique, on
sent dans cette poésie quelque chose qui le transcende : les images se déploient à travers
une symbolique forte liée à l’animalité, que l’on retrouve dans certains passages
comme « la mort s’annonce sauvage » et « la saison s’achève il faudra changer de peau ».
Avec une écriture dépouillée et sobre, Isabelle Gaudet-Labine offre au lecteur un univers
empreint à la fois de sensualité et de violence, et cette dualité interne accentue
l’impression d’un rythme, celui des saisons et des mues, ce qui témoigne de l’unité
formelle et thématique de l’oeuvre.

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Faisant suite à un premier volet intitulé 2cabinet de curiosités, Charles Sagalane, auteur
prolifique de la maison d’édition La Peuplade, poursuit son musée moi avec un recueil
dont le titre, tout aussi intrigant, est 5antichambre de la galerie des peintres. Ce livre se
parcourt à la manière d’une galerie d’art, et l’on s’arrête à chaque chapitre comme si l’on
était devant une toile. Chaque section du recueil est d’ailleurs inspirée d’une oeuvre
picturale, dont certaines, comme l’Hommage à Rosa Luxembourg de Riopelle, sont
célèbres. La grande faiblesse de ce recueil est son hermétisme : les textes réfèrent à des
peintures que le lecteur n’a pas sous les yeux, ce qui rend difficile l’appropriation des
poèmes : ceux-ci n’arrivent pas toujours à se détacher de leur contexte de création pour
devenir autonomes et partageables. Cela dit, plusieurs sections sont plus accessibles parce
qu’elles arrivent à transcender la peinture dont elles s’inspirent. C’est le cas notamment
de celle qui porte sur la « maison-oeuvre » du peintre Arthur Villeneuve, et aussi de celle
qui aborde Le jardin des délices de Bosch, et dont les textes surréalistes rappellent
l’univers foisonnant et délirant de cette oeuvre.

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