Photo: Courtoisie, Geneviève Grenier

Instant zéro d’une nouvelle carrière prometteuse

Ceux et celles qui ont découvert Laurence-Anne lors de son passage à l’édition 2017 des Francouvertes, où elle a terminé en troisième place derrière Lydia Képinski et Les Louanges, et qui patientaient depuis près du téléphone pour en avoir des nouvelles, conviendront que l’attente aura valu la peine. Avec Première apparition, véritable kaléidoscope sonore – cliché journalistique dur, mais nécessaire -, la fraîchement « retraitée du crime non-organisé » et ses acolytes nous montrent qu’il fut possible d’accoucher d’un des triomphes de ce début d’année en moins de temps qu’il ne le faut pour produire le magazine que vous tenez entre vos mains. Impact Campus est allé à son propre rythme et s’est récemment entretenu avec l’auteure-compositrice-interprète.

Impact Campus : Ton premier album, Première apparition, sort enfin, presque deux ans après ta présence comme finaliste aux Francouvertes [2017]. Peux-tu nous parler du processus de composition et d’enregistrement qui a mené à cet album ?

Laurence-Anne : En fait, l’enregistrement s’est fait au studio Wild. Les chansons étaient déjà composées depuis un petit bout. On a enregistré ça en deux jours, c’était un peu une surprise, on n’avait pas prévu de faire un album. Le troisième prix qu’on a remporté aux Francouvertes était une session d’enregistrement au Wild, une session de deux jours, donc, et nous on allait là-bas avec, en tête, de faire 3-4 chansons. Finalement, on était tellement dans une bulle créatrice qu’on a fini par faire un album au complet. C’est un peu un album surprise !

I.C. : Ok, l’intégralité de l’album a été enregistré pendant ces deux jours, il n’y a pas eu de retouches par la suite ?

L.-A. : Le mix a été fait plus tard, mais l’enregistrement a vraiment été fait pendant ces deux jours, en live. Il faut dire qu’on avait déjà joué ces chansons-là en spectacle avant, ou en tout cas quelques-unes. Il y en a une, C’est un virus, que l’on faisait pour la première fois ensemble en studio. Les musiciens avec qui je travaille sont ultra créatifs. Je ne sais pas si tu veux que je les nomme… Il y a David Marchand à la basse et à la guitare, que l’on connait parce qu’il est dans zouz [formation montréalaise dont leEP2 est paru en octobre 2018] et dans plein d’autres projets. Étienne Côté, qui était le percussionniste, a également joué du marimba et du synthétiseur. Il a aussi un projet solo, qui s’appelle LUMIÈRE. Naomie De Lorimier était à la voix et aux machines, les synthétiseurs. Elle a un projet qui s’appelle N Nao, qui a d’ailleurs sorti un album récemment. Au drum, c’est Laurent St-Pierre, qui travaille aussi avec d’autres artistes et sur d’autres projets. Finalement, Ariel Comptois jouait du saxophone. On a tout fait les arrangements ensemble, on n’a pas engagé de réalisateur. Il n’y avait que le preneur de son, Jean-Bruno Pinard, qui était là. Il a aussi fait les albums de Mon Doux Saigneur, de Simon Kearney. Bref, on a jammé et on a enregistré pour voir ce que ça allait donner.

I.C. : L’album s’appuie sur un univers sonore riche et semble être la rencontre de nombreuses influences. Quelles étaient tes influences musicales lors de la composition de Première apparition?

L.-A. : C’est une question à laquelle j’ai beaucoup de difficulté à répondre, parce que je ne suis pas quelqu’un qui écoute nécessaire beaucoup de musique. Quand on me demande ce qui m’inspire vraiment, je ne pourrais pas dire. J’ai beaucoup écouté Feist, c’est une artiste qui peut compter parmi les influences musicales, sinon, je n’ai pas de groupe phare ou d’inspiration précise.

I.C. : Pour les textes, en terme d’influences littéraires, est-ce qu’il y a des auteurs ou des autrices qui se sont particulièrement démarqués pour toi dans les dernières années ?

L.-A. : Non plus ! Vraiment, je ne suis pas quelqu’un qui lit beaucoup non plus. Ça vient comme ça.

Photo: Courtoisie, Geneviève Grenier

I.C. : Plusieurs semblent noter des références à la nature dans plusieurs de tes chansons, alors je ferai de même : pourquoi ce sujet t’inspire particulièrement ? D’autre part, quels autres thèmes sont évocateurs pour toi lorsque tu écris une chanson ?

L.-A. : La nature, je pense que c’est parce que j’ai grandi à Kamouraska, dans la campagne. Maintenant, ça fait six ans que j’habite en ville et on dirait que mon rapport à la nature est un peu manquant. C’est donc de là que ça vient, dans mes textes, c’est pour me rappeler des paysages ; souvent, j’essaie de décrire des scènes ou des lieux. Et puisqu’on parle de paysages : j’aime aussi imaginer le paysage du corps humain. Par exemple, dans Chaque nuit, c’est comme si je me promenais à l’intérieur d’un corps, qui est comme une ville. J’aime beaucoup faire des liens entre la science, la nature, le corps.

I.C. : La prochaine question est un peu ridicule, c’est une question thématique en lien avec le simple C’est un virus, ça fait très Tout le monde en parle, c’est pathétique. Pourrais-tu identifier un virus qui, selon toi, affecte certaines propositions, comme premièrement, l’industrie musicale ? Si cela se dit.

L.-A. : Un virus ? Tu veux parler d’un artiste ? (rires)

I.C. : Pas nécessairement une personne, plutôt une problématique.

L.-A. : Je dirais les plateformes numériques de diffusion. En même temps, c’est un bon et un mauvais virus à la fois. Des plateformes comme Spotify, ça rend la musique plus accessible, ça permet aux artistes d’atteindre un public et de se faire connaître, mais en même temps, ça fait qu’on est de moins en moins rémunérés pour l’art qu’on fait. Donc voilà, les plateformes de diffusions gratuites. Presque gratuites. (rires)

I.C. : Un virus dans la politique québécoise actuelle ?

L.-A. : Ouh, politique québécoise ? J’aurais dit l’ancienne ministre de l’Environnement [MarieChantal Chassé], mais elle a été renvoyée déjà. Je ne sais pas, ça fait un petit bout que je ne me suis pas tenue au courant de ce qui se passe, mais si on peut remonter dans le temps, c’est ce que je dirais.

I.C. : Parfait. Finalement, un virus dans la société québécoise actuelle, plus largement ?

L.-A. : Bonne question. Peut-être, je ne sais, la disparition de certaines traditions québécoises. Des coutumes. C’est comme si j’avais une petite nostalgie qui me fait penser à quand j’étais jeune, à une époque où les rencontres familiales étaient plus tissées, de plus en plus on perd ça. Il y a une individualisation qui s’installe peu à peu. C’est tout ce que je trouve à dire en ce moment.

I.C. : Je ne suis vraiment pas prêt à animer mon propre talkshow ! Pour terminer, peux-tu nous parler de tes prochains mois en termes de spectacles et de nouveaux projets ?

L.-A. : Oui, on a d’abord les lancements de l’album à Montréal [Ausgang Plaza, 27 février] et à Québec [Le Pantoum, 28 février]. Ensuite, je fais quelques premières parties ici et là jusqu’à l’été, puis on va faire la tournée des festivals. Je ne peux pas encore dévoiler les programmations, mais on va en faire quelques-uns. À suivre !

Consulter le magazine