Courtoisie : Francis Gagnon

La grande fête du théâtre de la rue

Après quatre années et deux éditions, 2013 ammène la toute nouvelle mouture du spectacle-déambulatoire Où tu vas quand tu dors en marchant ?.

Cyril Schreiber

Pourquoi changer une formule qui fonctionne ? Depuis sa création, Où tu vas quand tu dors en marchant ? est devenu l’activité chouchou du Carrefour international de théâtre, la seule gratuite, probablement la plus populaire et, d’un point de vue théâtral, la plus expérimentale : le théâtre s’invite dans la rue, les spectateurs (et les acteurs) sont invités à se réapproprier leur ville tout en recevant un accès privilégié à une forme d’art encore trop peu démocratique.

Pour cette troisième édition, de nouveaux concepteurs ont été appelés à proposer leur vision du monde et de la société en investissant des lieux inusités qu’on (re)découvre, le tout dans un quadrilatère plus concentré entre St-Vallier Est et le boulevard Charest.

Ainsi, toujours sous la supervision artistique de Frédéric Dubois, assisté de Caroline Martin, le parcours a commencé sur la rue St-Vallier, devant le Complexe Méduse, où Samuel Matteau, via son Parquet, a mis en scène des traders de la bourse qui deviennent fous – beau et cruel portrait en danse de la race humaine. Deuxième étape, la méconnu Maison Lépine-Cloutier au pied de la falaise, où la cour intérieure a été transformée, selon les bons soins d’Anne-Marie Olivier et de sa station Mourir tous les jours, en fête foraine de la mort. Tout juste en face, Marie-Renée Bourget Harvey a implanté sa Forêt remplie de personnages de conte en version trash, sur fond musical angoissant joué depuis les hauteurs par Maude. Finalement, les deux dernières stations prenaient place dans l’impressionnant stationnement circulaire vertical à côté de l’ancien cinéma, où Olivier Normand-Laplante, avec la pièce Insomnie jouée au centre par une talentueuse troupe de cirque, nous fait passer un bon moment plus léger, bien que l’on s’angoisse pour les acrobates. Enfin, rendez-vous au Dernier étage de ce même stationnement avec le trio d’artistes visuels BGL, qui invitait les spectateurs à fumer le calumet automobile de la paix…

La pluie, en ce premier des trois soirs, avait relativement pris congé durant les deux heures de représentation, ce qui fut un petit miracle qu’on souhaite pour les autres soirées. S’il faut saluer l’initiative et tout le travail des nombreux concepteurs des cinq stations (bon nombre de comédiens de Québec participent au projet), notons tout de même, outre les agaçantes issues à sens unique de La forêt qui obligent à revenir plusieurs fois au point de départ, un défaut majeur à l’ensemble : la proximité entre les stations, et aussi à l’intérieur même de chacune d’entre elles, déconcentre, interfère l’attention du spectateur. La concentration des lieux a sans doute ses avantages, mais aussi ses inconvénients. On souhaite encore beaucoup de succès à Où tu vas… cette année, et il est toujours formidable de vivre le théâtre de manière aussi intense. Mais le Carrefour n’a pas encore trouvé la forme parfaite à son activité-phare.

Quoi ? Où tu vas quand tu dors en marchant ? 3
Qui ? Collectif, coordination artistique : Frédéric Dubois et Caroline Martin
Où ? Quartier St-Roch
Quand ? Vendredi 24 et samedi 25 mai, de 21h à 23h en continu

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