Monstres sacrés sur les Plaines

Ce mardi 10 juillet offrait la programmation la plus riche depuis le début du Festival d’été de Québec : carte blanche à Patrick Watson au Pigeonnier, Inna Modja à la place d’Youville et Sarah Slean à l’Impérial, entre autres. Mais sur les Plaines d’Abraham se tenait des spectacles de deux légendes du rock’n’roll qu’il était impossible de manquer.

Cyril Schreiber

C’est tout d’abord Don Felder et son groupe qui sont montés sur la scène Bell. L’ancien guitariste des Eagles est toujours très actif, et prend toujours plaisir à jouer son rock’n’roll dans la pure tradition du genre. Sa prestation, peut-être un peu redondante au bout d’une heure et quart, avait commencé avec l’incontournable Hotel California, jouée sur une guitare double à 12 et 6 cordes. Felder, qui a changé souvent de guitare, reste un excellent guitariste, y allant de solos bien sentis, tout comme son guitariste accompagnateur, avec qui il entretient une belle complicité. Le public a bien répondu à celui qui s’est déclaré en amour avec la ville de Québec, au point d’y avoir passé trois jours en vacances récemment. Ce spectacle l’aura sans doute convaincu de revenir prochainement.

Depuis 1975, il n’avait pas joué dans la Vieille-Capitale. Remplir les Plaines d’Abraham était un pari risqué, puisqu’il n’est pas aussi connu au Québec que dans le reste de la francophonie, et tout particulièrement en France, où il fait office de légende vivante.  Mais après ce premier spectacle au Festival d’été, rien ne sera plus jamais comme avant : le Québec a définitivement adopté Johnny Hallyday. L’Elvis Presley français, véritable mythe tant il a connu plusieurs vies en une, a fait de Québec son seul arrêt en sol canadien durant la tournée Tour 66. Entouré d’une solide équipe de musiciens et de choristes, Hallyday a réservé au public de Québec un spectacle à grand déploiement avec ses plus grands succès, d’Allumer le feu à Toute la musique que j’aime en passant par Marie, Ma gueule, Gabrielle ou Que je t’aime. Une participation remarquée d’un orchestre a permis deux beaux moments signés Michel Berger (Diego libre dans sa tête, Quelque chose de Tennessee), une portion unplugged réussie, tout comme le duo avec Marie-Mai sur Rock’n’roll attitude, et pas mal de titres provenant d’une autre époque – ses débuts dans les années 1960 – ont complété le tableau. On se serait par contre passé de ces moments où les choristes ont pris possession de la scène, aussi talentueuses soient-elles.

Chaque instant de ce spectacle était unique : unique pour le Festival d’été, mais aussi unique pour le Français moyen qui y assistait, puisque Johnny Hallyday représente, qu’on le veuille ou non, un pan important du rock français. Souvent ridiculisé, parfois à tort et à raison, il reste que Johnny demeure toujours le taulier : à 69 ans, il était vocalement et physiquement en forme. La charge émotive qui se dégage de ses interprétations n’a pas d’égal. De plus, de superbes animations visuelles pouvaient être admirées en arrière-fond, ce qui en a fait un spectacle vraiment complet.

D’un point de vue extérieur, assister à un spectacle de Johnny Hallyday peut paraître ringard, surtout pour un jeune. Mais il fallait être là pour comprendre et vivre au moins une fois dans son existence cette expérience tout à fait unique. Les Plaines d’Abraham et le public présent se souviendront longtemps de ce passage de Johnny Hallyday le 10 juillet 2012 – nous pouvons maintenant « mourir » tranquilles.

 

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