No de Pablo Larraín clôt une « trilogie imprévue » sur les années Pinochet ( avec Tony Manero et Post Mortem ) avec un excellent film, cependant plus politique qu’historique.

¿No? ¡Si!

No de Pablo Larraín clôt une « trilogie imprévue » sur les années Pinochet ( avec Tony Manero et Post Mortem ) avec un excellent film, cependant plus politique qu’historique.

Louis-Augustin Roy

No Photo de Tomás Dittburn, Courtoisie de Sony Pictures Classics-_
Courtoisie: Sony Pictures Classics

Il faut concevoir que les films de fiction ne seront jamais des cours d’histoire. Bien sûr, la fin de la dictature chilienne de trois lustres n’est pas que l’affaire d’une campagne de pub hop-la-vie d’un mois ( voir à ce sujet l’article du New York Times sur les réactions chiliennes au film ). Alors qu’en réalité le référendum fut surtout gagné par le travail de terrain, on suit l’histoire d’un publicitaire qui accepte le défi de faire gagner le « No », coalition contre Pinochet, plus par ambition professionnelle que par conviction politique.

Le choix de Larraín de traiter un aspect particulier des évènements fut le bon. Le film constitue une remarquable exposition d’un principe qui court et s’infiltre dans tous les interstices politiques contemporains : l’image d’une idée est plus importante dans l’esprit collectif que l’idée elle-même. Il y a des milliers d’exemples depuis la « violence des carrés rouges » à l’« inculture des droitistes ».

No est filmé avec une caméra de 1983, en format télévisuel 4:3, utilisée à l’époque pour la pub, rendant les lumières vives, presque imprimées sur la pellicule, et les couleurs saturées. Le réalisateur peut se permettre d’incorporer 30 % d’images d’archives sans que l’on s’en rende toujours compte. Les spots publicitaires, par exemple, sont originaux.

Très efficaces, le montage et l’arc dramatique conventionnel permettent de tout dire ce qui pouvait être dit sur une certaine façon de voir la politique. Cette façon de voir, non partisane par essence, permet entre autres de se questionner sur notre vertu : si le personnage n’avait pas été du « bon côté » de l’histoire, aurions-nous accepté ses méthodes, si nous les acceptons lorsqu’il s’agit de renverser un dictateur ?

L’accès à des films politiques réfléchis en fiction étant relativement rare à Québec, remercions les Oscars de mettre de l’avant un film qui, s’il n’était resté qu’à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes, serait probablement encore dans l’ombre !

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