Simon Labelle – Ma vie en lo-fi

Disponible en librairie depuis ce 8 septembre, la dernière œuvre de Simon Labelle saura certainement attirer l’attention (positivement) et toucher le cœur de ses lecteurs.rices. Après le succès de Le pouvoir de l’ivresse, l’écrivain et auteur de bandes dessinées présente Ma vie en lo-fi, publié auprès de Les Éditions Mécanique générale. Labelle y trace savamment le portrait d’une réalité nouvelle qu’est la sienne : celle des troubles auditifs.

Par Frédérik Dompierre-Beaulieu(elle), Journaliste multimédia

D’abord, le choix du support s’avère particulièrement intéressant. Alors que Simon Labelle est déjà actif dans le monde de la bande dessinée – on pourrait penser ici qu’il s’agit tout simplement d’une voie créatrice « facile » – traiter de la surdité en images sert très bien le propos, selon moi. Considérant le caractère anecdotique et bref de l’œuvre, une formule plus traditionnelle en termes d’écriture n’aurait pas autant rendu possible l’immersion des lecteurs.rices dans cet univers qu’est celui de Labelle. D’ailleurs, les choix stylistiques quant aux illustrations peuvent sembler banals, mais la sobriété de l’image – on note, par exemple, l’absence de couleurs – s’accorde encore une fois harmonieusement avec la thématique qu’est celle de la surdité. Par cette présentation en noir et blanc au crayon 2B, on vient, d’une certaine façon, reproduire ce fameux lo-fi au niveau du sens de la vue dans la mesure où on expérimente notre immersion de lecture autrement du quotidien. On nous prive d’une des dimensions de la vue qui semble acquise pour beaucoup d’entre nous. Cette vie en lo-fi, c’est en être témoin d’une manière privilégiée, précisément parce qu’on nous la sert visuellement. Réussir à illustrer et à trouver les images afin de faire comprendre des notions auditives relève d’une habileté sensible et très fine à communiquer, ce que Labelle réussit avec brio.

Aussi, les moments humoristiques sont efficaces, non seulement en raison de l’angle d’approche choisi, mais parce que c’est très personnel et intime. L’auteur présente sa réalité en restant franc et authentique, et ne prétend pas se faire le porte-parole de toute une communauté. Il ne cherche pas non plus à s’apitoyer sur son sort, et les nombreux moments cocasses tirés d’événements ordinaires parviennent à faire apparaître de nombreux sourires en coin au moment de leur lecture. Malgré tout, Labelle soulève des enjeux qui sont sérieux, nous entraînant dans une certaine remise en question de notre propre approche à la surdité et notre manière d’y réagir lorsque nous y sommes confronté.es. Il met en scène des situations et réactions qui peuvent s’avérer être dérangeantes ou inappropriées sans toutefois tomber dans un ton accusateur. En fait, il en résulte plutôt un humour grinçant bien dosé et qui tisse une trame narrative unique qui est propre à l’auteur. La surdité est un univers relativement méconnu, et Labelle y rend l’accès, tout comme à son intériorité, plaisant, léger, mais utile, touchant et pertinent surtout.

 

Illustrations

[1] Labelle, Simon. Ma vie en lo-fi, Illustration numérique. https://www.simonlabelle.com/ma-vie-en-lofi.html

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