Photo: Courtoisie, Jerry Pigeon

The City Holds My Heart de Ghostly Kisses : un retour qui laisse place à l’inconscient

Dans son nouveau EP, The City Holds My Heart, paru le 23 novembre dernier, le projet de Québec Ghostly Kisses poursuit l’exploration sonore amorcée sur What You See, leur précédente parution. Fruit d’une collaboration avec Louis-Étienne Santais, de Fjord, la nouvelle proposition ose des sons plus organiques, tout en continuant d’aborder des thèmes chers à Margaux Sauvé, la chanteuse, auteure et principale compositrice de la formation. Impact Campus s’est récemment entretenu avec cette dernière.

Pouvez-vous nous parler du processus de création de ce nouveau EP ? A-t-il été différent de celui du précédent ? 

Oui, il a quand même été différent. Pour cette série de chansons, j’ai travaillé avec Louis-Étienne Santais du groupe Fjord, comparativement au premier qui était avec Dragos Chiriac de Men I Trust. Le processus s’est fait sur presque deux ans, parce que pendant environ un an, moi et Louis-Étienne avons beaucoup parlé de musique, de ce que nous voudrions faire, et de nos inspirations. On a beaucoup parlé du projet avant même de commencer à travailler ensemble. Cela a joué sur la réalisation des chansons ; quand je lui ai présenté les compositions, on avait déjà une idée assez précise d’où est-ce qu’on s’en allait et je pense que ça a apporté une certaine profondeur au résultat final. Le reste du projet suivait beaucoup les mêmes lignes directrices que le premier, dans les thèmes abordés, dans l’instrumentation, aussi.  

Quelles nouvelles influences avez-vous convoquées dans la composition des nouvelles chansons ? 

Je pense qu’avant j’étais attirée vers les arrangements et les instruments plus électroniques. Disons, dans les percussions, avant c’était très électro, alors que pour ce EP-là, on voulait quelque chose de plus organique, comme des percussions qui sonnent plus comme un vrai drum, on a enregistré de la harpe, des cordes, il y a plus de guitares. On était beaucoup influencés par la musique des années 90.  

Est-ce que c’est la fréquentation de nouvelles influences musicales, c’est-à-dire des artistes que vous avez écoutés entre temps, qui vous a donné le goût d’explorer cette avenue-là, ou c’était, selon vous, la continuation logique du projet Ghostly Kisses ? 

On en parlait Louis-Étienne et moi. C’est sûr qu’on écoute différents styles de musique ; pendant une certaine période, j’étais plus dans l’électro, puis cela a évolué, tout simplement. C’est de la musique que j’écoute depuis que je suis jeune, par exemple, Portishead, Massive Attack, c’est des référents que j’ai depuis vraiment longtemps, mais je ne me voyais pas nécessairement aller dans ce sens-là. À force de composer, de chanter, on dirait que je me suis vraiment redirigée vers ces inspirations.  

Photo: Jerry Pigeon

Qu’est-ce qui a motivé votre choix d’interpréter Zombie des Cranberries sur The City Holds My Heart ? 

Définitivement son décès [celui de Dolores O’Riordan, chanteuse de la formation irlandaise], l’année passée. C’est sûr que ça m’a rappelé beaucoup de souvenirs de jeunesse, du temps où j’écoutais sa musique. C’est une chanteuse qui m’a beaucoup inspiré, elle fait partie de mon apprentissage musical. Quand j’ai appris son décès, on avait un spectacle cette semaine-là et j’ai proposé aux gars de l’essayer. On l’a pratiquée une fois avant le show et c’était parfait, c’était vraiment facile à faire. La réaction était vraiment bonne, ça créait un moment de rassemblement, ça a fait du bien à ceux qui aimait The Cranberries. Pour le EP, j’ai décidé de continuer sur cet élan-là de recueillement, de partage. C’est important de se rappeler de la musique des gens qui nous ont marqué. Tout s’était tellement fait naturellement pour la version live que je me suis dit, pourquoi ne pas la mettre sur le EP, en hommage. 

On vous connait depuis quelques années grâce au projet Ghostly Kisses, mais quel est votre parcours musical personnel ? Avez-vous étudié en musique, eu d’autres projets ou groupes ? 

Moi, j’ai commencé par le violon dès l’âge de cinq ans. Dans ma famille, ma mère jouait du piano, mon frère du violon lui aussi. Le violon a donc été mon instrument jusqu’à 22-23 ans, je suis allée au Conservatoire quelques années pour parfaire mon apprentissage, puis après j’ai joué dans quelques groupes folk de Québec. C’est vraiment en 2015 que j’ai commencé le projet Ghostly Kisses, et à chanter. Ça fait quatre ou cinq ans que je chante, que le piano a pris plus de place. Mon apprentissage de la musique s’est vraiment fait par le classique, par le violon, et par mon écoute personnelle de différents groupes et de différentes musiques.  

Quels sont les thèmes qui inspirent les paroles de vos chansons ? 

Je dirais que le thème principal est vraiment la dualité entre les rêves et la réalité. J’ai réalisé que beaucoup de choses que j’écrivais venaient de pensées inconscientes et que j’avais besoin de les extérioriser par la musique et en écrivant des textes. C’est drôle, parce que, même aujourd’hui, je réalise que certains choses que j’ai écrites prennent un autre sens plusieurs mois plus tard, vraiment longtemps après. J’ai l’impression que mon processus d’écriture fait parler mon inconscient. C’est sûr que c’est moi qui l’interprète comme ça ! C’est un peu comme un journal intime, c’est de l’écriture automatique, et je réalise après ce que ça voulait dire. Des fois c’est très clair, mais souvent, ça prend forme plus tard. 

Ce n’est pas tant que vos textes soient prémonitoires, plutôt qu’ils s’enrichissent par le vécu, en quelque sorte. 

En fait, ce qui est écrit, je n’en réalise peut-être pas la force au moment de le mettre sur papier. Le fait d’écrire en anglais permet aussi un genre de dévoilement, c’est moins cru que d’exprimer directement ce que je pense en français. Vu que c’est en anglais, c’est un peu déguisé.  

On parle beaucoup de votre succès sur les plateformes numériques comme Spotify, vous présentez vos compositions au public de single en single, en passant par deux EP, mais envisagez-vous l’aventure que représente un album complet ? 

C’est sûr qu’un jour j’aimerais faire un album complet, sur un thème. Une œuvre, même si c’est gros de dire ça. C’est un rêve que je veux réaliser, mais pour l’instant, je n’ai pas vraiment le support nécessaire pour le faire, soit au niveau de la visibilité, tout simplement d’un point de vue financier, pour être totalement transparente. C’est sûr que c’est plus facile de faire quelques chansons et de les sortir à mesure, de faire ça petit à petit, ça me permet d’avoir de la visibilité et ne pas être prise par un trop gros projet qui prend trois ans à faire. Pour l’instant, j’aime vraiment cette façon-là de travailler, ça permet d’explorer différentes choses sans viser trop gros pour l’instant. 

Vous ne voyez pas le EP comme une proposition mineure, de toute évidence. 

Non, pas du tout. C’est juste plus facile de diffuser et de partager quelques chansons à la fois, plutôt qu’un projet qui nous mobiliserait plusieurs années. 

À quoi peut-on s’attendre du lancement de mercredi à l’Anti ? 

Mercredi, on va présenter les chansons du EP. En fait, ce sera vraiment un aperçu du show qu’on prépare pour l’hiver, un clin d’oeil à ce qui s’en vient, à quatre musiciens. Donc, cette semaine, ce sera un 5 à 7 sous forme d’aperçu, et cet hiver, il y aura place à plus de collaborations et de surprises. 

Vous y avez répondu en partie, mais à quoi ressembleront vos prochains mois ? Avez-vous plusieurs dates de prévues, une période que vous prévoyez consacrer à la composition ou au studio ? 

En fait, on a une douzaine de dates au Québec en février, mars et avril, puis on prépare déjà la suite de ce EP là [The City Holds My Heart], la continuité du nouveau projet, qui va techniquement sortir à l’été ou à l’automne 2019.

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