Coupes à Blanc – une expérience immersive qui oscille entre banalité et catastrophe

Le réel, l’irréel, le peut-être-réaliste et le pas-si-irréaliste se côtoient de près dans la pièce de théâtre du Collectif Verdun. Charlie Cameron-Verge « emprunte les chemins de la tragédie grecque pour mieux dépeindre les conséquences lointaines d’une dystopie climatique et sociale annoncée », tel qu’inscrit dans le synopsis de la pièce. Celle-ci est aujourd’hui présentée au stade de projet en laboratoire; aller voir la pièce, c’est donc assister au processus créatif, et même dialoguer avec celui-ci. En tant que laboratoire ouvert, la représentation du 16 septembre consistait en la première demi-heure de la pièce, suivie d’une période de discussion. Coupes à Blanc sera de nouveau jouée en mode expérimental le 22 septembre à 19h au théâtre Périscope.

Par Sabrina Boulanger, journaliste multimédia

Texte et mise en scène : Charlie Cameron-Verge | Costumes : Émily Wahlman | Distribution : Mariann Bouchard, Natalie Fontalvo, Jonathan Gagnon, Marie-Ève Lussier et Dayne Simard 

Il y a un éléphant dans la pièce. On nous dit que c’est le dernier jour, mais le dernier jour de quoi? Les tensions s’accumulent et s’érigent au fil de la pièce : on en relève au sein des couples, entre les deux scènes utilisées, dans l’opposition intérieur/extérieur. On nous place tantôt au beau milieu de la misère rampante, tantôt face à la banalité du quotidien, le tout étant bien découpé par l’utilisation de deux planchers. Le premier est directement au sol, au centre du carré formé par la disposition des spectateurs, et le second est sur une plateforme derrière. Dans cette disposition, on saisit très bien la tranchée qui sépare deux mondes; le réel et l’irréel, les malchanceux et les fortunés, la nature et l’homme. Ce clivage alloue toutefois des glitchs entre les univers, qui ne sont pas si distincts que ça, finalement.

Le naturalisme choisi par le metteur en scène fait en sorte que la pièce se dresse lentement devant le spectateur, qui a ainsi tout son temps pour zieuter le décor, analyser la situation et s’y tailler une place. La formule qui a été présentée le 16 septembre prenait fin après la mise en place d’une ambiance, de personnages et d’intrigues. Une fois cette partie exécutée, tout le monde s’est tiré une bûche et c’était une discussion entre le public et les membres du Collectif Verdun, afin de parler d’ajustements potentiels, de ce que nous avons aimé et moins aimé, de procédés théâtraux, de choix artistiques. Très intéressant dialogue entre les artistes et les spectateurs qui était à la fois rétroactif à ce qu’on venait de voir et participatif à une prochaine édition de la pièce.

 

Une pièce écoresponsable

Autre aspect intéressant de Coupes à Blanc : sa quête d’écoresponsabilité tout au long du processus. On parle du moyen de déplacement des membres du Collectif, de leur régime alimentaire au travail, de la consommation d’électricité de la bâtisse qui les héberge, du tissu acheté pour les costumes et les décors, et ainsi de suite. Marc-Antoine Morin, en charge de cette facette, explique que le Collectif désirait compenser pour les émissions de gaz à effet de serre qu’il occasionnait via la pièce de théâtre, de sa création jusqu’au déplacement de ses spectateurs. Ce souci d’écoresponsabilité résonne d’ailleurs grandement avec les thématiques abordées dans la pièce. Une telle initiative est à saluer, espérons voir davantage d’œuvres et de milieux emboiter le pas dans les temps à venir.

Coupes à Blanc est encore au niveau du polissage, mais produit fini promet, et j’ai pour ma part bien hâte d’y assister!

Crédits photo : Théâtre Périscope

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