Esthétisme et réalisme

On pouvait assister à la première du film Le démantèlement, écrit et réalisé par Sébastien Pilote, au Cinéplex Odéon de Sainte-Foy jeudi dernier. Un grand moment d’émotion.

Julie Day-Lebel

Le réalisateur a choisi de tourner ce film dans son coin, sa région natale, le Lac-Saint-Jean. L’histoire est celle d’un fermier dans la soixantaine, Gaby, qui doit démanteler – vendre séparément, à tout prix – sa bergerie afin de pouvoir venir en aide à sa fille éprouvant des problèmes financiers. C’est aussi bien plus que ça, car il ne s’agit que d’un prétexte pour nous raconter l’histoire d’une famille, d’une terre et d’un homme et de tant d’autres ayant vécu la même chose. Il s’agit bien d’une réalité de plusieurs régions.

La recherche derrière ce film est grande et louable, en ce qui a trait à l’esthétisme et au réalisme, surtout. Ces deux aspects vont de pair, et Sébastien Pilote l’a compris. Les images sont aussi belles que lourdes d’émotivité. Les plans sont longs, on nous montre tout, qu’il s’agisse des moutons et de leur bêlement sans fin ou du personnage principal dans ses plus anodines activités, et ce, avec une lenteur effrontée, mais étrangement rassurante et agréable à recevoir. Ces sons, ces images, ces temps précautionneusement choisis, nous font croire au récit.

En fait, il est difficile de le transcrire, mais le film se distingue par une mélancolie face à laquelle on ne peut rester indifférent.

Le texte déposé sur cette trame en est à la hauteur. Aucune réplique n’est laissée au hasard. Tout ce qui est prononcé sert le scénario, et vice-versa. D’ailleurs, Gaby, le personnage principal, a deux filles. Sébastien Pilote a donc cru bon de séparer son long métrage en deux grands chapitres distincts : Marie et Frédérique. Une touche littéraire pertinente dans un film où chaque mot compte, et ces deux-là plus que tout autre.

Les acteurs, Gabriel Arcand, dans le rôle principal, Gilles Renaud, Lucie Laurier et Sophie Desmarais, principalement, complètent et alimentent, avec un talent remarquable, cette œuvre magistrale.

Le démantèlement parle des rapports humains dans toute leur ampleur, mais aussi de solitude. De déchirements, mais de réconfort. De liens familiaux brisés ou soudés.

Le plus exceptionnel dans cette œuvre est probablement que tout le monde peut s’y retrouver, en être touché, d’une façon ou d’une autre.

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