Israa al-Mudallal, nouvelle icône du Hamas

Elle est âgée de 23 ans, a étudié quelques années en Grande-Bretagne, parle anglais, apprend l’hébreu et tweet (isra_jourisra) à fond la caisse : voilà un court descriptif de la nouvelle personnalité du Hamas.

Récemment nommée par le Hamas comme porte-parole du parti politique au pouvoir dans la Bande de Gaza, Israa al-Mudallal se donne comme objectif de changer la perception de l’Occident du parti et de la cause palestinienne. Perception qui devrait moduler par un discours davantage axé sur l’humain, ce que comprend mieux l’Occident qu’un discours religieux selon al-Mudallal.

En effet, le Hamas a tout à gagner en pariant sur une équipe de jeunes, ce que prend en considération Ihab Ghussain, chef du département médiatique de l’organisation. Changer l’image du Hamas, c’est changer possiblement son avenir. Plusieurs États l’ont classé comme groupe terroriste, ce qui permet surtout de délégitimer ses revendications et actions en la disqualifiant de l’arène « démocratique », malgré le fait qu’il ait remporté les élections de 2006 dans la Bande de Gaza et d’imposer de nombreuses restrictions aux membres du Hamas, ce que al-Mudallal est prête à subir. La communauté internationale a fort à jouer dans la reconnaissance d’un État palestinien souverain par son appui et il ne faut pas oublier le « triangle-amoureux » que forment la Palestine, Israël et les États-Unis. L’Iran joue la même carte avec l’élection de Rohani, président plus « modéré » dans ses propos que ne l’était l’énergique Ahmadinejad, en juin dernier.

Une image plus épurée d’une belle jeune femme aux grands yeux noirs ne viendra pas uniquement sauver l’organisation. Elle doit être concertée avec un discours effectivement changé, en plus d’actions concrètes qui démontrent une certaine ouverture. Ces actions devraient peut-être s’inspirer des recommandations de Gene Sharp, théoricien de la non-violence dans les moyens de lutte contre les gouvernants : placer « sa confiance dans les moyens violents [revient à] choisi[r] le type même de lutte dans lequel les oppresseurs ont presque toujours la supériorité 1». Il faudrait ajouter que l’appui de la communauté internationale ne viendra pas avec l’utilisation de la violence, moyen illégitime et honni généralement par « nos types de société ».

Reste maintenant à savoir si la nouvelle porte-parole pourra communiquer avec les médias israéliens, malgré l’interdiction en vigueur du Hamas pour tout journaliste palestinien de la Bande de Gaza depuis décembre 2012. Changer de couleur est également valable en Israël, mais le Hamas n’est probablement pas encore rendu là.

Il faut rappeler qu’Israa al-Mudallal n’est pas la seule femme détenant un poste au sein du Hamas. Jamila al-Shanti détient le poste de ministre des Affaires de la femme, sans compter un certain nombre de députés féminins au Conseil législatif palestinien.

1 : Gene SHARP, De la dictature à la démocratie, p. 25

 

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